Trois artistes, figures de proue des confréries des Aissaoua et du Diwan, ont été honorés, jeudi à Constantine, au cours d'une cérémonie chargée d'émotion et d'authenticité dans la mythique Dar Bahri, dans le quartier de la Souika, entièrement restaurée. En présence des autorités locales, d'une pléiade de cheikhs des confréries de la ville et de beaucoup de curieux, nostalgiques des belles "gaâdas" de Dar Bahri, la famille du défunt Mohamed Bendjelloul, décédé en 1980, qui a joué un rôle fédérateur dans la relance et la sauvegarde de la confrérie des Aissaoua a été honorée. L'artiste Abderrahmane Slimani, appelé affectueusement "Daha", un talentueux joueur de fhal (flûte) qui accompagna pendant des décennies les troupes malouf de l'antique Cirta et les groupes Aissaoua, aujourd'hui fragilisé par la maladie, a également été honoré à cette occasion, de même que le chef de la troupe Dar Bahri Ousfane et le patriarche Mohamed El Hadi Hachani. Dans le patio de Dar Bahri, une maison vieille de 500 ans située rue Abdellah Bey, au coeur de la Souika, dont la valeur architecturale confirmée a été reprise à l'identique au bout de trois ans de travaux dans le cadre du projet pilote de la restauration de la vieille ville, les présents ont été subjugués par le Goumbri, le Kerktou, (un instrument de percussion) et la Derbouka de la troupe de Dar Bahri qui retentirent accompagnés des youyous fusant de partout. Mouloud Touhami, de Dar Haoussa, une autre confrérie des Diwan, les artistes Zineddine Bouchaâla et Zineddine Bouabdallah, connus pour exceller dans la musique et chant Aïssaoua ont enflammé la "gaâda" avec des madihs et des chansons du Diwan, interprétés en arabe dialectal et en langue Haoussa (parlée en Afrique de l'ouest), plongeant l'auditoire dans une sorte de transe ponctuée de youyous. Agé de 65 ans, El Hadi Hachani, le patriarche de Dar Bahri, un lieu créé par son arrière arrière grand-père il y a près de cinq siècles, a affirmé à l'APS qu'il oeuvre "à reproduire la tradition ancestrale du Diwan tout en assurant, pour ses enfants, un apprentissage basé sur la transmission des textes et de la langue Haoussa". Evoquant un "héritage familial" et une "maison familiale phare dans la préservation des cérémonies du Diwan dans l'est du pays", M. Hachani a souligné l'importance de perpétuer ce legs immatériel auquel beaucoup de familles constantinoises sont restées fidèles.