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«L'institution villageoise doit être intégrée dans l'administration du territoire» Mohand Akli Aoudj. Architecte, spécialiste de l'aménagement du territoire
Quel rôle peut jouer le village dans la gestion du territoire de la wilaya de Tizi Ouzou, quand on sait que la majorité de la population locale vit dans les espaces villageois ? Le village a toujours été une entité politique et administrative gouvernée par Tajmait (assemblée du village) qui nomme ses chefs, adopte ses lois et s'administre. L'organisation politique du pays n'a pas pris en compte les formes d'organisations traditionnelles. Le schéma d'administration du territoire est de type centralisé et hiérarchisé, constitué par l'Etat à travers la wilaya et la commune. Le village doit compléter cet édifice institutionnel. On peut constater sur le terrain qu'à chaque fois qu'un village procède au ressourcement de sa djemaâ, modernise son organisation et initie des projets, les villageois adhèrent aux initiatives et les résultats sont souvent spectaculaires. A titre d'exemple, on peut citer les deux villages, Zouvga et Iguersafène, qui ont été lauréats du concours Rabah Aïssat du village le plus propre pour les années 2013 et 2014. On peut citer aussi les villages d'Aggoussim et de Lemsla qui ont eu à organiser respectivement le festival Raconte-Arts et la fête annuelle de la figue. Et les exemples sont nombreux d'initiatives villageoises qui ont eu de grands succès. Mais pour rendre ces initiatives pérennes et durables, il est temps de réfléchir à une nouvelle forme d'organisation qui puisse intégrer l'institution villageoise (thajmaât) dans l'édifice institutionnel. Au lieu de prendre en compte une réalité sociale et culturelle, l'Etat a effacé l'institution villageoise, privant ainsi la collectivité d'un levier de développement pouvant répondre aux attentes des populations. Le village peut très bien recevoir des subventions pour gérer des programmes destinés à la communauté villageoise. Il peut assumer des missions de réalisation, de maintenance et de gestion d'opérations bien définies. L'Etat, en tant qu'administration centralisée, s'occupera de ce qui est commun aux villages, les routes, les réseaux de transport du gaz, d'électricité.. Un texte de loi a été promulgué en 2004 prévoyant un fonds de développement pour la montagne, sans être mis en place à ce jour. En quoi consiste-t-il ? Il s'agit de la loi 04.03 du 23 juin 2004 relative à la protection des zones de montagne dans le cadre du développement durable. Elle a pour objectifs de fixer les prescriptions applicables en matière de protection, d'habilitation et d'aménagement des zones de montagne et de leur développement durable. Le massif montagneux du Djurdjura englobe 111 communes et s'étend sur les wilayas de Boumerdès, Tizi Ouzou, Bouira et Béjaïa. Ce massif abrite une population de plus de 2 millions d'habitants. Il était attendu de l'application de cette loi la mise en place d'un fonds pour le développement des zones de montagnes dénommé «fonds pour la montagne». Les ressources de ce fonds et les modalités de leur affectation sont fixées par la loi de finances. Or, à ma connaissance, ce fonds n'a pas encore été mis en place. Seul le fonds spécial du Sud et des Hauts-Plateaux a été doté de ressources par différentes lois de finances. Enfin, il est important de signaler qu'en vertu de l'article 11 de cette loi, les zones de montagne sont considérées comme zones à promouvoir, par conséquent l'ensemble des communes du massif du Djurdjura auraient pu bénéficier d'allègements fiscaux et parafiscaux.
Le tourisme de montagne revient dans les discours depuis des années. Par quelles voies peut-il être concrètement lancé ? Sur le plan du discours, tout le monde s'accorde à dire que la wilaya de Tizi Ouzou recèle un potentiel touristique extraordinaire. Que n'a-t-on pas dit sur le développement du tourisme balnéaire, du tourisme de montagne, du tourisme solidaire, du tourisme culturel, du tourisme écologique et j'en passe ! Mais dans les faits, on reste effectivement dans les discours. Aucune zone d'expansion et site touristique sur les huit créés par décret dans la wilaya de Tizi Ouzou depuis 1988 n'a été viabilisé ou aménagé. Les quatre zones d'expansion et site touristique (ZEST) proposées au classement ne le sont toujours pas ; elles sont localisées à Yakouren, Azrou N'Thor, Thala Guilef et Tizi Oudjaâboub. Les projets de tourisme solidaire et de tourisme chez l'habitant sont toujours au stade des intentions. Le patrimoine culturel villageois de notre wilaya dépérit et l'environnement se dégrade de plus en plus. L'organisation des états généraux sur le tourisme, à mon avis, est une urgence de l'heure pour passer à des actions concrètes et concertées associant l'ensemble des intervenants. Je pense particulièrement aux villages organisés, qui peuvent insuffler une dynamique au tourisme, et à notre émigration qui peut être mobilisée pour investir dans ce créneau.