30.000 Algériens manifestaient contre le couvre-feu décrété par Maurice Papon La date du 17 Octobre 1961 est sortie du silence mais il reste à passer au stade de la reconnaissance par les autorités politiques. Le 17 octobre 1961 à Paris, la folie meurtrière de la France, ex-puissance coloniale, s'est exprimée contre des Algériens. 30.000 Algériens manifestaient contre le couvre-feu décrété par le préfet de police, Maurice Papon, a déclaré Mohammed Méchatti, membre du groupe des 22 et responsable de la Fédération de France. La police se livrait à une répression sanglante et brutale dont le nombre de victimes est estimé à des centaines de vies. En effet, des hommes, des femmes et des enfants effrayés, humiliés, jetés simplement dans la Seine et laissés pour noyés. Les cadavres seront, pour certains, retrouvés flottant dans la Seine, d'autres complètement ensevelis. Tandis que d'autres avaient subi le parcage bestial au Palais des sports, des tortures sadiques des supplétifs harkis dans les caves de la Goutte d'or, des descentes provocatrices dans les bidonvilles de la banlieue. C'est dire à l'évidence que entre les massacres du 8 Mai 1945 et les morts du métro Charonne (8 février 1962), la journée sanglante du 17 Octobre 1961 figure en bonne place dans la volumineuse liste des atrocités meurtrières commises par la France durant la longue nuit coloniale. Pourtant, aucune reconnaissance ni réparation officielles depuis lors n'ont été attribuées aux victimes de 17 Octobre 61 à Paris. Les témoignages sont encore vivaces dans la mémoire collective. Ainsi, des historiens, (Benjamin Stora Jean-Luc Einaudi, Jean-Paul Brunet), des photographes, des romanciers (Meurtres pour mémoire de Didier Daeninckx), ont, chacun de son côté, plongé dans les bas-fonds de la Seine et fouillé dans les bidonvilles de la banlieue et dépoussiéré les caves de la Goutte d'or pour déterrer et faire parler des centaines de morts engloutis par l'oubli. Plus magistral était néanmoins le poème de Kateb Yacine: «La Gueule du loup», mis en chanson par Les Têtes raides en 1998, qui immortalise les victimes des événements du 17 Octobre 1961 à Paris. «Peuple français, tu as tout vu. Oui, tout vu de tes propres yeux. Tu as vu notre sang couler. Tu as vu la police assommer les manifestants. Et les jeter dans la Seine. La Seine rougissante. N'a pas cessé les jours suivants. De vomir à la face», avait écrit Yacine à la mémoire des victimes. Cela en plus des cinéastes qui ont foncièrement contribué à la mise en lumière de l'événement puisqu'on recense une vingtaine de films qui lui sont consacrés, dont le plus récent, la fiction de Rachid Bouchareb, Hors la loi (2010). S'ajoutant à cette oeuvre capitale, le film documentaire: «Ici on noie les Algériens», réalisé en 2011 par Yasmina Adi, une oeuvre remarquable, qui en actualise douloureusement la portée, les témoins d'aujourd'hui, dont les veuves des victimes, attendent toujours la reconnaissance officielle du préjudice qui leur a été infligé.