Les syndicalistes ont battu en brèche les arguments présentés par le gouvernement, comme ils ont dénoncé les déclarations du ministre du Travail qui a "supprimé" la loi sur la retraite avant même qu'elle ne soit soumise au vote à l'APN. Les syndicalistes de la zone industrielle de Rouiba, réunis hier en session extraordinaire, ont menacé de recourir à toute action qu'ils jugent appropriée pour défendre les acquis des travailleurs, notamment la préservation de la retraite anticipée. Lors de cette réunion houleuse élargie aux membres de la commission exécutive de l'Union locale, les syndicalistes ont battu en brèche, chiffres à l'appui, les arguments présentés par le gouvernement, comme ils ont dénoncé les déclarations du ministre du Travail qui a "supprimé" la loi sur la retraite avant même qu'elle ne soit soumise au vote à l'APN. Les atteintes au droit syndical dans le secteur privé ont été largement abordées par les syndicalistes lors de ce conclave où ils ont décidé d'organiser des sit-in devant chaque siège d'entreprise qui a recours à des décisions arbitraires contre des travailleurs et leurs représentants dans ce secteur jugé hors la loi. S'adressant aux députés, le secrétaire général de l'Union locale, Messaoudi Mokdad, a mis en garde "tous les responsables concernés" en cas d'adoption de la nouvelle loi sur la retraite qui a déjà vidé les entreprises et les administrations de leurs meilleures cadres avant même sa promulgation. "Nous rejetons les arguments infondés avancés par le gouvernement pour justifier la suppression d'un droit fondamental car le déséquilibre de la caisse des retraites n'est nullement lié à la structure démographique ni au nombre des retraités, mais les vraies raisons se trouvent du côté du faible emploi, de l'évasion fiscale et des fausses déclarations à la Cnas", affirme M. Messaoudi, chiffres de l'ONS à l'appui. "Sur 7,6 millions de travailleurs recensés, 2,5 millions ne sont pas déclarés à la Cnas alors que dans le secteur privé, seuls 2 travailleurs sur 10 sont déclarés et la plupart des entreprises privées font de fausses déclarations comme cette entreprise qui a sous-déclaré à la Cnas tous les travailleurs, y compris le P-DG, un salaire unique de 18 000 DA", a-t-il précisé. Et d'ajouter : "En plus, il existe des dépenses indues comme la prise en charge par la Cnas et la CNR de dépenses ayant un caractère de solidarité qui ne sont remboursées que partiellement par l'Etat ou encore l'imputation à la Cnac de subventions des salaires et de formation ainsi que les exonérations de cotisations sociales accordées aux entreprises privées ou encore la prise en charge par l'Etat des allocations familiales à la place des entreprises, parmi elles des entreprises étrangères." Messaoudi précise que "depuis 2001 à 2015, la Cnas, qui disposait de plus de 180 milliards de dinars de cotisations des travailleurs, a dépensé uniquement 9 milliards de dinars, l'on s'interroge où sont partis les 179 milliards restants". Répondant au ministre du Travail qui avait affirmé que les retraités travaillent ailleurs après avoir quitté leur emploi, le secrétaire général de la fédération mécanique, M. Benmouloud, et le SG de l'Union locale affirment que "ce cas de figure est largement répandu chez les cadres dirigeants que ses services doivent contrôler comme nous l'avions toujours demandé". Sur le sujet de la "haute pénibilité", les syndicalistes s'étonnent que cette disposition énoncée dans l'article 7 de la loi 83/12 du 2/07/19983 n'ait pas été encadrée par un décret comme le stipule cet article. "33 ans après la promulgation de cette loi, le décret prévu pour les cas de nuisance et de pénibilité n'a pas vu le jour", s'interroge M. Benmouloud. De son côté, Amar Takdjout, président de la Fédération du textile et membre de la commission exécutive de l'UGTA, présent à cette rencontre, a appuyé les revendications des syndicalistes de Rouiba, affirmant que le maintien de la retraite anticipée à 32 ans de travail est un droit fondamental pour les travailleurs. "Il est regrettable que les syndicalistes ne soient pas entendus pour leur permettre de donner des explications convaincantes", dit-il, précisant que "les députés doivent réfléchir avant de se prononcer car la suppression de la retraite anticipée sera considérée comme étant un déni de droit". Les syndicalistes ont voté, à l'issue de cette réunion, une déclaration dans laquelle ils n'écartent pas de recourir à "des actions qu'ils jugent appropriées pour défendre les acquis des travailleurs, parmi eux la retraite après 32 ans de travail". M. T.