«La permanence est toujours assurée par quelques personnes à Sahat Essoumoud. Malheureusement, le mouvement a pris une autre tournure. De nombreuses personnes en profitent pour revendiquer des logements ou du travail, ce qui arrangera certainement les autorités locales qui ne souhaitent plus entendre de la contestation contre le gaz de schiste», avoue un ancien membre du groupe des 22, la locomotive des contestataires à In Salah, composée dans sa majorité de diplômés et d'universitaires de la région. La sortie d'Abdelmalek Sellal en janvier dernier a provoqué une dissidence entre les convaincus par le discours du Premier ministre et les plus radicaux exigeant l'arrêt du projet. Mohammed Gasmi, soudeur, et l'une des têtes de la contestation à Adrar, avoue que la mobilisation est en «mode veille». «Le facteur du temps nous était défavorable. L'Etat voulait nous user pour qu'on lâche l'affaire. Les six mois de la contestation sous la chaleur du Sud étaient difficiles à endurer. Les gens ont fini par ne plus supporter la fatigue, explique-t-il. De plus, le pouvoir a tout fait pour nous diviser. Des rumeurs ont été lancées sur des activistes qui auraient négocié avec lui. Cela a semé le doute et a alimenté la dissidence. Les activistes d'Adrar et de Tamanrasset continuent à se réunir régulièrement. Le prochain défi sera d'agir dans le temps et ne plus se précipiter. Par manque d'expérience, nous avons été dépassés par l'enchaînement des événements.» Mohammed, comme beaucoup d'autres, a repris son travail, mais assure que le mouvement peut reprendre si l'Etat décide de reconduire le projet de l'exploitation du gaz de schiste. Oussama Benhassine, de Aïn M'lila (Oum El Bouaghi), qui a confectionné avec l'aide de son ami Djalal Louze le fameux logo jaune de la protesta contre le gaz de schiste, a lui aussi repris une vie normale. «J'ai été solidaire pour dire que la lutte contre le gaz de schiste était nationale. Maintenant, j'ai repris mon activité de dentiste mais je reste un fervent défenseur de l'environnement», affirme-t-il. Mais un nouveau-né a vu le jour en février dernier après la décision du gel du projet. Le Collectif national pour un moratoire sur les gaz de schiste (CNMGS), regroupant plusieurs collectifs, experts et activistes. Sabrina Rahimi, médecin et porte-parole de ce mouvement, explique les objectifs : «Nous faisons en sorte qu'une série de débats citoyens soient organisés sur diverses thématiques, comme l'avenir énergétique et le développement durable en Algérie. Comme première action, nous avons participé dans une formation sur la question de la citoyenneté organisée par RAJ à Alger. La dernière conférence date du 24 octobre, où nous avons participé à la conférence algérienne sur le climat. Une occasion pour les membres du collectif de parler de la question du gaz de schiste en Algérie.»