Plus de 200 interpellations, une centaine de blessés entre policiers et manifestants, 82 condamnations et 13 mineurs remis à leurs parents, les dernières émeutes qui ont secoué Oran ont montré l'extraordinaire déficience en matière de communication entre les pouvoirs publics et le reste de la population. Où est l'Etat ?, se demandaient des citoyens médusés par la furie et le déferlement d'une telle violence. Pendant trois jours, la ville a été livrée au pillage et au vandalisme systématiques.Des magasins de boissons alcoolisées ont été saccagés et vidés de leur marchandise. Des commerces de sport de grandes marques ont été mis à sac par des casseurs que rien ne semblait arrêter. On a vu des élèves de CEM s'enivrer publiquement à la bière, on a vu des candidats au bac casser à coups de gourdin les vitrines de devantures, mais on n'a vu, à aucun moment, les élus du peuple se démener pour ramener le calme, même les permanences des partis politiques avaient baissé rideau. La peur et le manque d'information ont obligé des gestionnaires à fermer les portes de leurs entreprises ou de leurs services, parfois à les entrebâiller et souvent à libérer leur personnel avant l'heure. La confusion est telle que certains manifestants ont même donné l'accolade aux policiers parce que le bruit avait couru que le Mouloudia remontait en première division. La rumeur avait même prédit un vendredi d'enfer après la prière du dohr et annoncé que des cocktails Molotov étaient prêts à l'emploi. Elle a même fait croire que le président du Mouloudia était caché à l'hôtel Sheraton et qu'il attendait son visa pour fuir en Espagne et éviter d'être lynché. Il n'y a rien eu de tout cela et personne n'a tenté de démentir ces ragots. Les autorités locales, à l'évidence, étaient dépassées et les chargés de presse étaient bien planqués. Et qui gérait la crise ? La rumeur bien sûr ! Oran s'est réveillée ce matin, mal en point et visiblement groggy par des événements qui lui ont fait prendre conscience qu'elle vivait sur une poudrière capable d'exploser à la moindre étincelle et que rien ne garantissait sa sécurité. Ces émeutes lui ont surtout montré l'incroyable distance qui sépare deux générations, les adultes et leur confort et les jeunes et leur mal vie. Le message de ces «harragas» en terre ferme sera-t-il enfin compris ? Ou faudra-t-il attendre un jour d'autres lames de fond ? Oran : 60 personnes écrouées après les émeutes l Une soixantaine de jeunes impliqués dans les émeutes qui ont éclaté à Oran de mardi à jeudi, ont été écroués à l'issue de leur présentation au parquet près le tribunal correctionnel, a-t-on appris de source judiciaire. Une centaine de personnes, dont des mineurs, interpellées également dans le cadre de ces émeutes, ont été mises en liberté provisoire, selon cette source. Les émeutes avaient suivi la relégation du MCO en deuxième division du championnat national de football. La colère des supporters avait dégénéré, donnant lieu à des actes de destructions, de pillages et d'incendies d'édifices publics, de magasins et de véhicules.