Piétons et automobilistes sont contraints, pendant les heures de grande affluence, de rebrousser chemin et chercher une issue dans un labyrinthe où s'enchevêtrent, dans une anarchie indescriptible, des ballots de fripes, des cageots et des étals de fortune. Les automobilistes, qui décident crânement de se frayer un chemin parmi la foule compacte, risquent de percuter des citoyens ou de subir l'ire des vendeurs. Ces derniers ne lésinent ni sur les mots ni sur les moyens pour vous convaincre qu'il s'agit d'un espace commercial. Ayant compris, depuis belle lurette, l'ampleur de la démission des responsables, les commerçants sédentaires squattent leur espace immédiat ou louent carrément une partie de leurs façades qu'il aménagent eux-mêmes, mettant ainsi fin au jeu du chat et de la souris. Victimes d'un immobilisme outrageant de la part des instances compétentes, ces commerçants sont autant responsables que leurs «encombrants associés» pour ce qui est du non-respect de la voie publique. Des pots énormes, des chaises, divers obstacles et autres innovations en fer forgé sont érigés par ces mêmes commerçants, au vu et au su de tout le monde, devant leurs magasins pour interdire le stationnement des véhicules. Dans ce climat de promiscuité et d'anonymat prospèrent les voleurs à la tire, les charlatans et les vendeuses de charme. Même décor à la rue Ouarti Abderrahmane, Hrirech Abdellatif, ainsi qu'à la place de l'Indépendance. La nuit, à Souk Ahras, apporte un autre lot de misères: nuisances sonores provoquées par le vrombissement des moteurs des véhicules et des motos qui s'adonnent souvent à des cascades en plein centre-ville ou agressent les citoyens à coups de décibels depuis leurs radios, des dizaines de chiens errants à la rue du Maroc, malades mentaux agressifs en tenue d'Adam et autres désagréments causés par l'insalubrité des lieux et l'état poussiéreux des chaussées. Résultat de plusieurs décennies de replâtrage et de populisme partisan, les citoyens de la ville de Souk Ahras se plaignent, aussi, de la voracité de la mafia du foncier qui a transformé des anciennes zones d'extension en cités-dortoirs sans âme, grignotant les rares lots épars restant d'une campagne de «ruralisation de la ville». Ni aire de détente, ni jardin public ni boulevard digne de ce nom n'y ont vu le jour depuis la promotion de Souk Ahras au rang de chef-lieu de wilaya.