«Si le bouclage continue, ce sera un désastre», avertit Abou Taha, propriétaire d'un des innombrables tunnels creusés sous la frontière entre la bande de Ghaza et l'Egypte, tous fermés après une récente attaque meurtrière dans le Sinaï. Pour cet homme d'affaires quadragénaire, ces tunnels sont devenus au fil des années une source lucrative de revenus. Mais il est désormais menacé de faillite depuis qu'une trentaine d'hommes armés ont attaqué dimanche dans le nord du Sinaï une position tenue par des gardes-frontières égyptiens et tué 16 d'entre eux, avant d'être neutralisés par l'armée israélienne aux abords du terminal routier de Kerem Shalom. Cette brutale attaque a provoqué une onde de choc en Egypte, où les autorités ont aussitôt fermé le passage de Rafah, entre l'Egypte et la bande de Ghaza, unique fenêtre extérieure de l'enclave palestinienne non contrôlée par Israël. Dans la foulée, tous les accès aux tunnels ont été fermés, interrompant les fructueuses activités véhiculées par ce biais depuis le début du blocus de l'enclave imposé par Israël en 2006. «Les marchandises et produits alimentaires passent par ces tunnels, de même que les matériaux de construction, et tout cela va complètement cesser. Nous allons être étranglés, et Israël s'en réjouira», déclare Abou Taha. Pour Abou Mustafa, 34 ans, propriétaire d'un tunnel spécialisé dans les matériaux de construction, l'annonce de la fermeture a été également «un choc énorme». «Notre affaire va s'arrêter. Cela va porter préjudice à des milliers de familles des propriétaires de tunnels ainsi qu'aux travailleurs», prévoit-il. «Nous ne sommes pas hostiles aux mesures de sécurité prises par les Egyptiens et les Palestiniens, mais nous exigeons la réouverture des tunnels, avec peut-être un peu plus de contrôle. Mais si nous fermons les tunnels, les gens à Ghaza vont mourir», ajoute-t-il. Selon des responsables des services de sécurité palestiniens, il existe des centaines de tunnels à Rafah, une localité très étendue à la frontière entre la bande de Gaza et le Sinaï égyptien.