Les orientations économiques du gouvernement et les mesures prises depuis le retour de Ahmed Ouyahia à la chefferie du gouvernement continuent de susciter débats et commentaires. Hier, des experts, patrons et représentants de partis politiques ont souligné les errements ayant caractérisé les choix économiques du pays, notamment ce qui a trait aux investissements étrangers, et ce, lors d'une rencontre organisée au forum d'El Moudjahid à Alger. « Nous sommes en train de payer la mauvaise gouvernance », dira le consultant en économie industrielle, Réda Amrani, pour qui « le plan de relance économique manque de suivi ». M. Amrani n'a pas manqué de relever toutes les facilités accordées aux opérateurs étrangers, citant les cas d'Orascom à qui on a confié des centrales électriques et celui d'Ispat dont le contrat contient une clause interdisant à l'Etat d'investir dans la sidérurgie pendant 10 ans ! « Du jamais-vu ailleurs », clame-t-il, « alors que des pays comme le Japon et bien d'autres encore protègent leurs investissements publics ». Pis, dira M. Amrani, dans le cas du métro d'Alger, « on est allés jusqu'à créer des problèmes et beaucoup de retard aux entreprises algériennes afin de justifier le recours aux entreprises étrangères ». Tout en estimant que les investissements étrangers « sont bâtis sur la rente » et ne font guère appel aux algériens en termes d'engineering. M. Amrani a indiqué qu'il faut désormais imposer la règle des 50% afin de faire une plus-value locale, citant au passage l'exemple de la Corée du Sud qui dispose d'une loi sur l'engineering datant de 1969, selon ses dires. Pour ce consultant, « il faut faire le bilan et essayer de corriger la machine », tout en plaidant pour les investissements futurs d'associer les entrepreneurs nationaux et les chambres de commerce. « Nous sommes dans une bulle économique alimentée par la rente pétrolière, il faut revenir à la politique d'investissements productifs de richesses », a-t-il conclu. Le président du Conseil national consultatif pour la promotion de la PME, Zaïm Bensaci, a pour sa part, plaidé pour plus de moyens à mettre à la disposition des PME, suggérant de leur consacrer 1% du PIB pour leur développement. Comme il a plaidé pour la sous-traitance des champions nationaux publics et privés au profit des PME. Tout en estimant qu'il faut aider et protéger les opérateurs nationaux et exiger des contrats de performance pour les gestionnaires des entreprises publiques, M. Bensaci a estimé que « ceux qui ont géré les monopoles ne peuvent gérer aujourd'hui la libéralisation ». « C'est un problème de structure mentale », a-t-il ironisé. Idris Yalaoui, PDG du Groupe industriel Liège Algérie, a quant à lui, estimé que les pouvoirs publics « n'ont pas analysé suffisamment les besoins de la PME pour savoir quoi lui donner », relevant que le travail de mise à niveau des PME du 1er programme MEDA est un « échec ». Pour lui, si les PME algériennes sont développées, cela se traduirait par l'abondance des produits locaux, leur part dans les exportations et dans les investissements. Or, fera-t-il remarquer, « la production nationale est remplacée par des produits étrangers parfois douteux, les exportations dépendent encore des hydrocarbures et les investisseurs sont étrangers ». Et pour mieux illustrer cet état de fait et la déliquescence ayant atteint des secteurs qui auraient pu prospérer, M. Yalaoui a indiqué que l'Algérie est arrivée jusqu'à importer des bouchons en liège pour les bouteilles de vin. Enfin, le député et représentant du parti des travailleurs, Ramdane Taazibt, a indiqué que le bureau de l'APN, a écrit au chef du gouvernement pour ouvrir un débat sur le bilan des privatisations. Tout en fustigeant l'accord d'association avec l'Union européenne et les « aventuriers » qui plaident pour la création de fonds souverains, le représentant du PT a estimé qu'il faut « rouvrir les entreprises fermées ».