Les Aurès ne décolèrent pas en dépit des tentatives de Youcef Yousfi et du panel de hauts responsables qui l'ont accompagné lundi à Batna pour calmer les populations de la région, offusquées par les propos de Abdelmalek Sellal. Depuis dimanche, le vent de colère souffle à Khenchela, Oum El Bouaghi et la capitale des Aurès, Batna, où ont lieu de nombreuses manifestations. Dans la matinée d'hier encore, des dizaines de citoyens ont profité du passage du ministre de la Santé pour manifester dans la ville de Merouana (40 km à l'ouest de Batna) et exprimer leur rejet de ce qui est qualifié de «provocations indignes d'un haut responsable». Arris, l'une des plus grandes villes de la wilaya et fief historique de la résistance anticoloniale, n'est pas en reste. Un groupe d'anciens moudjahidine et des jeunes prévoient, en effet, d'organiser aujourd'hui une marche à travers les artères de la ville pour dénoncer les propos de l'ex-Premier ministre. Mais l'initiative, prévue demain à Batna-ville, devra être plus importante, d'autant que ses initiateurs, le collectif B'zayed, la section locale de Barakat, et des groupes d'étudiants universitaires, tablent sur un million de manifestants. De quoi donner du stress aux forces de sécurité locale. Une chose est sûre, ces mouvements de colère inquiètent sérieusement le pouvoir central qui a dépêché lundi le nouveau Premier ministre, Youcef Yousfi, accompagné du ministre de l'Intérieur, Tayeb Belaïz, et du général Ahmed Boustila. Les élus locaux appellent au calme Ces derniers ont auditionné, loin de la presse, les relais traditionnels du pouvoir, composés de notables et d'associations. Si aucune information n'a filtré sur le contenu du conclave, il est clair que ces relais ont été chargés de sous-traiter le désamorçage de la colère populaire. D'ailleurs, les élus de l'APC de Batna ont vite réagi en publiant un communiqué dans lequel ils invitent Abdelmalek Sellal à s'excuser auprès des populations de la région et appellent les citoyens au calme. A Khenchela, les habitants n'ont pas manqué de réagir aussi aux propos de l'actuel directeur de campagne du candidat Bouteflika. Des événements violents ont secoué lundi les communes de Zoui et Tazougart sur l'axe reliant Khenchela à Tébessa. Des dizaines de jeunes sont sortis dans l'après-midi pour marcher, avant de bloquer la route à l'aide de pneus brûlés. Irrités par «la mauvaise blague», qualifiée d'humiliation, les manifestants s'en sont pris aussi aux élus locaux pour leur soi-disant «silence lâche». Au chef-lieu de wilaya, des affiches collées depuis hier appellent à une manifestation pacifique, à l'initiative de jeunes universitaires et de militants associatifs qui préparent une grande manifestation sur la place Abbas Leghrour. Sur la Toile aussi, notamment sur les pages facebook comme «Les amis de Khenchela» ou «Nass Khenchla», les internautes khenchelis ont manifesté leur indignation face aux propos «racistes», tels que qualifiés par un membre. Jusque-là, les forces de sécurité sont restées à distance, évitant de s'accrocher avec les manifestants en attendant la suite des événements.