On a tous un DVD de Ray Charles, de M.C. Solar ou de Bob Marley à la maison, sans savoir que c'est un pur produit de l'Algérie qui l'a conçu. C'est à l'initiative du recteur de l'Université de Tlemcen, Ghouali Noureddine, que Hilal Fetouhi, ingénieur d'Etat en génie chimique et directeur de recherche et de développement d'entreprise dans les universités de l'Europe du Nord, a donné une conférence sur «l'intelligence universitaire, moteur du développement de l'entreprise», au centre de télé-enseignement de la Faculté de l'ingénieur, ce lundi. M. Fetouhi abordera d'abord, en présence du recteur des enseignants chercheurs et de plusieurs étudiants dans les filières de chimie des matériaux, l'explication du brevet et de tout ce qui touche à la propriété intellectuelle. «Il existe à l'échelle universelle 3 critères pour qu'une innovation soit brevetée : elle ne doit pas découler d'une suite logique, qu'il n'y ait jamais eu d'informations sur ce produit, ni orales ni écrites, ou des publications, et, bien entendu, que le produit soit industrialisable. Le droit de brevet est un accord qui autorise le propriétaire de l'interdire à la fabrication et à la vente sans son accord. En revanche, la contrepartie de ce brevet, c'est qu'il ne peut plus être exclusif et donc avec l'obligation au «breveteur» de donner des licences pour le partage de ce savoir-faire. C'est pourquoi, il doit être fait par écrit et tombant dans le domaine public, un concept du XVIe siècle. Bien entendu, le breveteur reçoit des royalties». Pour l'historicité du brevet, M. Fetouhi nous rappellera qu'il a été créé en 1790 par les Américains pour cette notion de protection de la propriété intellectuelle. En 1978, il y aura le Brevet international (Patent Comunity Threaty), où 18 pays étaient signataires. En 2003, ce sera en tout 142 pays, dont l'Algérie, qui en seront signataires. M. Fetouhi s'étalera par la suite sur l'influence de la propriété intellectuelle sur les pays émergents. «En 2009, le revenu réalisé par les USA, par la protection de la propriété intellectuelle, s'élève à 5,5 trillions de $. Ce qui représente 47% du PIB des Américains. La Chine avait déposé en 1995 10.000 brevets et 203.000 en 2008. C'est le 3e pays au monde après le Japon et les USA. En matière de brevet, l'Algérie est classée 135e au monde après le Burkina Faso, avec seulement un brevet depuis 2008. Mais il y a, bien entendu, de nombreux Algériens qui déposent des brevets dans des pays où cela rapporte le mieux, quand l'Etat ne fait pas d'efforts et quand l'Université ne finance pas des projets de recherches. C'est justement le cas de M. Fetouhi, détenteur de 14 brevets et une sommité reconnue du pressage du DVD. Né à Alger, qu'il quitta à 23 ans et qui a été formé au USA, il a inventé dans son usine de Rouen le 1er DVD inrayable du monde. Près de 9 millions de disques ont été vendus en 2005. Fetouhi, tel qu'il est connu dans le monde du DVD, a séduit de grands éditeurs de films tels que Gaumont ou Universal. Il innovera en trouvant dans son laboratoire du Val-de-Reuil le DVD à double face : musique d'un côté et vidéo côté silver, une performance mondiale inégalée malgré les tentatives de maisons de disques comme Warner et Sony, détenue par Digital Valley, adopté par plusieurs maisons de disques dont Sony. C'est à leur demande qu'il s'est intéressé, par la suite, au DVD inrayable. Un Algérien aux 14 brevets ne court pas les rues en Algérie, surtout quand le pays cherche justement à rapatrier ses cerveaux. Et justement, ne voilà-t-il pas un qui ne demande qu'à rentrer pour monter une entreprise et prendre des contacts avec l'université pour créer un pôle de recherche et de développement On a vécu une vieille économie et on en est à sa fin comme les Américains et les Japonais. On est dans les starting-blocks, comme justement ces deux pays, à la course pour développer l'économie. Ce sont des hommes comme Fetouhi dont nous avons besoin, seuls à pouvoir développer notre économie qui a un bel avenir dans l'informatique. Grâce à lui, la Digital Valley, spécialisée dans la fabrication de CD et DVD, développe une production de 200.000 DVD par jour, correspondant à un chiffre d'affaires de 18 millions d'euros. Ce qui permettra à une autre usine à Caen d'être opérationnelle, portant les effectifs de 140 à 300 personnes, avec un chiffre d'affaires en 2005 envisagé à 50 millions d'euros. La balle est dans le camp de l'Etat et dans celui de l'Université.