Décembre 1994, les pirates de l'Airbus d'Air France furent ensevelis dans le secret dans les environs de Marignane. Octobre 1995, Khaled Kelkal, le responsable des attentats de l'été de la même année en France, est enterré dans le cimetière Rillieux et non pas rapatrié en Algérie comme le souhaitait sa famille. Mars 2012, Alger refuse l'inhumation en Algérie de Mohamed Merah, auteur présumé de 7 assassinats à Toulouse et Montauban. Si les périodes et les profils ne sont pas comparables, la question de l'inhumation d'éléments impliqués dans des violences reste délicate entre Alger et Paris. Y a-t-il eu négociation entre les deux parties ? «Peut-être pas de négociations directes, des contacts certainement autour de cette affaire si sensible et qui mobilise beaucoup l'affect des deux côtés, surtout en ces périodes de campagnes électorales en Algérie et en France», nous confie une source au fait du dossier. D'autant qu'Alger avait officiellement laissé passer la tempête des commémorations du 19 Mars en France et leurs lots, parfois, de contre-vérités historiques et d'attaques contre l'ALN-FLN, afin de ne pas être emporté par le flot des polémiques des cercles de la Nostalégérie si chères aux politiques français en période de campagne présidentielle. «Officiellement, ce que nous disons aux interlocuteurs français est qu'il s'agit d'une affaire de famille, de funérailles qui doivent se dérouler dans un cadre intime, loin de toute surenchère médiatique ou autre», ajoute notre source. Mardi, le porte-parole des Affaires étrangères, Amar Belani, a déclaré à TSA qu'«il s'agit d'une affaire qui, en principe, w se traiter dans l'intimité de sa famille, loin de toute publicité malsaine et déplacée». Sur place, hier, dans la commune de Souaghi et à Médéa, l'opinion publique n'est pas plus divergente. «Nous espérons que l'enterrement ne soit pas l'occasion pour des médias étrangers de salir l'image de notre pays, car une seule photo d'un téléphone portable circulant sur le web montrant une foule de curieux au cimetière serait interprétée comme un hommage à une victime ou, pire, à un martyr», nous déclare un journaliste de la région. «Mohamed Merah est un problème franco-français, comme c'est le cas pour l'histoire des harkis ou des pieds-noirs qu'on veut nous coller à chaque commémoration en France», commente un cadre de l'Etat. «Zidane est français quand il fait gagner à la France la Coupe du monde, mais Mohamed Merah est algérien parce qu'il a tué des innocents», ajoute-t-il. Et de poursuivre : «Mohamed Merah est un produit de la société française, c'est là-bas qu'il a grandi, c'est là-bas qu'il a fait de la prison, c'est l'armée française qui l'a refusé dans ses rangs, alors qu'ils l'enterrent en France.»