Manipulation est le deuxième album de Karim Ouali, alias Samouraï, qui a choisi ce pseudonyme artistique non pas par fascination pour les valeureux guerriers japonais, mais par respect pour un ancien chef de tribu berbère des Touareg. Ces derniers aussi savent manier l'épée, mais Samouraï manie plutôt le verbe et c'est l'arme que l'artiste a choisie pour mener sa guerre contre les maux de la société dans laquelle il vit. Il est animateur de radio à Tamanrasset et c'est en partie le contact avec les auditeurs qui lui a donné l'envie de chanter des préoccupations communes. « Dans le premier titre, je me définis en fait, explique-t-il, comme pour annoncer la couleur et annoncer qu'il est plutôt goual que rappeur ou ‘'slameur''. » Ce deuxième album est nettement plus élaboré que son premier essai, où il s'est laissé « piéger » par les sonorités raï. Mais c'est dans les textes qu'il faut chercher le centre d'intérêt de Karim Ouali qui se réfère dans plusieurs passages explicitement à la religion. Cette approche peut paraître réductrice quand on a l'ambition de critiquer la société, car la seule référence aux préceptes de l'Islam, interprétés au premier degré, peut cacher une certaine paresse à faire l'effort d'analyser ou d'observer minutieusement le fait social. « C'est une façon bien à moi de voir les choses et effectivement je me réfère beaucoup à la religion sans être vraiment impliqué politiquement dans ce courant là », se justifie l'artiste, mathatniche fi bocal local, prévient-il dans sa première chanson où il se réfère à Abderrahmane El Majdoub pour dire qu'il n'écrit pas sur commande et qu'il se fie toujours à l'inspiration comme on attendrait une révélation. Dans le deuxième titre, il pense que rien ne va. Nas khasrat (les gens sont devenus méchants) et, tel un prédicateur, il suggère : Ched fi dinek welli lelkor'an (reviens au Coran). La perte des valeurs humaines est un des thèmes-clés chez le chanteur qui lance un clin d'œil au combat de ceux qui contestent la mondialisation. « L'argent qui fait et qui défait, ça sent mauvais comme dirait José Bové. » Plus loin, dans le même titre intitulé Fatigué de tout, il constate ainsi qu' « après le rêve vient la frustration ». C'est dans Riba que la connotation religieuse est plus explicite, l'usure étant strictement interdite. Vient enfin un thème social lié au mariage et aux conditions de son organisation où les aspects matériels priment sur les sentiments.