Un prix Saïd Mekbel, lancé dans la wilaya de Béjaïa par une association de journalistes et de correspondants pour récompenser le meilleur article sur la saison estivale, est, le moins que l'on puisse dire, loin de soulever l'enthousiasme de la corporation. Un collectif de journalistes de la wilaya a vu l'urgente nécessité de s'en démarquer et d'en donner les raisons dans une déclaration publique. Les premiers signataires de cette déclaration, une douzaine de journalistes, voient d'un mauvais œil l'association du nom du défunt journaliste à un concours qu'ils considèrent ayant fait l'économie des règles d'un concours journalistique en confiant, par exemple, l'arbitrage « à des acteurs politiques et associatifs qui évoluent en dehors de la corporation ». Or, rappelle le collectif, les principes éthiques recommandent au journaliste de n'accepter d'honneurs professionnels que de ceux provenant de ses pairs. Le collectif prend surtout le soin de se démarquer d'une initiative qui est « loin de cadrer avec les idéaux et le combat pour lequel le défunt Saïd Mekbel est mort en martyr ». Il y voit une « tentative de folklorisation, voire de dévoiement du combat d'un homme qui a symbolisé l'engagement pour la liberté et la démocratie ». Et il estime que « toute œuvre visant à rendre hommage au journaliste assassiné n'a pas le droit d'ignorer le contenu de son combat, ni de procéder dans l'approximation ». « Nous ne saurons admettre qu'un symbole aussi fondateur pour la presse libre dans notre pays soit convoqué dans le propos d'un concours dont le thème est galvaudé, la portée réduite et la récompense envisagée trop modique et insignifiante pour ne pas trahir une improvisation et un bricolage qui frisent l'insulte », termine le collectif.