Le Liban s'installe dans le cycle infernal des représailles. Pour le ministre de l'Intérieur, Marwan Charbel, la situation « empire de jour en jour ». Dans ce quatrième attentat-suicide commis en moins d'un mois, le « Front Al Nosra au Liban » a voulu « rendre la pareille » à son rival chiite le Hezbollah, qui prête main forte à l'armée régulière syrienne dans sa guerre contre le « terrorisme ». C'est à une dizaine de kilomètres de la frontière syrienne, dans la station-service de la localité de Hermel, formant un réseau caritatif mis en place par l'un des plus grands dignitaires chiites disparu en 2010, Mohammad Husseïn Fadlallah, que ce nouvel attentat a eu lieu, ciblant ainsi le fief du Hezbollah confronté à une série d'attaques pour le « pousser à revoir ses calculs ». Peu après, une bombe a également explosé près d'un bureau de la chaîne de télévision Al Manar, basée à Ouzaï, sans faire de victime. La poudrière libanaise, marquée par l'exacerbation des tensions confessionnelles entre sunnites et chiites libanais, est aggravée par l'entrée en scène d'al Qaïda, déployant ses contingents d'Al Nosra et de l'EIIL (Etat islamique en Irak et au Levant) revendiquant l'attentat perpétré, le 2 janvier dernier, dans le bastion du mouvement de Nasrallah. Le septième attentat, visant ce dernier, depuis la confirmation de son engagement à la mi-2013, n'est pas sans conséquence sur la stabilité du Liban paralysé par la crise politique et la vacance gouvernementale provoquée par la démission du Premier ministre, Najib Mikati, lançant un appel à l'unité « pour protéger notre patrie ». En pleine tourmente, le Liban inquiète, de plus en plus, la communauté internationale, exigeant, à l'image du secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, de « traduire en justice les auteurs ». L'ambassade des Etats-Unis à Beyrouth s'est contentée de réaffirmer le « soutien américain aux forces armées libanaises ». Dans cette dure épreuve, les vieux démons de la guerre civile planent sur le Liban, qui subit de plein fouet les contre-coups de la guerre en Syrie. « Un arc de crise est en train d'émerger, de l'Irak au Liban, qui atteste de la contamination de la région par la tragédie syrienne », a relevé Pert Harling, de l'International Crisis Group. « Cet arc est composé d'une multitude de conflits qui s'imbriquent l'un dans l'autre, avec une coloration confessionnelle très forte, même si l'on ne peut pas réduire l'embrasement actuel à un affrontement chiite-sunnite », a soutenu Harling. Le coût est faramineux : 7 milliards de dollars en pertes, a annoncé le Premier ministre Mikati lors de la 50e conférence de Munich sur la sécurité.