Oran a abrité, la semaine dernière, un colloque international intitulé «1962, un monde». Nouria Benghabrit-Remaoun, Directrice du CRASC, revient sur cette manifestation organisée par l'institution qu'elle dirige en partenariat avec le Centre d'études maghrébines (CEMA) et l'Institut historique du temps présent (l'IHTP, Paris). -Quel bilan faites-vous du colloque «1962, un monde» ? C'est à un moment particulier que s'est tenu ce colloque, celui du cinquantenaire de l'indépendance de l'Algérie. Bien que l'essentiel de nos préoccupations, durant ces trois jours, ait porté sur le contexte de 1962, nous ne perdons pas de vue les changements en profondeur enregistrés dans la société algérienne comme dans le reste du monde, 50 ans après. Cette année est également celle des 20 ans du CRASC, d'une recherche au service de la connaissance de nos sociétés, à travers nos interrogations sur des domaines divers. 1962 constitue à la fois une date, un symbole et le point de départ d'une dynamique nouvelle. Une date où l'histoire d'un pays, en l'occurrence l'Algérie, participe au grand mouvement des changements et bouleversements historiques et politiques. Un symbole majeur, celui de la fin d'une ère, celle de la colonisation où les rapports entre les pays furent régis par la force, la domination et l'oppression. Une dynamique, forte, audacieuse qui annonce une nouvelle recomposition des relations entre les peuples et où le romantisme révolutionnaire se conjuguait aux aspirations de justice sociale et de dignité humaine. La fin de la période de la colonisation, que 1962 exprime avec beaucoup de force, constitue une étape fondamentale dans l'histoire de l'humanité.Les années 1950, 1960 et 1970 furent une période propice aux expériences hardies, aux nouveaux projets de société et aux grandes espérances (tiers-mondisme, lutte contre l'impérialisme, révolutions…). C'est une période qui fut aussi marquée par la Guerre froide et ses lourdes répercussions sur les relations internationales et également par des reniements et des échecs patents. Le colloque «1962, un monde» n'a pas eu seulement pour ambition d'interroger ce «moment de rupture» qu'est l'année 1962, comme un marqueur historique, mais également de s'intéresser à sa portée politique, philosophique, sociale, culturelle et artistique. Le comité d'organisation a reçu presque 200 demandes de participation, notamment du Maghreb, d'Europe et d'Amérique du Nord. Le bilan du colloque est positif pour plusieurs raisons: cet événement est le résultat d'un partenariat entre plusieurs institutions scientifiques: le CRASC, le CEMA et l'IHTP, Paris. Autre raison, c'est qu'il y aura des suites… -Justement, qu'est-ce qui est projeté comme suite à ce colloque ? Des suites multiformes sont prévues par les organisateurs de ce colloque: il y aura des publications ici en Algérie, aux USA, en France, aux USA, de documents à partir de synthèses ou de numéros thématiques issus de nos travaux. Des rencontres sont d'ores et déjà au menu, et auxquelles certains collègues du CRASC participeront: c'est le cas d'une manifestation organisée par Todd Shepard, sur «1962-2012 World after algerian independance», les 1er et 2 novembre 2012 à John Hopkins University (Baltimore). Une autre rencontre sera organisée à la mi-novembre par le Centre d'anthropologie méditerranéenne sur «Mémoires algériennes en transmission» avec Julia Fabbiano de l'EHESS et Abderrahmane Moumen du CRHISM. La conviction des organisateurs est forte quant aux suites et répercussions pour la recherche et une meilleure connaissance sur tout ce qui touche à la Révolution algérienne et à ses retombées dans le monde dans lequel nous sommes et le contexte de 1962. Par ailleurs et dans le cadre du 50ème anniversaire de l'indépendance nationale, le CRASC organise plusieurs rencontres d'ici le mois de décembre 2012, notamment le Symposium sur «Algérie: penser le changement. Quels apports des sciences humaines et sociales?» du 02 au 04 décembre 2012, en partenariat avec le CREAD, ARST (ex-ANDRU) et l'université de Constantine.