Les billets étaient presque parfaits l La monnaie contrefaite transiterait par la Tunisie l Après celle révélée lundi par les services de police français concernant le démembrement à Lyon, d'un important gang de faussaires de monnaie algérienne, voilà qu'une autre affaire, distincte, vient, à nouveau, d'être mise au jour par les enquêteurs au niveau de la ville de Marseille où trois personnes viennent d'être arrêtées et mises en examen pour association de malfaiteurs «pour contrefaçon de dinars algériens». Trois personnes ont été mises en examen, hier, dans la ville portuaire française de Marseille pour association de malfaiteurs en vue de contrefaçon de dinars algériens, a-t-on appris de source judiciaire. Il s'agit d'un démantèlement d'un réseau de fabricants de faux dinars distinct de celui récemment démantelé à Lyon, selon la même source. Le juge et le parquet ont requis un mandat de dépôt contre ces suspects qui devaient passer dans la soirée devant le juge des libertés et de la détention. L'un d'eux a de solides amitiés dans le banditisme mais les deux autres sont inconnus des services de police, selon une source proche de l'enquête. Douze autres personnes, interpellées la semaine dernière à Paris et à Marseille notamment après plusieurs mois d'investigations, avaient déjà été mises en examen et écrouées dimanche à Lyon dans le cadre d'un dossier distinct de faux monnayeurs de dinars. Comme dans le dossier lyonnais, l'affaire marseillaise a démarré avec le braquage à Marseille, en novembre 2006, d'un camion transportant des rouleaux de papier fiduciaire destinés à la Banque centrale d'Algérie et qui ont servi à la fabrication de faux dinars. Une première personne, suspectée d'avoir recelé le poids lourd dans un hangar de la région, avait été écrouée dans ce dossier en 2007 par la juge avant d'être remise en liberté. Dans un second temps, le TGI d'Aix-en-Provence avait été saisi après l'arrestation de deux Tunisiens porteurs d'une valise pleine de faux dinars à l'aéroport de Marignane, proche de Marseille ce qui laisserait supposer que la monnaie contrefaite transitait par la Tunisie avant de gagner vraisemblablement l'Algérie. L'affaire avait franchi un dernier pas avec la découverte de certains rouleaux marseillais en janvier 2009 dans une imprimerie clandestine du Sud de l'Italie. Les billets quasiment parfaits l «Si les malfaiteurs avaient décidé de fabriquer des billets de 1 000 DA, le plus répandu en Algérie, c'est parce qu'ils avaient ce papier à leur disposition : si cela avait été du papier destiné à la banque centrale turque, ils auraient fabriqué de l'argent turc», a-t-il été précisé de source policière. Le papier fiduciaire volé comportait en effet les trois signes de sécurité, (bande holographique, filigrane et fil), nécessaires à la fabrication des dinars algériens, (alors que l'euro en compte soixante), ce qui a facilité la tâche des faussaires. «Il ne restait plus aux faussaires qu'à ajouter le visage et le montant, ainsi que les numéros du billet», a indiqué le responsable de la police judiciaire de Lyon. L'enquête a aussi révélé que l'étape de la «numérotation» était réalisée à Saint-Etienne par un informaticien qui avait pour cela mis au point un logiciel spécifique. «Les billets étaient quasiment parfaits», a-t-il ajouté. Selon un criminologue, «l'Afrique est devenue l'eldorado des faussaires» en raison de ses monnaies qui sont nettement moins protégées que le dollar, l'euro, le franc suisse ou la livre sterling. Gang neutralisé «avant une production de masse» Faussaires n De nouvelles précisions ont été données, hier, lundi, par la police française sur ce qui est considéré comme l'une des plus importantes affaires de contrefaçon de monnaie mise au jour dans l'Hexagone au cours de ces dix dernières années. On en sait aujourd'hui un peu plus sur la première affaire du gang des faussaires à Lyon, constituant le premier démantèlement d'une imprimerie clandestine en France depuis plus de dix ans, et à la suite de laquelle ces derniers étaient parvenus à imprimer des billets de faux dinars algériens «quasiment parfaits» grâce à du papier fiduciaire volé. Pour le responsable de la division économique et financière de la police judiciaire de Lyon, «la spécificité de cette affaire vient du fait que le papier utilisé était destiné aux banques centrales». Il provenait d'une cargaison d'une quarantaine de rouleaux destinés à la Banque centrale d'Algérie, qui ont été subtilisés lors d'une attaque à main armée à Marseille en novembre 2006, a-t-il précisé, hier, lundi, lors d'une conférence de presse. Deux à trois de ces rouleaux, permettant chacun de fabriquer jusqu'à 500 000 billets, avaient été retrouvés à Naples, en Italie, en janvier 2009. Les enquêteurs, qui avaient assisté en septembre dans le Vaucluse à la remise de trois de ces rouleaux par des voyous marseillais au réseau lyonnais, n'en ont retrouvé que deux intacts, le troisième étant en cours d'utilisation. Selon la PJ, les faux-monnayeurs avaient déjà réussi à écouler au moins 200 000 faux billets. «L'essentiel du réseau a été neutralisé» avant qu'une «production de masse» n'ait pu se mettre en place, a précisé le directeur-adjoint de la PJ, Michel Neyret, ajoutant que les billets, d'une valeur de 10 euros, étaient revendus 3 à 4 euros chacun. Les douze faussaires constituant le réseau lyonnais, interpellés mercredi à Paris, Marseille, Montélimar (Drôme) et Saint-Genis-Laval (Rhône) après quelques mois d'investigations, ont été mis en examen et écroués dimanche pour association de malfaiteurs et contrefaçon. Les hommes, âgés de 30 à 60 ans et dont certains étaient connus pour des faits de grand banditisme, encourent trente ans de réclusion criminelle. Deux frères, imprimeurs dans le centre de Lyon, constituaient «le maillon essentiel du réseau» : des milliers de billets ont été saisis dans leur entreprise. Du silence des autorités algériennes l 48 heures après la mise au jour officielle de deux affaires distinctes de trafiquants de fausse monnaie algérienne par la police française, dont on imagine sans peine qu'elle a très certainement de fortes ramifications dans le pays, on ne peut manquer de s'interroger sur le silence observé par les autorités algériennes, notamment le ministère des Finances. Le directeur de la police judiciaire de Lyon, M. Claude Catto y a d'ailleurs fait allusion en déclarant qu'en France : «On attend que l'Etat algérien se manifeste d'une manière ou d'une autre.» De multiples questions qui cachent mal l'anxiété du citoyen sont posées çà et là et restent sans réponse pour l'heure. Notre dinar peut-il être ainsi aussi facilement contrefait ? Doit-on s'attendre encore à d'autres découvertes d'imprimeries ? Quelle est l'ampleur de ce trafic et quel est le préjudice subi par l'économie nationale ?