C'est beau, les élans affectifs et on en a eus beaucoup à l'occasion de la «Fête des mères». A la radio, à la télé, sur les réseaux sociaux et peut-être bien dans la vraie vie, on s'est lâché avec une touchante tendresse. La maman, les mamans, oui. On eût pu encore se laisser aller sans modération dans l'expression des sentiments. Une vidéo d'un scénariste occasionnel et anonyme a fait le tour du monde. Elle a été vue, partagée et commentée par des millions de femmes et d'hommes aux quatre coins de la planète. Elle a fait le buzz, comme on dit dans le langage branché des internautes. Elle raconte quoi, la vidéo ? Une mise en scène d'entretiens d'embauche à distance. Le faux manager, dans un bureau somptueux, habillé comme une star, la mine sérieuse et le verbe décontracté, parle aux candidats à l'emploi qui se succèdent au téléphone, avec son et images. Avec le plus grand sérieux donc, le faux recruteur proposait aux postulants un emploi où il fallait être à la fois médecin, enseignant, cuisinier, électricien, mécanicien, cuisinier, masseur, banquier, peintre, psychologue, pharmacien et plein d'autres métiers encore. Au fur et à mesure que les candidats passaient, il en remettait une couche dans les exigences du poste. Il leur expliquera ainsi dans ce travail qu'on ne peut pas se reposer une minute, qu'on doit rester debout tout le temps, qu'on ne peut pas prendre un moment pour manger, qu'on n'a pas le droit de dormir… Et pour boucler la boucle, le dernier candidat apprendra qu'on n'est pas payé ! L'un après l'autre, les postulants, les yeux écarquillés, les oreilles tendues et les sourcils en folie réagissaient, hallucinés, avec des expressions différentes. C'est l'enfer, c'est l'horreur, c'est une plaisanterie, c'est illégal, c'est inhumain, c'est inacceptable, c'est impossible, c'est hilarant, telle est la «sélection» des expressions avec lesquelles répliquaient les demandeurs d'emploi, dont certains riaient jaune ou restaient simplement hébétés. Jusqu'à ce qu'une jeune fille, manifestement plus indignée que les autres, demande audacieusement s'il y avait des gens suffisamment fous ou serviles ou masochistes pour accepter un tel «travail». Et c'est à ce moment- là que le faux recruteur saisit opportunément la perche, certainement prévue dans le scénario du génial concepteur : «Oui, il y a des personnes qui acceptent ça sans se plaindre. Elles l'acceptent avec beaucoup de bonheur même. Elles sont des millions à travers la planète à l'avoir exercé depuis la nuit des temps et souvent jusqu'à leur dernier souffle. Ce sont vos mères, nos mères, toutes les mères du monde». Bonne fête, les mamans ! [email protected]