Le workshop d'Oran a été l'épilogue d'une série de séminaires relevant d'un processus de réforme des agences foncières. Le rendez-vous aura été fructueux, à tous les égards, avec à la clé des recommandations pertinentes. C'est parce qu'on a su poser les bonnes questions. Et parce qu'on a fait parler le terrain. La rhétorique et l'académique n'avaient pas leur place à l'hôtel « Liberté ». Les questions posées au préambule par Kelkal Abdelkader, directeur du Centre national d'études et d'analyses pour la population et le développement relevant du ministère de l'Intérieur, ont servi de fil d'Ariane pour éclairer les esprits, aiguiser le sens critique et guider les réflexions afin d'aboutir aux bonnes réponses. Le tout dans un débat interactif, affranchi de toute contrainte et de tout formalisme, dont les acteurs « pivots » ne pouvaient être autres que les directeurs des agences foncières eux-mêmes. Ayant pour objectif général l'activation du rôle des agences de gestion et de réglementation urbaines dans les missions d'aménagement du territoire, ce colloque régional se devait à l'évidence être un point d'échange multidisciplinaire et multilatéral, avec entre autres acteurs en rapport avec le thème, des maires, des DUC, des inspecteurs généraux de wilaya. SE POSER LES BONNES QUESTIONS POUR AVANCER En clair, il était question pour les participants à ce séminaire régional l'avant-dernier acte précédant les assises nationales qui seront présidées par le ministre de l'Intérieur, des Collectivités locales et de l'Aménagement du territoire, et ce en perspective du grand changement visant les AGERF, de comment développer les bases de travail en matière d'urbanisme et de planification urbaines, proposer des solutions aux divers obstacles rencontrés sur le terrain, améliorer le niveau de formation des acteurs de l'aménagement urbain, réactiver le rôle important des agences de wilayas de gestion et d'organisation foncières et urbaines dans le domaine du développement économique et social. Pour mieux cerner le sujet, il est intéressant de se référer à cette rétrospective proposée par Mohamed Mebarki, directeur de l'agence foncière d'Oran, qui rappelle que c'est à partir des années 1990 que la question de la maîtrise de la croissance des villes redevient une préoccupation majeure des pouvoirs publics. De nouvelles mesures réglementaires sont mises en place en vue de limiter les effets préjudiciables de l'urbanisation, notamment dans la préservation des terres agricoles. La nouvelle loi 90/29 dans un effort de démonopolisation avait changé les procédures d'accès au marché foncier. Dans ce nouveau contexte réglementaire, l'action publique a procédé à la révision des instruments d'urbanisme et a eu recours à plusieurs outils de gestion et régulation tels que l'inventaire général des biens fonciers, les agences locales de gestion et de régulation foncières urbaines (décret 405/90 du 22 décembre 1990). MISSION DE REGULATION FLOUE DANS LE TEXTE ET DANS LA REALITE Cependant, la mission de régulation dévolue à cette nouvelle agence n'est ni précisée dans le contenu du décret ni dans la réalité. Par régulation, le législateur voulait évoquer plutôt la régularisation. C'est cette mission de régulateur du foncier qui demeure toujours absente, tout comme le rôle du promoteur foncier qu'il soit public ou privé qui n'est toujours pas, et la question est à ce jour compétemment ignorée. C'est alors qu'est née dès 2003 l'Agence foncière de wilaya, dénommée AGERF, en vertu du décret 03/408. Cette nouvelle structure, de par son rayon d'intervention, a une vision d'aménagement du territoire en « théorie » et peut être un outil de régulation, du moins ce que prévoyait son statut. Il va falloir aussi se pencher sur l'épineux dossier du contentieux hérité des ex-agences foncières locales dissoutes qui représente un handicap et cause un préjudice financier très important, a mis l'accent M. Mebarki, donnant à titre d'exemple l'agence foncière d'Oran qui a perdu depuis 2004 plus de 300 affaires judiciaires liées à l'ancienne gestion des agences foncières dissoutes, avec une perte financière déplorée de 25 milliards de centimes. LE LOURD PASSIF DES «AFL» ET LA NECESSITE D'UNE SOLUTION DEROGATOIRE «Cette question nécessite une solution dérogatoire pour effacement de tout le passif causé par l'ancienne gestion des AFL», a-t-il suggéré. Le directeur de l'Action territoriale et urbaine au ministère de l'Intérieur, des Collectivités locales et de l'Aménagement du territoire, Bertima Abdelouahab, a insisté pour sa part sur l'élaboration d'un cahier des charges pilote et détaillé pour les collectivités et les agences foncières de wilayas incluant les droits et devoirs des deux parties. « Sur les 48 wilayas du pays qui totalisent 1.541 communes, 17 wilayas seulement comptant 351 communes disposent d'un cahier des charges pour traiter avec les agences foncières de wilayas », a indiqué M. Bertima. Il a exhorté de trouver un terrain d'entente entre les collectivités territoriales et l'agence foncière. Le responsable a appelé les agences foncières des wilayas à assister la collectivité locale dans l'élaboration d'instruments d'urbanisme et leur mise en œuvre, ainsi qu'à promouvoir les terrains dégagés (zones industrielles ou zones d'expansion touristique) pour améliorer le service public en concluant des conventions et des cahiers des charges régissant la relation entre les deux parties. NECESSITE D'UN CAHIER DES CHARGES AGENCE FONCIERE-COLLECTIVITE Il a estimé, dans ce contexte, que les agences foncières des wilayas représentent une nouvelle force de proposition pour la collectivité locale, une fois activées dans le domaine de l'aménagement urbain et de la réglementation de l'immobilier définissant l'activité et améliorant le cadre de vie du citoyen. Il a, au passage, affirmé que son département ministériel accompagne les réformes, dont celle du code des collectivités territoriales qui est au niveau du secrétariat général du gouvernement et qui sera bientôt publié, faisant savoir qu'il comporte des décisions décentralisées pour l'administration et accorde plus de prérogatives aux présidents d'assemblées populaires communales élues et aux walis, de même qu'un décret relatif au service public. Le wali d'Oran, Mouloud Chérifi, a insisté, de son côté, sur les mécanismes nouveaux à dégager pour combler les lacunes et assurer une exploitation optimale des capacités des agences foncières en adoptant une vision prospective en matière de réglementation urbaine de l'espace, appelant à proposer des méthodes et des moyens susceptibles de donner un nouveau souffle à ces institutions.