Hassiba Mokraoui, directrice générale de l'Agence nationale d'intermédiation et de régulation foncière (Aniref) estime, dans cet entretien, que la rareté foncière persiste, l'offre et la demande n'étant pas à l'équilibre. Liberté : Quel regard portez-vous sur l'évolution du foncier ? Hassiba Mokraoui : L'Agence nationale d'intermédiation et de régulation foncière (Aniref), un organisme opérationnel depuis 2008, veut contribuer à l'émergence d'un marché foncier, c'est une de nos missions. Si nous remontions le temps, nous dirions qu'au départ, il fallait tout recenser : actifs résiduels des entreprises publiques autonomes ou non autonomes dissoutes ainsi que les actifs excédentaires... Et tout ce qui a été établi en matière foncière a été mis sur le marché, aux enchères, un mode d'attribution du foncier qui avait cours. Dans le cadre de cette procédure, 279 hectares ont été affectés à des investisseurs. Mais la tension persistait sur le foncier et persiste encore, car le marché n'est pas à l'équilibre. Aussi, il fallait étoffer l'offre foncière. Ainsi, et à partir de 2010, nous avions commencé à faire des prospections en vue de choisir des sites industriels sur la base de certains nombre de critères : la demande foncière au niveau local, la nature juridique du foncier, l'accessibilité aux sites, le tissu industriel, les infrastructures routières. En 2011, le Conseil des ministres a décidé d'aménager des parcs industriels. C'est une mission qui a été confiée à l'Aniref. C'est une nouvelle mission ? Oui, c'est un objectif nouveau qu'il fallait intégrer dans notre stratégie. Il fallait aussi changer de statut juridique ; et c'est ce qui a été fait. Aujourd'hui, l'Aniref dispose de prérogatives qui lui permettent de faire valoir l'utilité publique d'un site, pouvant ainsi indemniser des habitations qui s'y trouvent. En outre, nous avons signé un accord de partenariat avec le Fonds national d'investissement (FNI), pour le financement des projets de réalisation de ces parcs industriels, parce que nous voulons en fait des sites industrielles modernes bien équipés : crèches, signalétiques, services d'appui à l'entreprises....Nous visons l'excellence. D'ailleurs, 25% de la superficie de ces parcs sera consacrée aux services. En tout, 49 parcs industriels, totalisant une superficie de 12 000 hectares, circonscrits dans 39 wilayas et couvrant neuf espaces de programmations territoriales, seront aménagés et mis à la disposition des investisseurs. Des 49 sites en question, nous avons choisi 22 sites, car ceux-ci ne posent pas de problème au plan juridique. Ils représentent 6 000 hectares ; ce qui pourrait contribuer à équilibrer le marché foncier. Quelles sont les entreprises chargées des opérations d'aménagement de ces sites ? Des appels d'offres nationaux et internationaux (18 pour l'instant ) ont été lancés pour commencer l'étude, les travaux de viabilisation, d'épuration d'eau... Des Turcs, des Espagnols, des Egyptiens, entre autres, se disputent ce marché. Des étrangers qui vont ainsi s'allier avec des groupements algériens pour mettre en œuvre ces projets. Nous devons souligner au sujet des parcs industriels que du travail est en train de s'accomplir au niveau local (wilayas), avec comme objectif de faire avancer les choses et se mettre au service des investisseurs. Les 49 parcs en projets sont situés pas loin des autoroutes est-ouest et de la rocade des Hauts-Plateaux. L'approche géographique et territoriale ainsi adoptée dans la mise en place de ces sites, est, de notre point de vue, importante, parce qu'elle est de nature à rentabiliser ces infrastructures et à doper l'offre foncière à l'échelle du pays. C'est en fait la mise en œuvre du schéma directeur du réaménagement du territoire (Hauts-Plateaux et Sud). Des parcs industriels vont ainsi voir le jour, comme nous en trouvons dans d'autres pays. Est-ce pour autant que l'épineuse question du foncier soit définitivement réglée ? Malgré les avantages — abattement fiscale, des régions où le mètre carré est proposé au dinar symbolique.... — qui ont été accordés aux investisseurs, le foncier pose encore problème. C'est pourquoi il faut des parcs modernes, sur le long terme avec un mode de gestion moderne. Et comment va-t-elle se faire l'attribution des assiettes foncières dans ces futurs parcs ? Aménageur qu'elle est devenue, l'Aniref va apporter conseils aux autorités locales, proposer un schéma d'attribution qui prenne en compte les besoins en investissements, la nature des investissements de chaque région. Nous allons proposer des variantes d'aménagement et ce seront les Calipiref qui vont se charger des attributions. Nous ferons, de concert, avec les autorités locales, en sorte que l'anarchie qu'il y a aujourd'hui dans les zones industrielles ne se reproduise pas. Cela ne signifie pas qu'il y aura forcément des sites spécifiques. A notre sens, nous ne pouvons pas avoir de tels sites, parce que la demande en investissement est forte mais aussi éparse et dans toutes les activités. Quand est-ce que ces parcs seront livrés ? Ce sera en 2017, que nous allons réceptionner les premiers sites. Indépendamment, peut-être, des solutions que ces parcs vont apporter au foncier, nous insistons pour dire qu'il faut commencer à les aménager, à les réaliser et à régler les problèmes qui y font obstacle. Nous ne parlions pas de bureaucratie, mais nous dirions que le processus est lent. Il faut aller vers la vulgarisation de l'information foncière, expliquer combien coûte une assiette foncière, parler de l'accessibilité au foncier. Nous pensons que les Calpiref doivent en faire davantage en matière d'information. Notre objectif à nous est de rendre équilibre l'offre et la demande foncière. Aujourd'hui, la moitié des dossiers d'investissement sont rejetés pour cause de déficit en foncier, c'est un constat que l'Aniref fait à la lumière d'une analyse de situation. Cela va persister tant qu'il n'y a pas équilibre dans le marché foncier. Nom Adresse email