L'article 36 de l'avant-projet de révision de la Constitution stipule que « la liberté de conscience et la liberté d'opinion sont inviolables », précisant que « la liberté d'exercice du culte est garantie dans le respect de la loi ». Selon le document, l'islam demeurera la religion de l'Etat, mais la liberté de culte et le respect des croyances religieuses des minorités en Algérie seront particulièrement affirmés. L'article 2 de l'ancienne Constitution stipule que « l'islam est la religion de l'Etat » et que la Constitution algérienne garantit le droit à la liberté de conscience et d'opinion mais ne mentionne pas « la liberté religieuse », ont signalé des juristes, contrairement à l'avant-projet de la Constitution 2016. Des imams interrogés hier sur cette question avaient des avis différents. Certains estiment que cet article est inspiré d'un document établi par le Prophète Mohamed (QSSSL) à Médine, d'autres appellent à la vigilance et au contrôle pour éviter de mettre en conflit ou en danger la société algérienne. Amine El Ansari, imam à la mosquée El Feth à Chéraga et chercheur, a appelé à une réflexion sur la liberté de conscience et de culte, comme établi par les juristes, afin d'éviter toute confusion ou polémique. « En Algérie, notre vision de la religion est large et tolérante. Il faut cependant distinguer entre les formes de religion qui existent en Algérie et que nous n'avons aucun droit d'interdire et les nouveaux courants qui veulent s'y installer. En tant que musulmans, nous applaudissons cette loi car l'islam appelle au respect des autres religions. Le prophète Mohamed était le premier dans le monde à mettre en œuvre une constitution, celle du document qui réglemente les religions lors de son entrée à Médine. Il s'agit de règles destinées aux musulmans et aux juifs résidant à Médine. Le prophète Mohamed a exigé que les droits et libertés des juifs soient respectés. Certes, c'était une constitution idéale et unique mais l'islam est une religion ouverte. Nous vivons avec ces gens même s'ils sont minoritaires mais le respect mutuel doit être de mise », a-t-il souligné. « L'islam respecte les autres religions » Un avis partagé par l'imam Djamel Ghoul, président du conseil national autonome des imams, qui revient sur le document de Médine, mis en œuvre par le Prophète Mohamed (QSSSL). « Certes l'islam respecte les autres religions notamment la liberté de culte mais le Prophète a mis en garde dans sa constitution, contre toute tentative, dérive ou atteinte aux valeurs de l'islam. Nous devons respecter ces minorités mais en revanche, celles-ci doivent respecter notre religion et notamment le Prophète », a-t-il indiqué. Et d'ajouter : « Nous ne tolérons jamais l'utilisation de cette liberté pour tenter l'évangélisation ou la chiisation. Cette liberté ne doit pas être dévoyée et il est du devoir de l'Etat algérien de mettre en place des peines sévères pour tous ceux qui violent la Constitution et les lois », a-t-il soutenu. L'archevêque intérimaire d'Alger, Mgr Paul Desfarges, a souligné que le respect de la liberté du culte en Algérie « est une question très importante » mais il a affirmé qu'il s'exprimera ultérieurement sur l'avant-projet de la Constitution, n'ayant pas encore consulté le contenu. « Je n'ai pas pu m'en procurer une copie », a-t-il précisé dans un appel téléphonique avec Horizons. « C'est une question importante et nous allons voir les nouvelles dispositions en comparaison avec l'ancienne constitution Nous allons nous exprimer après consultation du document », a-t-il assuré. Pour sa part, Mgr Henry Tessier, ancien archevêque d'Alger, a indiqué que « son statut ne lui permet pas de s'exprimer sur cette question ». Il est à rappeler que Mgr Paul Desfarges avait assuré que les chrétiens en Algérie « pratiquent leur religion en toute liberté ». Beaucoup plus rétif à la liberté du culte, Ali Ayya, imam de la Grande Mosquée d'Alger, a estimé que cette liberté peut être utilisée à d'autres fins et cela risquerait d'avoir un impact négatif, voire dangereux, sur la société. « Nous vivons cet exemple en Syrie et au Liban. Le peuple algérien, son armée, sa police sont unis aujourd'hui sous une seule religion qu'est l'islam. Nous craignons que cette liberté crée une nouvelle génération qui sera aux commandes dans l'avenir et va diviser la société. Je pense qu'il faut revenir au Coran car la problématique ne réside pas dans le contenu de la Constitution mais dans son application », a-t-il observé. Et d'ajouter : « Nous restons mobilisés et vigilants face à la tentative de ceux qui veulent imposer la laïcité. » Toutefois, l'imam a tenu à dénoncer toute culture de haine et de violence au nom de l'islam.