Trois mois après sa prise de fonction à la tête des Fennecs, Vahid Halilhodzic présente le nouveau projet du football algérien, ambitieux mais complexe. Un défi comme il les aime. Trois mois après votre arrivée à la tête de la sélection algérienne, pouvez-vous faire le point sur votre situation ? Je suis rentré en France à la fin du mois de septembre, après un mois passé en Algérie durant lequel on a disputé un match contre la Tanzanie (1-1). On a commencé à travailler, mais on a besoin de temps pour redresser la sélection et la mettre au niveau que mérite ce pays. En Algérie, le football tient une place énorme. La tâche s'annonce difficile et très compliquée. Mais bon, on en a réussi d'autres. Pourquoi vous lancez-vous toujours dans des défis «compliqués» ? Je ne sais pas, je crois bien que c'est mon destin. J'ai eu quelques discussions très sérieuses avec des clubs de Ligue 1, mais cela ne s'est pas fait. Je cherchais plutôt un club qui joue les premiers rôles ou la Ligue des champions, et ce n'était pas le cas. Et puis est venue la possibilité de travailler avec la sélection algérienne qui m'avait déjà contacté auparavant. J'ai accepté la proposition en connaissant l'ampleur de la tâche. Pourquoi ? Parce qu'en Algérie, il y a tout pour réussir. Ça ne sera pas pour demain, c'est impossible. Mais il faudra qu'à terme, les résultats de la sélection soient dignes du peuple algérien qui adore ce sport. Quelles sont les forces et lesfaiblesses de la sélection ? D'abord, un simple constat : il n'y a pas un seul joueur algérien dans un grand club européen. Cela montre bien que quelque chose ne va pas. Le travail s'annonce long, mais je sais qu'il y a du talent ici. Seulement, il faut qu'il s'exprime et montre ses possibilités avec l'équipe algérienne. Pour cela, je fais beaucoup d'études, d'analyses, etc. Cela signifie-t-il que vous vous investissez sur le long terme ? Oui, c'est d'ailleurs ce que le président de la fédération m'a demandé. Pour la première fois dans l'histoire du football algérien, les deux premières divisions sont composées uniquement de clubs professionnels. On leur a également imposé de s'équiper d'un centre de formation, ce qui n'était pas le cas avant. Les conditions de travail sont bonnes car tout le monde y met les moyens, y compris les politiques. La sélection sera bientôt dotée d'un centre technique national performant, on va aussi monter une équipe A' avec des joueurs locaux, une équipe olympique... C'est un projet qui s'inscrit à tous les niveaux et qui est réellement passionnant. Et à court terme, que visez-vous avec l'équipe A ? Pour la CAN 2012, c'est déjà fini même s'il reste un match à disputer contre la Centrafrique. Donc, nous visons la qualification pour la CAN 2013 et également pour la Coupe du monde 2014. On évoque souvent des problèmes de discipline avec les équipes africaines, qu'en est-il avec l'Algérie ? C'est vrai qu'il manque souvent de discipline, de rigueur dans l'approche du travail. Mais il y a surtout beaucoup de talent, les équipes progressent au niveau individuel et collectif. Aujourd'hui, les équipes africaines sont beaucoup plus cohérentes et compétentes. Le Ghana l'a prouvé durant le dernier Mondial et d'autres vont suivre. En cela, l'Algérie a raté le premier wagon, mais on va tout faire pour le rattraper et même prendre de l'avance. Cinq joueurs sur les vingt-trois retenus jouent à l'étranger, vous êtes-vous fixé une ligne de conduite particulière ? Non, je regarde un peu partout pour faire mes listes. Jusqu'à décembre, à chaque stage, j'ai décidé de faire venir le plus grand nombre de joueurs. Je prospecte partout. Mais pour avoir une idée des joueurs qui joueront les qualifications pour la CAN 2013 et le Mondial, il faudra attendre janvier prochain. Vous êtes-vous entouré de gens que vous connaissiez déjà ? Oui, je travaille avec le préparateur physique Cyril Lemoine (ex-PSG) et également Nourredine Kourichi, qui reste en France et s'occupe de superviser les joueurs qui évoluent dans l'Hexagone et également dans toute l'Europe. Il faut aller à droite et à gauche pour voir tout le monde. Et vous, voyagez-vous toujours autant ? Moi aussi je bouge beaucoup, c'est vrai. Pas question de rester dans mon bureau à regarder les matchs à la télé. Le contact, c'est la meilleure des choses. Il y a deux ou trois continents à superviser, ce n'est pas rien. Lorsque j'étais sélectionneur de la Côte d'Ivoire, j'ai parcouru 65 000 km en deux ans ! Je ne peux pas faire autrement. Et puis, il faut savoir s'organiser si on veut récupérer les bonnes infos.