Des affrontements violents au centre et au sud de Tripoli «Les auteurs de l'attaque perpétrée contre un bus transportant des chrétiens ont été entraînés dans des camps en Libye», a affirmé hier le MAE égyptien Sameh Choukri au secrétaire d'Etat américain Rex Tillerson. En représailles, l'Egypte a frappé des camps jihadistes à Derna. Les affrontements qui ont opposé vendredi dernier les forces loyales au gouvernement d'union nationale libyen présidé par Fayez al Serraj à des milices rivales qui tentaient de reprendre des positions au centre de la capitale ont fait 52 morts et 130 blessés dans leurs rangs, selon un bilan des autorités sanitaires. La veille, un premier bilan établi par le ministère de la Santé parlait de 28 morts et d'une centaine de blessés. Hier, un calme relatif régnait à Tripoli, lézardé par des tirs en rafale sporadiques dans les quartiers sud où se sont déroulés également des combats. Certaines sources proches du GNA ont affirmé que l'attaque des milices favorables à l'ancien chef du gouvernement non reconnu Khalifa Ghweil a finalement été repoussée. La même source a également évoqué l' «exécution» de 17 membres d'une force loyale basée dans le quartier d'Abou Slim, toujours au sud de la capitale, où les combats ont été caractérisés par une rare violence. Réagissant à ce regain de violence, les membres du Conseil de sécurité de l'ONU ont condamné vendredi soir cette nouvelle escalade de la violence à Tripoli, «appelant toutes les parties en Libye à faire preuve de retenue». Quant aux forces loyales au GNAA, elles affirment avoir même pris le contrôle de la prison où étaient détenus les principaux dirigeants de l'ancien régime, comme le dernier Premier ministre de Maammar al Gueddafi, Baghdadi al-Mahmoudi, et l'ex-chef des services de renseignements, Abdallah Senoussi. Cette prison était jusqu'à ces derniers jours sous la coupe de Khaled Chérif, ex-vice ministre de la Défense de la coalition de milices de Fajr Libya, qui s'était emparée de la capitale en 2014. L'ex-chef de gouvernement installé à l'époque par cette coalition, Khalifa Ghweil, ainsi qu'un autre leader de Fajr Libya, Salah Badi, sont accusés par le GNA d'être les instigateurs de l'attaque qui a ciblé le centre de Tripoli vendredi, après en avoir été chassés en mars dernier après des combats féroces. Les premières escarmouches avaient débuté vendredi, à l'aube, dans les quartiers d'Abou Slim, Hadhba et Salaheddine, au sud de Tripoli, où des chars et des armes lourdes ont été à la manoeuvre selon des témoins. L'envoyé spécial de l'ONU Martin Kobler a aussitôt réagi, observant que «les voix de la raison (...) doivent prévaloir dans l'intérêt du pays» et appelant à «protéger les civils». Le calme qui règne, depuis, dans toute la ville de Tripoli reste cependant précaire alors que s'y déploient les dizaines de milices qui campent chacune sur sa position. Khalifa Ghweil, écarté du pouvoir après la formation du GNA, et Salah Badi, n'en sont pas à leur première attaque, à Tripoli, où ils cherchent à reprendre pied. Originaires tous deux de Misrata, ils bénéficient du soutien des milices de la coalition Fadjr Libya qui s'était emparée de Tripoli en 2014. Mais les milices proches du GNA sont parvenues à élargir leur influence dans Tripoli, notamment après en avoir chassé en mars dernier des groupes rivaux et en parvenant à rassurer et à protéger les habitants du centre et du sud de la ville. Si le GNA n'est pas parvenu à asseoir son autorité hors de la Tripolitaine, il est cependant bien ancré désormais dans la capitale où les coups de boutoir que lui assène régulièrement Khalifa Ghweil restent sans effet notable. Toujours dans la journée de vendredi, l'aviation loyale au maréchal Khalifa Haftar a participé aux frappes aériennes menées par l'Egypte dans le sud de la Libye, en représailles à une attaque contre un autobus transportant des coptes. Revendiquée par Daesh, cette attaque avait fait 29 morts dont de nombreux enfants et plusieurs dizaines de blessés. Le communiqué publié hier par l'agence Lana proche des autorités de l'Est a évoqué une «opération conjointe» à Derna avec l'aviation égyptienne. L'état-major de Haftar a précisé que les appareils ont ciblé des camps militaires et le quartier général de Majless Moujahidine Derna, un groupe proche d'Al-Qaïda qui contrôle la ville de Derna, lui infligeant de «lourdes pertes en hommes et en matériels». La ville de Derna était connue pour être sous l'influence du groupe Ansar Asharia (proche d'al-Qaïda) entre 2011 et 2014 mais depuis 2015 un grand nombre de ses éléments ont rejoint l'Etat islamique. In fine, la Libye demeure malgré les efforts de la médiation internationale tributaire d'une période de transition qui n'en finit pas, avec des crises intermittentes et des bras de fer répétés dont les conséquences sur l'économie du pays sont de plus en plus dramatiques.