Ceux qui veulent verser dans le triomphalisme ont tout intérêt à revoir leur copie. En battant l'équipe du Tchad sur le score de 4 buts à 1, l'équipe d'Algérie a pris une sérieuse option pour la qualification à la phase finale de la Can 2004. On peut même dire qu'elle a un pied déjà en Tunisie, le pays qui accueillera cette phase finale. C'est bien le moins qu'on attendait d'elle dans un groupe qui lui a offert deux adversaires parmi les plus faibles du continent. Par conséquent, ceux qui veulent verser dans le triomphalisme ont tout intérêt à revoir leur copie car ce n'est pas une qualification de l'EN à la Can 2004 qui changera quoi que ce soit au problème de la crise que vit le football algérien. Une crise qui s'est répercutée par une vertigineuse dégringolade dans la hiérarchie mondiale puisque, actuellement, il se situe pas trop loin de la 80e place. Ceux qui veulent mettre la large victoire sur les Tchadiens sur le compte d'un prétendu renouveau de l'EN devront savoir que le Tchad n'a pas de championnat national. L'état déplorable des routes, la rareté des infrastructures sportives font que la fédération du football de ce pays, regroupe une fois par an les clubs dans la capitale, N'djamena, et les fait jouer entre eux durant une courte période. Dans le même ordre d'idées, il serait trompeur de prendre les performances de l'USMAlger et de la JSKabylie, dans les compétitions africaines de clubs, comme référence pour affirmer que la discipline est en plein redressement. Tout le monde sait que s'il y a une seule coupe d'Afrique de valable, c'est bien celle des champions. Les deux autres ne rapportent rien sur le plan financier et surtout sur le plan sportif. La réalité se constate au niveau du championnat national. Un championnat gagné par une consternante médiocrité et marqué par la multiplication de rencontres plus monotones les unes que les autres et qui causent un tort énorme à la renommée du football. Bref, un spectacle à éviter de montrer à la télévision sauf si vous avez vraiment besoin de dormir. Dans ce cas, il n'y a pas meilleur somnifère. La cause de tout ce mal vient des années d'errements après l'étape du Mondial-1982 qui ont fait oublier que toute équipe, aussi forte soit elle, doit être renouvelée. Cela devait passer inévitablement par une solide et sérieuse politique de formation au niveau des catégories de jeunes puis de développement de la discipline. Or plus les années ont passé et plus on a vu atterrir dans le circuit une armada de dirigeants de clubs dont le but évident n'était pas de servir le football mais de s'en servir. D'où une focalisation insensée sur les seniors, une catégorie où les millions de dinars circulent jusqu'à présent sans qu'aucun contrôle sérieux ne soit effectué. Des seniors qui, bien sûr, n'ont pas reçu la formation voulue et adéquate, mais transformés en vedettes par une presse spécialisée à la recherche du sensationnel. D'où le faible niveau du championnat et comme l'EN n'est que le reflet de celui-ci, il n'y a guère à en faire une perle. Il reste, alors, au sélectionneur national à se tourner vers l'étranger, vers la France essentiellement, pour que lui vienne la denrée capable de rendre cette équipe plus présentable. On a appris que Hamid Zouba a été soulagé de voir les joueurs émigrés débarquer à Annaba. Etonnant de sa part car on se souvient qu'en mars 2001, alors que l'EN n'était pas éliminée du mondial 2002, il avait pris le risque de ne prendre avec lui que deux émigrés au Sénégal tout en faisant confiance à certains joueurs qui n'avaient jamais revêtu le maillot national. Malgré la lourde défaite (3-0), Zouba avait soutenu que l'avenir de cette EN se trouvait en Algérie et non en Europe et qu'il fallait faire confiance aux joueurs du cru. Il a dû nettement se raviser, surtout que ce sont eux, les émigrés, qui ont réussi à battre le Tchad. Zouba s'est donc aperçu que l'avenir de cette EN restera en Europe tant que le bricolage règnera en maître dans la compétition nationale. Du reste, force est de constater que les joueurs du cru doivent doublement se voiler la face car ceux qui viennent de France sont loin d'être des stars. La preuve en est que, soit ils émargent dans des clubs peu huppés, soit ils ne sont pas titulaires. Le drame est qu'il y a une sorte de supplication qui est faite pour que la FAF daigne recruter un entraîneur étranger pour l'EN. Comment peut-on penser, un seul instant, qu'un tel personnage parviendra à faire remonter la pente à cette équipe? A-t-on le championnat de haut niveau qui vous forme des joueurs à la pelle? A-t-on, en ce moment, les joueurs talentueux capables de damer le pion à leurs adversaires? Le meilleur des maçons ne parviendra pas à vous ériger un mur solide si vous lui donnez de la mauvaise matière première. L'équipe de 1982 a été bâtie grâce à des clubs mieux structurés et plus sérieux et à un championnat plus disputé. Mais on oublie également que les joueurs sélectionnés étaient en regroupement permanent et ne jouaient que rarement avec leurs clubs respectifs. Quel est le club aujourd'hui qui accepterait de se sacrifier pour la cause de l'EN? Aucun. Pourtant, tous nos clubs continuent à téter les mamelles de l'Etat et à profiter de sa générosité financière. Si le Nigeria, le Sénégal et le Cameroun sont en pleine réussite, ce n'est pas parce qu'ils ont des entraîneurs étrangers mais bien parce qu'ils sont constitués d'effectifs composés de joueurs évoluant dans les plus grands clubs d'Europe. Ce qui n'est, malheureusement, pas le cas chez nous. Aussi, sans une refonte totale du système, il n'y a guère à espérer de miracle. A force de continuer de la sorte, il faudra se faire un deuil de la qualification au Mondial 2006 et ce, même si l'Algérie était désignée pour accueillir la phase finale de la Can de cette même année.