Moumene Belghoul La performance a été tellement explosive que l'on refuse presque de s'étaler sur le prochain match. Comme pour faire durer une ivresse insoupçonnée. Refuser de descendre du nuage. Mais la Coupe du Monde continue. Il faudrait bien continuer cette grande aventure qui fera incontestablement date. Les rues de Curitiba et de Porto Alegre sont devenues des lieux légendaires pour les Algériens, que la barrière de la langue n'a pas rebutés pour se fondre parmi un peuple chaleureux. Le drapeau national aura flotté partout, affiché sur les grands panneaux, les télés et dans les pages des journaux. Les Brésiliens ont pris en sympathie cette séléçao venue d'Afrique du Nord qui développe un jeu comme ils l'aiment. Il est fréquent de rencontrer des Brésiliens arborant le maillot des Verts et scandant «viva Argelia !». Des Brésiliens souriant qui s'écrient «one, two, three» dès qu'ils aperçoivent une écharpe aux couleurs vert blanc rouge. Finalement le Brésil aura réussi à l'Algérie. Il a fallu jouer un Mondial dans cette généreuse terre du football et de la samba pour pouvoir goûter au bonheur incommensurable de faire partie des meilleurs. De ne pas se limiter au frustrant «un petit tour et puis s'en vont». Et pourtant le prochain match n'est pas avec n'importe quel adversaire. Une vielle connaissance. Qui date de plus de trente ans. L'Allemagne, l'une des plus grandes puissances footballistiques au niveau mondial. Le 16 juin au stade El molinon, à Gijon, l'Algérie, alors petit poucet dans cette compétition prisée, administre une leçon de réalisme aux vedettes de la Manchaft de l'époque médusées par tant d'audace et de dextérité technique de la sélection algérienne. Mais lors de ce premier tour du Mondial ibérique il est un fait inoubliable. Un acte d'anti jeu qui fera date et obligera la Fifa à revoir les horaires des ultimes rencontres de poules. Malgré les excuses de certains acteurs de l'époque, les annales du football retiendront que c'est cette même Allemagne qui a combiné avec sa voisine l'Autriche pour empêcher la généreuse équipe algérienne de 82 d'avoir son droit, c'est-à-dire passer au second tour avec six points. Mais à part l'anecdote historique de ce face-à-face Algérie-Allemagne, devenue une référence récurrente, durant ces trente ans quel aura été l'apport des deux nations en matière de football ? La comparaison paraît tellement malvenue tant l'Allemagne reste pour les Algériens l'exemple à suivre en matière de discipline et de travail. Heureusement, la magie de la Coupe du Monde donne cette possibilité à chacun de «se battre» avec ses propres armes. Et souvent le cœur est autant déterminant que la science. Les échos de bonne ambiance provenant du camp de base de Soracaba après cette qualification historique sont de bons augures. Le bonheur est grand et la fierté au top. Une sensation de mission accomplie et le sentiment de bénéficier d'un bonus pour se faire plaisir. Le groupe de Halilhodzic jouera effectivement libéré face à un adversaire dont l'ambition affichée est de remporter le trophée. Et en football c'est un luxe non négligeable. M. B.