Photo : Fouad S. Fraîchement installé comme directeur général à la tête de l'Office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers (ONIL), M. Hafid Djellouli trace dans cet entretien les actions menées en matière d'organisation, de développement, de régulation et de stabilisation du marché national. Il revient sur les missions de l'Office tout en évoquant les perspectives pour le secteur. Peut-on connaître les missions assignées à l'ONIL après la nouvelle orientation inscrit dans le cadre du plan du renouveau agricole et rural ? L'Office a trois missions fondamentales : l'organisation et la régulation du marché national par les mécanismes de soutien du lait de consommation en sachet polyéthylène LPC, à 25 DA/litre, ainsi que le soutien et le développement de la production nationale. Outre sa mission d'organisateur et de régulateur du marché des laits de consommation, l'Office intervient également dans le programme d'appui à la production nationale, à laquelle il est accordé une importance particulière par les pouvoirs publics dans le plan national du renouveau agricole et rural. Il faut noter que l'année 2009 a été caractérisée par deux événements majeurs, à savoir l'installation du comité interprofessionnel du lait, conformément aux dispositions du décret exécutif du 8 juillet 1997, portant création de l'ONIL, et la contractualisation les relations entre l'Office et les principaux opérateurs laitiers (laiteries, coopératives, éleveurs, collecteurs). La filière lait ne peut être réhabilitée et réussir que si ces instruments privilégiés fonctionnent très rapidement, dans le cadre de contrats-programmes par région laitière et par wilaya. Actuellement l'Office est en pleine phase d'évaluation de ses relations conventionnelles avec les principaux acteurs que sont les laiteries, les éleveurs, et les collecteurs, pour une meilleure impulsion de ses missions d'organisation et de régulation du marché laitier. Quand pourra-t-on avoir les résultats de l'évaluation ? A ce titre, il faut noter d'abord la mise en place, il y a juste un mois, de commissions spécialisées du comité interprofessionnel du lait (CIL), dont l'une est consacrée au programme de régulation, portant essentiellement sur la définition d'une critériologie pour l'approvisionnement des laiteries en matières premières laitières et l'autre, au recensement, dans le cadre du dispositif de soutien de l'Etat au programme de production nationale et de collecte de lait cru, de toutes situations et contraintes rencontrées par les différentes professions (éleveurs, collecteurs et laiteries), afin d'améliorer, d'une part, les procédures de paiement des primes de lait, et d'autre part, de proposer des choix opérationnels dans les domaines d'appui à la production qui sont renforcés par des opérations d'assistance technique au bénéfice des éleveurs et ce au travers des conventions de partenariat avec des instituts et organismes spécialisés, notamment l'ITGC, pour les cultures fourragères, le CNIAG, pour l'insémination artificielle, l'ITELV, pour l'amélioration des rendements par vache laitière et l'ONAB, pour les aliments composés. Quelles sont les missions de ces commissions ? Ces commissions spécialisées sont appelées à soumettre les conclusions de leurs travaux au comité du directeur pour examen et débat en séance plénière du CIL en vue de leur validation. Il est donc important de souligner que ce comité interprofessionnel du lait, pourvu d'un rôle consultatif, est composé de 52 membres qui représentent les principales franges de la profession laitière, ainsi que des ministères (Finances, Commerce, Intérieur et Collectivités locales), des institutions (BADR, CNMA, Chambre d'agriculture) et des instituts techniques, pour ne citer que ceux-là. Notre objectif majeur est de promouvoir les investissements inhérents à la réhabilitation de la filière lait et de favoriser, à moyen terme, l'émergence de coopératives laitières sur l'ensemble des wilayas, dans le cadre de contrats-programmes entre les différentes parties dont les directions des services agricoles de wilaya. Le comité interprofessionnel est ainsi doté de missions précises pour fédérer toutes les professions de la filière lait. Y a-t-il un plan d'action spécifique pour cette nouvelle année ? Les objectifs et le plan d'action de l'ONIL pour l'exercice 2010 s'inscrivent pleinement dans le contrat de performance qui le lie à sa tutelle. Donc, ces objectifs et plan d'action porteront sur de meilleurs résultats par rapport à l'exercice 2009, à savoir une nette amélioration du taux d'intégration de la production nationale de lait cru dans les laits de consommation. Notre marge de progression est importante au vu du résultat de collecte enregistré pour l'exercice 2009 qui a été de 380 millions de litres de lait cru, alors que le potentiel de la production nationale annuelle est estimé à plus de deux milliards de litres de lait cru, soit 18%, pour un effectif bovin évalué à 900.000 vaches laitières, toutes races confondues. Notre challenge est de faire adhérer l'ensemble des opérateurs (éleveurs, collecteurs, laiteries) dans le programme de collecte de la production nationale qui contient des mesures incitatives non négligeables, au travers des primes à la production (12 DA/litre), à la collecte (5 DA/litre) et d'intégration industrielle (4 DA/litre). Notre action est de parvenir à des résultats de rentabilité probante de l'exploitation laitière, de faciliter et d'organiser les circuits de collecte, de promouvoir des investissements pour la densification des centres de groupage et de collecte et de mise à niveau des infrastructures laitières et de s'inscrire dans le cadre du développement durable, tel qu'énoncé dans le plan national du renouveau agricole et rural, dans le but de récupérer les flux de lait cru dans le marché informel. C'est une action de sensibilisation et de professionnalisation de la filière lait qui vise à rationnaliser économiquement le marché laitier national et à assurer une meilleure sécurité sanitaire de nos produits alimentaires dans l'intérêt de la santé publique de nos populations. Face à l'informel, y a-t-il des dispositifs pour assurer la traçabilité de la production et surtout de la collecte du lait ? Bien évidemment. Les dispositifs mis en place, ce sont les éléments dont j'ai évoqués précédemment, notamment l'installation du comité interprofessionnel. Notre plan d'action est de densifier les centres de collecte et de groupage à travers les laiteries qui constituent un centre moteur et fédérateur. Il faut retrouver l'esprit de coopérative que nous avons perdu et ce à travers les laiteries. Actuellement, nous sommes en phase de reconstruction et de réhabilitation. Les laiteries sont le catalyseur de ce programme de production. Elles existent mais il faut qu'elles investissent davantage et lancer un programme de mise à niveau. L'Etat intervient, de son coté, non seulement pour soutenir le prix du lait mais pour l'introduction de mesures incitatives au profit des éleveurs, collecteurs et industriels. C'est clair que cela n'est pas suffisant. Mais il existe d'autres mesures d'accompagnement tels le programme de mise à niveau, le crédit Rfig sans intérêt, les aides de la CNMA et autres. Il y a donc des batteries d'accompagnement. Ceci va permettre une meilleure organisation de l'activité laitière. Comment l'ONIL intervient-il pour atteindre les objectifs tracés par les pouvoirs publics qui sont d'un côté l'autosuffisance et de l'autre la réduction de la facture d'importation ? Ce qu'il faudrait retenir c'est que la nouveauté réside dans le fait que l'ONIL est lié par un contrat de performance avec le ministère de l'Agriculture pour que notre programme ait une signification particulière. Ce contrat de performance s'étale sur une période allant de 2009 à 2014. Il est question d'augmenter chaque année de 20% à 30% d'intégration de la production nationale. Notre ambition est d'augmenter également la part de la collecte. Nous envisageons de la porter à 600 millions en 2010. Ce qui va engendrer en parallèle une réduction de l'importation. Et c'est là où réside la rationalité. Nous veillons aussi à ce que cette part soit proportionnelle. Si nous augmentons de 30% par exemple la production, nous devons réduire de 30% l'importation. Nous pensons qu'avec les mesures incitatives qui ont un coût évalué à des milliards de centimes, qu'engage l'Etat au bénéfice des intervenants, tout le monde sera impliqué dans ce processus. Ce n'est certes pas suffisant mais il y a lieu de confirmer que le comité interprofessionnel mis en place est en train de faire l'évaluation des conventions qui lient l'Office aux différents acteurs de la filière et dans deux mois nous aurons les résultats des travaux des commissions. Nous sommes en phase d'intensifier les fonctions et les mesures d'urgence pour justement inciter les opérateurs à investir plus et surtout faire un effort sur le plan qualitatif. Il y a un travail qui se fait également pour le renforcement de la fonction contrôle. La CIPA a, à maintes reprises, déploré le fait qu'il n'y ait pas d'équité en matière de distribution de la poudre du lait. Qu'en est-il exactement ? Dans toute discipline, il faudrait converger sur des intérêts communs. La CIPA est un organe qui fait partie du comité interprofessionnel. Nous sommes en train d'évaluer ensemble de nouveaux critères pour la distribution de la poudre de lait. La CIPA s'intègre dans notre programme de production. Son souci est d'avoir une coordination avec l'Office. Le plus important est que, une fois les travaux des commissions terminés, nous procéderons à la distribution de la poudre de lait dans la transparence totale. Nous ne voulons pas que les affectations soient entachées par des interprétations subjectives. Nous sommes prêts à accompagner la CIPA d'autant plus qu'elle regroupe la majorité des laiteries. Notre objectif également c'est la reproduction du cheptel, en développant les génisses locales. Nous œuvrons à bien encadrer la profession et l'augmentation de la production moderne. Notre politique est de privilégier l'exploitation du cheptel bovin et la constitution d'une banque de données.