Alors que le Premier ministre malien annonçait une nouvelle rencontre à Alger où la CMA procéderait à la signature de l'accord conclu le 1er mars dernier, deux principaux groupes de la coordination ont réfuté de manière aussi catégorique que sèche cette perspective. Pour le Premier ministre, Modibo Keïta, qui intervenait jeudi sur les ondes de la radio nationale malienne, "la Coordination des mouvements de l'Azawad a décidé de parapher l'accord de paix d'Alger le 15 avril dans la capitale algérienne". M. Keïta a précisé, devant des chefs politiques et des représentants de la société civile, détenir l'information de la médiation. Mais les assurances de M. Keïta ont vite volé en éclats suite aux réactions de membres de la CMA qui l'ont contredit, affirmant n'avoir donné aucun accord pour signer le document d'Alger. De son côté, le chef de la diplomatie malienne, Abdoulaye Diop, qui fait, dans le même sens, appel au soutien de l'Onu, a mis l'accent, jeudi sur "les risques énormes pour la paix au Mali et dans la région, voire au-delà", estimant que "l'accord est pris en otage par un groupe d'individus radicaux et extrémistes". Dans une courte déclaration reprise par les médias locaux, le MNLA, par la voix de son porte-parole, Attaye Ag Mohamed, affirme qu'"aucune décision n'a été prise par le MNLA pour parapher ou non le document". Même réaction du Mouvement arabe de l'Azawad (MAA) qui "dément avoir donné son accord pour le paraphe prévu le 15 avril 2015 à Alger". Le MAA justifie cette position par sa fidélité au combat héroïque des peuples de l'Azawad et le respect de leur position (qui a rejeté l'accord) lors des rencontres de concertation à Kidal les 12 et 15 mars dernier. Viendra par la suite, un communiqué du MNLA pour démentir l'information en incluant, dans une position globale, les autres groupes, le HCUA et le MAA, en évoquant la CMA. Et enfin, un nouvel acteur, une coordination des cadres de l'Azawad qui, depuis Nouakchott, en Mauritanie, met en garde contre la signature de l'accord. Une mise en garde adressée principalement à la CMA pressée de clarifier sa position sur les déclarations du gouvernement malien et surtout de respecter la position des populations qui se sont exprimées lors des rencontres de Kidal. Pour l'instant, on ne sait pas d'où vient cette coordination des cadres inconnue dans l'échiquier de la crise malienne. À moins qu'elle ne soit constituée de réfugiés ; la Mauritanie abritant le plus grand camp de réfugiés maliens dont des cadres et des universitaires, essentiellement des Touareg, près de Bassikounou, au sud, à la frontière avec le Mali. En tout état de cause, ces réactions, différenciées, de groupes de la CMA, qui, jusque-là, ont montré une certaine cohésion, démontre les clivages existant entre ces groupes et fait remonter à la surface leurs divergences fondamentales. En effet, dans une récente déclaration à Liberté, le porte-parole du HCUA avait affiché des dispositions à adhérer à l'accord d'Alger pour peu que la médiation tienne compte d'une partie des réserves émises sur le document. Le MNLA a répliqué le lendemain par le rejet de tout accord qui ne prenne pas en compte ses revendications essentielles, particulièrement celles liées au statut de l'Azawad et le volet des forces de sécurité dans le Nord. La CMA se présente ainsi avec une partie prête à faire des concessions et une autre figée dans sa radicalité. D'où les dissensions qui apparaissent au grand jour. Une issue naturelle pour les observateurs, compte tenu de la nature idéologique des trois groupes qui composent la coordination dont l'alliance a été conjoncturelle étant dictée par les conditions de mise en œuvre du dialogue intermalien. En effet, il serait inimaginable dans un autre contexte que le HCUA, issu d'une dissidence d'Anser Edine et qui prône l'application de la charia, s'allie avec le MNLA, récente création, qui est un mouvement laïque et le MAA, un mouvement arabe qui veut "imposer" sa place dans la région étant séculaire. Ces dissensions pourraient, à très court terme, déboucher sur un divorce. D. B.