La chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, ne mène pas large. Elle a déclaré sa « honte que l'Europe se réveille quand elle est confrontée à des morts ». Elle plaide depuis des mois pour que l'Union européenne « prenne ses responsabilités », tout en appelant de ses vœux la formation d'un gouvernement d'unité nationale en Libye. « Il faut résoudre le problème de la Libye, car tant qu'il ne sera pas résolu, il y aura là un corridor incontrôlé, parfait pour tous ceux qui veulent se livrer au trafic de migrants », a insisté Mme Mogherini. Le temps des responsabilités ? Improbable au regard d'abord des réticences provoquées par le système de quota par pays défendu par le président de la Commission, Jean-Claude Juncker, pour partager le fardeau des réfugiés avec les pays comme l'Italie, la Grèce et Malte. Improbable également au regard de l'hostilité manifestée par certains pays de l'Union européenne au plan d'action de la Commission, notamment pour le volet lié à la destruction des bateaux sur les côtes libyennes. Au cœur de la Méditerranée, le drame des « nouveaux négriers », révélé à l'opinion mondiale par le naufrage qui a fait 800 morts en avril dernier, a décrété l'urgence d'une « réponse globale », solennellement proclamée par les chefs d'Etat et de gouvernement, réunis le 23 avril dernier, et matérialisée, dimanche dernier, par la rencontre des quatre ministres européens de la Défense qui se sont penchés sur les propositions d'un plan d'action présenté, hier, par le chef de la diplomatie européenne au Conseil de sécurité. Le feu vert de l'Onu est incontournable pour constituer la base légale de l'opération militaire. Le projet européen permet effectivement la saisine en haute mer et sur les côtes libyennes, en recourant si besoin à la force. Le lancement de l'opération navale à partir du mois de juin se fera sous commandement italien, avec la participation d'une dizaine de pays dont la France, la Grande-Bretagne et l'Espagne, selon le quotidien The Guardian. L'Otan, non sollicitée, mobilisera une partie des navires de ses membres, affirme son secrétaire général, Jens Stoltenberg. Mais la bataille de l'Onu s'avère délicate pour Mogherini qui aura assurément de la peine à convaincre la Russie, opposée au principe de l'intervention militaire, et la Chine. Le niet catégorique de la Libye a été également prononcé par l'ambassadeur libyen aux Nations unies, Ibrahim Dabbashi, exprimant le refus de « toute opération sur notre territoire ». Car, précisera-t-il dans une interview à l'Associated Press, la gestion de la question des migrants est tributaire de la restauration de l'autorité du gouvernement légitime dans la capitale et en Libye apte à « stopper ce flux d'immigrés illégaux car nous connaissons tous ceux qui sont impliqués ».