Le retrait de R�dha Malek de la sc�ne politique apr�s celui de Taleb Ibrahimi il y a de cela quelque temps, renseigne sur les difficult�s que rencontre l'opposition face au verrouillage du champ politique et m�diatique national. Il renseigne �galement sur l�incapacit� du syst�me � organiser la transition d�mocratique. La d�mission de ce g�ant de l'histoire contemporaine alg�rienne de son poste de pr�sident de l'ANR intervient dans un contexte particulier, � trois mois de l'�lection pr�sidentielle. L�on est en droit de s�interroger sur les �ventuelles pressions de certains cercles du pouvoir pour faire fl�chir la ligne de l�ANR et l�amener � soutenir un troisi�me mandat pr�sidentiel. Les inqui�tudes et les questionnements sur le devenir du pluralisme et de la d�mocratie gagnent de plus en plus de larges pans de la soci�t�. Le silence de certaines personnalit�s politiques nationales, la condamnation par d'autres de l'atteinte � l'alternance au pouvoir, le gel des activit�s du RCD, l'agitation des formations politiques acquises au syst�me, l'offre de service faite par certains partis pour servir d'alibi d�mocratique, le mutisme du pr�sident quant � son �ventuelle candidature pour un troisi�me mandat, ajoutent � l'opacit� ambiante et accroissent la d�saffection des citoyens vis-�-vis de la chose politique. R�dha Malek, dont l'engagement pour la cause nationale et pour l'�dification d'un Etat r�publicain d�mocratique et social moderne est connu par tous les Alg�riens, marque solennellement ses distances par rapport aux pratiques anti-d�mocratiques du pouvoir en prenant � t�moin l'opinion publique nationale. Dans sa d�claration � la presse, il met l'accent sur les craintes qui l'habitent en soulignant : �... J'ai pris cette d�cision partageant en cela la crainte de certains de nos membres fondateurs les plus respect�s que la crise actuelle du multipartisme et, plus profond�ment celle du militantisme en g�n�ral, ne d�value compl�tement la pratique partisane et ne la r�duise � un simple alibi du pluralisme politique�. En homme politique avis�, il ne s'arr�te pas seulement � ce constat, au demeurant partag� par la majorit� de l'opposition d�mocratique, pour appeler de tous ses v�ux � une radicalisation de la base militante de l'ANR. �Face � la gravit� de l'enjeu, il appartiendra � nos militants d'y r�fl�chir et d'en tirer toutes les cons�quences. A moins qu'ils n'optent pour une initiative plus radicale, celle de la rupture avec les moules pr��tablis pour forger de leur propre cru une dynamique nouvelle o� ils puissent red�couvrir les vertus exaltantes du militantisme tout autant que la justesse des id�aux de l'ANR... On devinera, certes, dans un contexte peu propice � l'innovation et � la cr�ativit�, � quelles difficult�s s'exposerait pareille perspective. Mais l'�mergence d'une rel�ve digne de ce nom est � ce prix... Et de relever ce d�fi, ne serait-ce pas, au fond, le meilleur hommage qu'on puisse rendre � l'esprit de l'ANR et � sa filiation r�volutionnaire du premier Novembre 1954.� M�me si ce dernier passage de la d�claration peut s'apparenter � un testament politique, il n'en exprime pas moins la volont� farouche de son auteur d'aider aux conditions qui permettent � la jeunesse de relever les d�fis qui interpellent notre pays tout en s'inspirant des principes de Novembre 1954. Ce cri du militant qu�il est, n�est-il pas un aveu d��chec de sa g�n�ration � ouvrir de nouveaux horizons politiques et d'esp�rances � cette m�me jeunesse ? En r�ponse, le bureau national de l'ANR s'est r�uni pour examiner les cons�quences sur leur mouvement induites par la d�cision de R�dha Malek. Tout en rendant un hommage appuy� � leur d�sormais ex-leader, ils affichent clairement leur volont� de continuer l'�uvre de ce dernier, et dans le m�me temps, ils adoptent un discours ferme et tranch� : �L'ANR tient � saluer l'action de celui qui aura su incarner l'alternative r�publicaine et d�mocratique et � rendre hommage � ce parangon d'engagement, de droiture et de probit�. Et qu'il soit rassur�, l'ANR ne changera pas, elle ne reniera pas ses id�aux, elle ne renoncera pas � ses principes, elle ne d�viera pas de sa pratique, elle ne c�dera pas aux sir�nes de l'unanimisme d'aujourd'hui, elle ne d�viera pas, elle ne pliera pas.� Il faut rappeler que R�dha Malek n'a pas �t� seul � cr�er l'ANR. Lui-m�me et ses compagnons consid�rent que l'avenir d'un mouvement politique ne peut reposer sur un seul homme. La cr�ation de l'Alliance r�publicaine est �galement le fruit de l'engagement des intellectuels, des journalistes, des artistes et hommes de culture aux c�t�s de militants de la cause nationale tels que Lachref, Haroun, Mazouzi, Salim Sa�di et d'autres. Ces hommes, de par leur itin�raire militant respectif, en cr�ant leur mouvement, se sont inspir�s dans leur d�claration des principes de Novembre 1954 en affirmant leur attachement au caract�re r�publicain de l'Etat et le rejet de toute nature th�ocratique de celui ci. Ces hommes sont connus pour ne pas marchander sur les principes qui les animent. Cet engagement ressort clairement dans le communiqu� de leur bureau national : �Si le verrouillage actuel du champ politique met en difficult� les formations du p�le d�mocratique, il ne peut �tre d�finitif, les forces de progr�s r�solument tourn�es vers l'avenir, doivent r�fl�chir, s'organiser, se concerter et se pr�parer, s'engager � poursuivre le combat jusqu'� l'instauration d'une d�mocratie � la hauteur des attentes citoyennes.� Dans cet esprit, un compagnon de R�dha Malek, militant engag� de la lib�ration nationale et de l'�mancipation sociale, a d�clar� : �La situation que traverse le pays aujourd'hui nous interpelle pour �uvrer � l'union de toutes les forces patriotiques et d�mocratique, seule issue pour sortir le pays de l'impasse o� il se trouve.� R�dha Malek, � travers sa d�claration de d�mission, r�it�re son attachement aux principes de Novembre 1954 et r�affirme le parcours exceptionnel du militant de la cause nationale. Membre fondateur de l'UGEMA en 1956 (avec Taleb Ibrahimi, Bela�d Abdeslem, A�achi Yaker, Lamin Khan, Ch�rif Belkacem ...), n�gociateur des accords d'Evian et porte-parole de la d�l�gation du FLN charg�e de ces m�mes n�gociations, en fin diplomate, il occupa plusieurs postes d'ambassadeur dans les plus grandes capitales du monde (Moscou, Paris, Washington). En 1977, Boumediene le d�signa � la t�te du minist�re de l'Information et de la Culture. Dans ce secteur, et malgr� les contraintes du parti unique, il s'entoura d'une �quipe de cadres comp�tents et d'illustres artistes et hommes de culture (Alloula, Boudjedra, Kheda, Taleb Abderahim...). Il permit la lib�ration de l'expression culturelle et mit en �uvre d'ambitieux plans de d�veloppement des infrastructures culturelles et de l'information sans lesquelles le pluralisme m�diatique ne peut �tre possible, notamment dans la presse �crite durant les ann�es 1990. Les �v�nements s'acc�l�r�rent, l'Alg�rie vasouilla sous les coups de boutoir de l'int�grisme il rejoignit le HCE puis devint chef de gouvernement et assuma avec un courage exceptionnel la lutte contre le terrorisme et l'�pineuse question du r��chelonnement de la dette ext�rieure qu�aucun de ses pr�d�cesseurs ne put faire pour des raisons politiciennes ou de gestion de carri�re. Fid�le aux id�aux de Novembre et porteur d�une conception de l�Etat-nation qui ne pouvait s'accommoder de compromissions avec l'int�grisme d�j� en �uvre en ces temps-l�, il fut �cart� de l'ex�cutif. Dans ce m�me contexte, les �janvieristes�, sous les pressions �trang�res et dans une situation de crise s�curitaire, politique, �conomique et sociale, furent �cart�s � leur tour. En v�rit�, plus que le d�part de Zeroual, qui demeure pour beaucoup d�Alg�riens une �nigme, l��viction de R�dha Malek constitue le premier acte symbolique de l�affirmation d�un pouvoir politique tournant le dos � l�id�al de Novembre visant � �difier un Etat r�publicain, d�mocratique et social. Bien plus largement, son retrait de la vie politique ne traduit-il pas la d�fiance de l��lite nationale la plus ancienne, la plus aguerrie parce que tremp�e dans la lutte pour la lib�ration nationale, � ce qu�elle consid�re comme relevant de �l�ordre de la n�cessit� approche th�oris�e par Lachref qui fut proche compagnon de R�dha Malek. A. Hamma, ancien cadre sup�rieur de l�Etat