La frénétique course à l'armement dans le Maghreb donne de l'eau à la bouche des puissants de ce monde. Vladimir Poutine, président russe, est arrivé hier dans la capitale libyenne, Tripoli, avec les mains chargées de contrats de vente d'armes. Répondant à l'invitation de son homologue Mouammar Kadhafi, le président russe sortant revient sur les traces du président français qui avait proposé en juillet 2007 aux Libyens la vente de 18 Rafale pour un montant de 2,5 milliards d'euros. La visite de Poutine, qui se fixe comme objectif d'élaborer la base juridique de la coopération technico-militaire et nucléaire civile avec la Libye, prouve sans conteste la quête, pour la Russie, de nouveaux partenaires dans la région maghrébine, outre l'Algérie, en vue de renforcer sa présence dans l'espace méditerranéen, à la croisée des marchés africains et européens. Le marché militaire est la porte par laquelle le savoir-faire russe tente de se trouver cette place et se positionner dans une région laissée depuis la chute du bloc soviétique à la seule influence occidentale, notamment américaine. Tentant d'effacer le passage français qui avait lancé les jalons d'un partenariat privilégié avec le guide de la révolution libyenne, la Russie mise sur la vente d'armes et de munitions de la pure production de Rosoboronexport (agence russe d'exportation d'armes). Première visite d'un chef d'Etat russe en Libye dans l'histoire des relations bilatérales, il est attendu qu'elle se solde par un contrat de livraison d'armement russe d'une valeur de 3 milliards de dollars dont l'exportation de 12 chasseurs ultramodernes Su-35 et de missiles sol-air de courte portée Tor-M2E, assortie à la réparation et la vente de pièces de rechange et de munitions pour les armements que la Libye a hérités de l'ancienne URSS. La signature de ce contrat reste toutefois tributaire de la conclusion d'un accord sur la dette de Tripoli d'un montant de 3,5 milliards de dollars et sur laquelle les négociations avaient buté depuis novembre 2007. A l'image du rapprochement des pays de l'Otan, à leur tête les Etats-Unis, des pays de l'ex-bloc soviétique, la Russie semble opérer selon le même procédé en lorgnant des marchés qui font déjà l'objet de convoitise de la part des puissances occidentales. La Libye se présente aujourd'hui, avec sa manne pétrolière, ses perspectives économiques prometteuses et son équipement militaire souffrant de vétusté, comme le marché à ne point rater. Kadhafi n'a pas cessé d'attiser l'appétit des industriels de l'armement en affichant un intérêt pour des achats d'armes à coups de milliards de dollars et en favorisant une diversité de fournisseurs. Sa sortie de l'embargo a fait de la Libye un marché prometteur, notamment sur le plan énergétique. La visite de Poutine compte d'ailleurs dans son agenda la promotion de la coopération dans le domaine du nucléaire civil, mais aussi dans le domaine des hydrocarbures. Gazprom jouit déjà d'un contrat d'exploitation d'un champ pétrolier dont les réserves sont évaluées à 20 millions de tonnes de pétrole. Le géant gazier avait annoncé sa volonté de rentrer en partenariat avec l'italien Eni sur des projets gaziers en Libye, ce qui plaidera pour que Moscou ait la possibilité de renforcer la fourniture énergétique de l'Europe.