La Renaissance italienne: Chelsea a remporté avant-hier soir son deuxième titre de champion d'Angleterre en trois ans, grâce notamment à l'entraîneur italien Antonio Conte, qui a repris en main une équipe en déshérence pour lui montrer la voie du titre. Les «Blues» sont allés chercher dans la douleur à West Bromwich (1-0) leur 28e victoire de la saison, grâce à un but de Batshuayi en fin de match. Un but libérateur qui les place hors de portée de Tottenham avec encore pourtant deux matchs à disputer en Premier League (trois pour les «Spurs»). Tottenham, en s'accrochant jusqu'au bout aura fait durer un peu le suspense, mais ces «Blues» étaient vraiment trop forts depuis octobre. C'est en effet au début de l'automne que les Londoniens de l'Ouest ont posé les premières briques de leur formidable édifice, sur les cendres encore fumantes d'une déroute à Arsenal. Il faisait beau à l'Emirates Stadium cet après-midi-là, mais les «Blues» n'en appréciaient pas vraiment la douceur des derniers beaux jours: ils étaient menés 3-0 à la pause par les «Gunners» et végétaient à une médiocre huitième place. Bref, la saison prenait tristement le chemin de la précédente, terminée à une médiocre dixième place. Mais après dix minutes en seconde période, Conte a chamboulé son équipe pour un système à trois défenseurs (3-4-2-1). Régler un tas de problèmes Et ça a tout changé. «Habituellement, mes équipes ne concèdent pas trois buts avant la mi-temps. Ça a été un choc. Ce match est toujours présent dans mon esprit», avait confié Conte en février. «Cette décision a changé notre saison. Nous avions besoin d'un nouveau costume. Dans mon esprit, il y avait cette option car je savais que j'avais les joueurs pour», a commenté l'entraîneur vendredi soir. Le succès s'est matérialisé le match suivant, le 1er octobre à Hull, première étape de la magnifique série de treize victoires consécutives qui les installera définitivement aux commandes. Avant ce coup de génie, tout n'a pas été facile pour Conte, dont le choix de quitter la Squadra Azzurra à 47 ans a parfois étonné. Si l'ancien sélectionneur de l'Italie a hérité d'un effectif bardé de stars, sacré champion en 2015, il est surtout arrivé en terrain miné. Car rien n'allait plus à Chelsea, quand le technicien a déposé ses valises en juillet, après l'Euro-2016. Il avait trouvé un vestiaire en colère, rempli d'ego blessés (Costa, Hazard, Fabregas) et de talents enterrés (Moses, Azpilicueta), dont la révolte avait eu la peau de José Mourinho quelques mois auparavant. «Ce n'était pas facile pour moi d'arriver en Angleterre et d'être confronté à d'autres habitudes, une langue différente et d'hériter des joueurs après une mauvaise saison», a-t-il expliqué vendredi. Avec son style, qui lui avait déjà permis de gagner trois Serie A avec la Juventus Turin, Conte a regagné les esprits, offrant à ses joueurs l'écoute et le soutien qui leur manquaient sous Mourinho. Cette approche a permis de gérer en douceur les cas Fabregas et surtout Terry, relégué sur le banc des remplaçants. Le génie espagnol s'est transformé en joker de luxe, la légende anglaise en remplaçant. De la compassion oui, mais à une condition toutefois: apprendre avec acharnement à l'entraînement et obéir à la lettre aux ordres sur le terrain. «Au début de la saison, ça n'a pas été facile. Nous avons dû régler un tas de problèmes», avait confié l'Italien, qui a profité du mercato d'hiver pour se débarrasser d'Obi Mikel, Ivanovic ou Oscar. Hazard exceptionnel Ironie du sort, c'est peut-être le précédent naufrage qui a permis aux Londoniens d'aller chercher leur sixième titre. L'absence des compétitions européennes a en effet offert du temps aux «Blues» pour peaufiner la tactique et ménager les corps. Un luxe dans cette Premier League si exigeante. Conte a évidemment pris les rênes d'une grande équipe. Il a relancé, en lui donnant plus de liberté, un Eden Hazard exceptionnel tout au long de la saison (15 buts). Il a su aussi garder sous contrôle le bouillant Diego Costa, auteur d'une formidable saison avec 20 buts. Le technicien a aussi transformé l'ailier Victor Moses, peu utilisé depuis quatre saisons, en latéral efficace. David Luiz, dont l'arrivée avait soulevé des interrogations, s'est montré un défenseur central sûr au sein de la défense à trois, tout comme Azpilicueta. L'Apulien a surtout pu compter sur l'abattage de N'Golo Kanté. Arrivé avec le titre en poche en provenance des «Foxes», l'infatigable Français a encore été partout, au point d'être sacré meilleur joueur de la saison par ses pairs et par la presse britannique. Kanté avait stupéfié l'Angleterre avec Leicester la saison dernière, Conte a surpris avec Chelsea cette année. Les deux hommes sauront-ils désormais étonner l'Europe?