Le président égyptien Mohamed Morsi a rencontré mardi soir le chef de l'armée pour parler de la crise qui secoue le pays où les opposants et les partisans du chef de l'Etat poursuivaient leur mouvement avec d'importants rassemblements notamment au Caire, où des milliers de manifestants étaient rassemblés devant le palais présidentiel. La rencontre entre le président Morsi et le chef de l'armée, le général Abdel Fattah al-Sissi intervient au lendemain de l'ultimatum posé par l'armée égyptienne, donnant au chef de l'Etat 48 heures pour satisfaire les "demandes du peuple". Cette demande a été rejetée implicitement par la présidence qui a souligné dans un communiqué que "la déclaration des forces armées n'a pas été soumise au président" avant sa diffusion et contenait "des signes pouvant causer la confusion", se disant déterminée "à poursuivre dans la voie qu'elle a choisi pour mener une réconciliation nationale globale". Les déclarations de l'institution militaire ont été accueillies par une explosion de joie par les manifestants anti-Morsi qui ont défilé dans les rues du Caire, d'Alexandrie (nord) et d'autres grandes villes du pays. —Partisans et opposants ne veulent rien lâcher— Rassurés par l'armée, des dizaines de milliers de personnes se sont dirigés vers l'emblématique place Tahrir au Caire pour un nouveau rassemblement contre le président avec seul mot d'ordre "le départ de Morsi". Sautant le pas, le "Front du 30 juin" qui rassemble les plus importants partis et mouvements opposés au président Morsi, a annoncé qu'il désignait Mohammed El-Baradei pour "assurer l'exécution des revendications du peuple égyptien". Le Front tire son nom de la date des grandes manifestations de dimanche organisées pour réclamer le départ du président Morsi, accusé de "trahir" les idéaux démocratiques de la révolte contre Hosni Moubarak du début 2011. Le mouvement Tamarrod (rébellion), à l'origine de ces manifestations et d'autres groupes issus de la société civile ainsi que des partis politiques laïques comme "al-Dostour" de M. ElBaradei en font partie. Face aux opposants, des dizaines de milliers de partisans du président étaient rassemblés dans le faubourg de Nasr City ainsi que devant l'université du Caire, pour défendre la "légitimité" de M. Morsi. —Craintes d'une nouvelle escalade de violences— La poursuite de la mobilisation dans les deux camps fait craindre une nouvelle escalade de violences, obligeant les autorités à déployer des effectifs de police supplémentaires dans la capitale. La grande institution islamique Al-Azhar, basée au Caire, a indiqué craindre "un nouveau bain de sang" et s'est inquiétée de l'infiltration d'hommes armés dans les rassemblements "pacifiques". De peur que la situation ne s'envenime, le Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme (HCDH) a appelé mardi toutes les parties en Egypte à "un dialogue national sérieux" afin de "trouver une solution à la crise politique et éviter l'escalade de la violence". Le HCDH a également appelé le président Morsi "à écouter les demandes du peuple et à répondre aux questions que soulèvent l'opposition et la société civile ces derniers mois, en tenant compte des leçons du passé". De son côté, la Ligue arabe, qui a indiqué suivre de près la situation en Egypte a appelé à respecter la volonté du peuple. L'organisation panarabe a exhorté toutes les parties à "préserver la climat pacifique des manifestations" et "bannir la violence sous toutes ses formes". Le président américain Barack Obama qui vient d'achever une tournée en Afrique a lui aussi invité "toutes les parties à faire preuve de retenue", et a exhorté son homologue égyptien à "faire en sorte que les voix de tous les Egyptiens soient entendues".