De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi «Les goûts et les couleurs…» C'est l'éternelle formule qui surgit et dissimule les failles et les incompatibilités architecturales. En milieu urbain ou rural, intra ou extra-muros, les bons plans de réalisation font cruellement défaut. Peu d'esthétique se dégage du tissu urbanistique… Et les esquisses vouées à la culture, art et loisirs, quand bien même réduites, ne font pas exception. A cela vient s'ajouter la problématique du relief. Ce sont là les deux «alibis» qui perdurent et font perdre à la cité millénaire son cachet. A vrai dire, la disparité dans le tissu urbain constantinois renvoie un cliché lugubre heureusement enjolivé par les reliefs et monuments offerts par la nature. La capitale de l'Est qui totalise deux centres culturels, un musée, un palais et une vieille ville cherche la solution idoine pour les harmoniser. Mais une fausse note surgit… La réalisation de l'Ecole des Beaux-Arts et de la bibliothèque régionale à proximité d'un rond-point à la sortie de Constantine sur la nationale menant à la commune d'Aïn Smara témoigne du goût, des plans et de la place accordés aux infrastructures culturelles dans cette wilaya. «Le projet a été déjà lancé et apprécié il y a quelques années. On ne peut pas faire marche arrière», confie un gestionnaire local. Une réponse qui s'apparente à un aveu d'échec en termes d'harmonisation qu'on ne veut pas assumer. Ce qui montre, une fois encore, que les nouveaux projets culturels ne prennent pas toujours en compte le cachet architectural de l'ensemble urbain lequel ils sont intégrés, encore moins quand leurs concepteurs essayent de leur donner ces touches «modernes» en totale désharmonie avec l'environnement.Pourtant, les bureaux d'études et de réalisation se sont multipliés ces dernières années à Constantine et ils prennent en chargent et chapeautent les multiples réalisations dans tous les domaines urbains. Sauf les restaurations sensibles, évidemment, ayant lien avec le patrimoine. Dans ce contexte, on citera la grande opération d'envergure engagée dans la cité millénaire se rapportant à la réhabilitation du palais Ahmed Bey transformé récemment en musée des arts populaires. Presque un quart de siècle a été consommé pour maintenir debout le Palais du Bey. Cette latence générée par l'absence de véritables spécialistes versés dans le domaine de la restauration des monuments historiques a été pour beaucoup dans le retard accumulé. Il aura fallu restaurer avec les moyens du bord, et donc avancer doucement afin de ne pas perdre les repères historiques. C'est les spécialistes restaurateurs ayant pris le chantier qui l'ont attesté à maintes fois tout en réitérant qu'une opération de la sorte n'en finit pas. Au contraire, elle s'étalera sur plusieurs années. Le même sort est réservé à la vieille ville qui tarde à voir tous ses espaces réhabilités. «C'est un bureau d'études espagnol qui se chargera de la médina. Il permettra par la même occasion à des amateurs locaux de suivre de près, sur chantier, les phases de l'opération de restauration», apprend- on d'un responsable délégué. Actuellement, seuls quelques travaux d'urgence ont été réalisés par un bureau d'études algérien pour garder intact ce qui reste du contour périphérique en attendant l'élargissement des travaux à l'intérieur de la vieille ville. Il est compréhensible que le Palais et la médina relèvent d'un patrimoine complexe et compliqué à la fois qui requière une main habile qui ne devrait pas effacer tout sur son passage. Mais cela n'est pas le cas pour des petits travaux d'aménagement. Lorsque l'on sait que l'initiative et la créativité viennent à manquer pour dépoussiérer, voire remplacer les anciennes fresques par de nouvelles épures alors que la wilaya dispose d'une Ecole des Beaux-Arts et d'artistes. Les responsables devraient faire participer les «potentialités» versées dans le domaine de l'art et ses composantes en vue de réaliser des chantiers adaptés qui n'enlaidissent pas le panorama. Combien de fois n'a-t-on assisté à des échanges en tout domaine et combien de fois n'est-on sorti groggy avec des directives et orientations prometteuses qui, finalement, n'auront aucune suite sur le terrain. Les pouvoirs publics sont préoccupés par des opérations plus nécessaires (logements, établissements scolaires, hôpitaux,…) soit un amoncellement qui a été hérité depuis des années.Pourtant, la culture détient la part du lion en matière de prise en charge infrastructurelle. On continue de bricoler et de cumuler des matériaux sans assortiment. Et lorsque les interrogations fusent sur les tables des décideurs, la réponse est toute sèche : «Nous œuvrons avec les bureaux d'études retenus pour tel ou tel projet en respect des lois des marchés.» Toutefois, cette échappatoire trouve peu de crédit auprès de la société civile, pour peu qu'elle manifeste son intérêt pour les infrastructures culturelles, ou encore des professionnels qui estiment qu'«il y a anguille sous roche en matière d'attributions de marchés». Soit deux sons différents qui devraient être canalisés pour attribuer la réfection et/ou la réalisation des dessins culturels à des potentialités, dont le catalogue est étoffé de belles formes, et dans le fond, architecturales sauvegardant outre les fondations d'une telle bâtisse mais veiller à son identité.