Fait important aujourd'hui : des victimes des évènements de T'kout seront au tribunal pour réaffirmer devant la cour que la torture a bien eu lieu. En prison depuis le 14 juin dernier à la maison d'arrêt d'El-Harrach, le directeur du Matin, Mohamed Benchicou, comparaîtra, aujourd'hui, devant le tribunal de Sidi M'hamed, rue Abane-Ramdane à Alger sur plainte déposée par le ministère de la Défense nationale qui a engagé des poursuites judiciaires suite à la publication de témoignages de jeunes citoyens de T'kout. Ces derniers ont affirmé avoir été torturés après leur arrestation par la gendarmerie lors des évènements qui ont secoué cette région. Le directeur du Matin ainsi que la journaliste auteur de l'article, Abla Chérif, sont accusés de diffamations et d'outrage à une institution officielle. Une copie des faits reprochés, jointe à la convocation, accuse la journaliste d'avoir inventé des propos relatant des actes de tortures “croyant pouvoir diffamer et porter atteinte à l'honneur d'une institution de la République sans preuve”, peut-on lire dans le document. Mohamed Benchicou est, pour sa part, accusé d'avoir porté atteinte à l'honneur des Moudjahidine dans une de ses chroniques consacrée aux jeunes de T'kout. Le procès d'aujourd'hui drainera sûrement une grande foule de la corporation, des représentants de la société civile et des citoyens qui viendront apporter leur soutien à Mohamed Benchicou qui est incarcéré depuis 22 jours. Sept jeunes de la ville, victimes de tortures prendront part au procès. Ils seront cités par les avocats de la défense comme témoins. La journaliste du Matin, Abla Cherif, rencontrée hier au siège de son journal, semble confiante et déterminée tout en affirmant qu'elle n'a rien à ajouter par rapport à ce qu'elle a écrit sur cette affaire. “Les témoins sont au nombre de sept pour affirmer la véracité des propos tenus”, et d'ajouter : “Il est cependant important qu'un premier procès soit tenu pour la première fois en Algérie”. Il est à rappeler que le procès en appel, des 27 jeunes détenus à la suite des manifestations dans cette localité de l'Est algérien, tenu le mois dernier, a été l'occasion pour les détenus de prouver par leurs témoignages que la torture avait effectivement eu lieu. Ils ont exhibé devant la cour les traces encore visibles des sévices endurés. Les différents comptes rendus des correspondants de presse et de rapporteurs, dépêchés sur les lieux pour la circonstance juste après les émeutes, ont confirmé la pratique de la torture. Certains de ces victimes n'ont pas hésité à raconter même publiquement la manière dont il a été porté atteinte à leur dignité et les pratiques déshonorantes qu'ils ont eu à subir dans les locaux de la gendarmerie. Il est à rappeler que les mêmes faits ont été dénoncés au cours des évènements par les avocats chargés de la défense des détenus, lesquels avaient organisé une conférence de presse pour alerter l'opinion nationale et internationale. Un appel à une grève générale pour aujourd'hui dans la ville de T'kout a été lancé par le mouvement citoyen des Aurès en signe de soutien à ce procès et contre la torture. M. B.