Alors que le Premier ministre du gouvernement de l'union nationale libyen, Abdelhamid Dbeibeh, se trouve en Algérie pour une visite officielle de deux jours, l'Algérie affiche son intention claire de participer à la reconstruction économique de ce pays ravagé par une guerre civile depuis plus de dix années. En effet, « au-delà des annonces faites lors du forum de partenariat algéro-libyen, beaucoup de choses restent à faire dans l'intérêt mutuel pour asseoir une relation économique fondée sur le principe gagnant-gagnant entre l'Algérie et la Libye », a plaidé, hier dimanche, Abdelwahab Ziani, président de la Confédération des industriels et producteurs algériens (CIPA). S'exprimant au micro de la radio nationale, ce dernier a réclamé « un passage d'une zone sous douane à une zone de libre-échange » entre les deux pays, au moment où l'on annonce la réouverture imminente du poste frontalier terrestre de Debdeb - Ghadamès, le temps « d'achever les préparatifs logistiques et techniques finaux, en coordination avec la partie libyenne », selon le ministre des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum. « L'Algérie qui a pris part à la construction de la paix en Libye peut aider à reconstruire le pays économiquement », a fait observer le président de la CIPA, et ce, « pour répondre à une insistante demande libyenne d'accompagnement au cours du processus de la reconstruction de la Libye », a-t-il souligné. Abdelwahab Ziani a également insisté sur « l'externalisation des entreprises algériennes et attirer les IDE libyens avec ouverture des frontières, une ligne aérienne quotidienne et une ligne maritime ». Louant les avantages de ce partenariat prometteur, l'invité de la radio a rappelé « les conditions d'un accompagnement réussi, basé particulièrement sur l'étendue d'une grande frontière commune avec le voisin de l'est - plus de 1.000 kilomètres - des villes en jumelage et l'amélioration du climat d'affaires », a-t-il encore plaidé. « Nous, hommes d'affaires, de part et d'autre, sommes préparés et maîtrisons les voies et moyens d'entrée et de sortie des marchandises », a-t-il fait-il savoir. « Nous sommes en pleine exploration, c'est dire que la volonté y est de la part des deux parties au niveau des deux Etats, en attendant que les politiques rattrapent l'avance des opérateurs sur le chapitre économique», a-t-il toutefois tempéré. Réouverture du point frontalier Debdeb - Ghadamès En dépit de la fermeture des frontières durant deux ans, «les Libyens connaissent bien nos produits et cela ne date pas d'hier, mais il faut rappeler que ces échanges se faisaient via la Tunisie, ce qui coûte de l'argent en plus», a encore expliqué le président de la Confédération des industriels et producteurs algériens, affirmant, à ce titre, que « les Libyens réclament actuellement de traiter directement avec les Algériens ». « Le souci de traiter directement avec nos partenaires libyens est partagé des deux côtés de la frontière, et cela va se faire au niveau du point frontalier Debdeb - Ghadamès en voie de réouverture, puis réactiver la ligne maritime Alger - Tripoli qui existe déjà », a-t-il expliqué. L'hôte de la radio a également soulevé un autre point important : celui du flux commercial entre les deux pays, « dominé par l'informel », selon lui. Car, argue-t-il, « la fuite de nos produits, présents dans tous les pays du voisinage, peut coûter jusqu'à 5 milliard de dollar/an ; il faut donc arrêter la saignée en créant une task-force en matière fiscale, et diminuer de la fiscalité pour exporter aisément et laisser les gens du marché parallèle intégrer notre marché réel et gagner de l'argent », a plaidé Abdelwahab Ziani. « Il y a une forte demande de la part des voisins libyens, notamment en matière de machinisme et produits agricoles entre autres besoins, qu'on peut transformer en un grand partenariat entre l'Algérie et la Libye », a encore estimé le président de la CIPA, appelant à la création d'une banque algéro-libyenne, « revendiquée par les opérateurs des deux côtés de la frontière ». « Il faut absolument attirer les Libyens vers nos plateformes activant à Debdeb, à In Salah et In Amenas où des zones industrielles existent », a-t-il insisté, révélant que les Libyens ont déjà externalisé certaines de leurs activités de transformation en Tunisie, en Egypte, ou encore en Turquie. « Il va falloir investir dans le territoire libyen, et donc penser à externaliser nos entreprises en matière de services, comme c'est le cas de Sonatrach et de la Sonelgaz, le bâtiment et les travaux publics ainsi que les activités des petites transformations à échanger entre nous, de même pour le créneau porteur de la pharmacie sachant que l'on a la SiliconValley du médicament chez nous », a-t-il estimé. Pour le président de la CIPA, l'ambition du patronat algérien est d'aller conquérir aussi d'autres marchés comme le Tchad, le Niger, le Nigéria et le Sénégal, etc. « Il faut que la sphère politique, en déphasage sur l'économique, suive à la lettre les directives du chef de l'Etat qui prône de libérer l'entrepreneuriat et externaliser, avec des facilitations, les entreprises productives et qui peuvent faire rentrer des devises au pays », a-t-il conclu.