Résumé de la 17e partie n Les chasseurs, voyant qu'il fallait tuer ma mère pour m'avoir, lui lancèrent une grêle de javelots… J'étais déjà fort, j'aurais pu démolir cette cave avec mes pieds de devant et me frayer un sentier, comme ma mère m'avait enseigné à le faire dans les versants rapides. Je fus longtemps sans m'en aviser. Sans connaître la mort, je haïssais l'existence et ne songeais pas à la conserver. Enfin, je cédai à l'instinct et je jetai des cris farouches. On m'apporta aussitôt des cannes à sucre et de l'eau. Je vis des têtes inquiètes se pencher sur les bords du silo où j'étais enseveli. On parut se réjouir de me voir manger et boire ; mais, dès que j'eus repris des forces, j'entrai en fureur et je remplis la terre et le ciel des éclats retentissants de ma voix. Alors, on s'éloigna, me laissant démolir la berge verticale de ma prison, et je me crus en liberté ; mais j'étais dans un parc formé de tiges de bambous monstrueux, reliés les uns aux autres par des lianes si bien serrées que je ne pus en ébranler un seul. Je passai encore plusieurs jours à essayer obstinément ce vain travail, auquel résistait le perfide et savant travail de l'homme. On m'apportait mes aliments et on me parlait avec douceur. Je n'écoutais rien, je voulais fondre sur mes adversaires, je frappais de mon front avec un bruit affreux les murailles de ma prison sans pouvoir les ébranler ; mais, quand j'étais seul, je mangeais. La loi impérieuse de la vie l'emportait sur mon désespoir, et, le sommeil domptant mes forces, je dormais sur les herbes fraîches dont on avait jonché ma cage. Enfin, un jour, un petit homme noir, vêtu seulement d'un sarong ou caleçon blanc, entra seul et résolument dans ma prison en portant une auge de farine de riz salé et mélangé à un corps huileux. Il me la présenta à genoux en me disant d'une voix douce des paroles où je distinguai je ne sais quelle intention affectueuse et caressante. Je le laissai me supplier jusqu'au moment où, vaincu par ses prières, je mangeai devant lui. Pendant que je savourais ce mets rafraîchissant, il m'éventait avec une feuille de palmier et me chantait quelque chose de triste que j'écoutais avec étonnement. Il revint un peu plus tard et me joua sur une petite flûte de roseau je ne sais quel air plaintif qui me fit comprendre la pitié que je lui inspirais. je le laissai baiser mon front et mes oreilles. Peu à peu, je lui permis de me laver, de me débarrasser des épines qui me gênaient et de s'asseoir entre mes jambes. A suivre