Les événements sanglants de Sakiet Sidi-Youcef, dont le 58ème anniversaire sera commémoré lundi, demeurent un "symbole éternel" du combat commun des Algériens et des Tunisiens pour que triomphent la liberté et la dignité, a recueilli l'APS dimanche à Souk Ahras auprès d'un universitaire. Le bombardement du village tunisien de Sakiet Sidi Youcef par l'armée française, un matin du 8 février 1958, a "conforté les liens déjà forts qui ont toujours marqué les relations entre les peuples algérien et tunisien", a indiqué Djamel Ouarti, de l'université Mohamed-Cherif Messaâdia. Soutenant que deux des Beys de la dynastie El Mouradia de Tunisie ont des liens familiaux avec la tribu Lahnancha de Souk-Ahras, cet universitaire a précisé que la Tunisie a de tous les temps constitué "une seconde patrie" pour les Algériens fuyant la barbarie de la soldatesque française. M. Ouarti a rappelé que déjà en 1843, le cheikh El Hasnaoui Benbelkacem El Hannachi avait trouvé refuge en Tunisie, après une résistance farouche contre l'occupation française. Il a également soutenu que plusieurs familles issues des tribus d'Ouled Soukias, Laouaid, Lahnancha et Tifeche se sont exilées en Tunisie durant le soulèvement des Keblouti et des Sbaihia, en 1871. Pour cet universitaire, le bombardement de Sakiet Sidi Youcef avait illustré la "faillite politique française" qui a débuté, selon lui, par la décision de la France de "s'inventer", en 1956, un droit de poursuite pour traquer les unités de l'Armée de libération nationale (ALN) installées en Tunisie. 25 bombardiers français pour anéantir un village paisible M. Ouarti, évoquant "un plan orchestré", a ajouté que les agressions françaises du territoire tunisien ont commencé bien avant le 8 février 1958, détaillant que la région de Sakiet Sidi Youcef avait déjà subi plusieurs assauts français, dont ceux perpétrés en octobre 1957. Evoquant la journée du samedi 8 février 1958, il a précisé que ce même matin, à 9 heures, un avion français qui survolait la région de Sakiet Sidi Youcef, touché par un tir, s'est posé en catastrophe à Tébessa. Et à dix heures précises, l'armée française donna l'assaut sur le village. Sakiet Sidi Youcef, implantée sur une colline, fut bientôt survolée par une vingtaine de bombardiers et de chasseurs français qui "brisèrent dans un vacarme assourdissant le calme du village", indique le même universitaire, rappelant que le bilan fut "lourd, très lourd". Pas moins de 79 habitants du village, tous des civils, furent tués. Parmi eux, il y avait 20 enfants et 11 femmes, sans compter des blessés, 130 ont rapporté des témoins. Tous les équipements publics de Sakiet Sidi Youcef, y compris la base de la Croix rouge internationale, furent rasés. Le plan du bombardement a été arrêté par le colonel Marguet, sous-chef d'état-major de la 10ème région, sur la base des photos que le ministère français de la défense a acquis auprès d'un photographe anglais, a poursuivi l'universitaire. L'opinion internationale choquée "La France avait mésestimé l'ampleur de cette lâche attaque contre des civils dont des enfants et des vieillards", commente M. Ouarti, affirmant que les écrits journalistiques de reporters de la presse étrangère, au lendemain de l'attaque, ont "réellement choqué l'opinion internationale". Les Etats-Unis ont décrit le bombardement français comme un "acte fou" et l'Ex-Union Soviétique a évoqué un "acte désespéré" à travers lequel la France a tenté de réduire la révolte du peuple algérien et de "casser" la solide relation entre les peuples algérien et Tunisien, selon M. Ouarti. Selon le président de l'Association des grands invalides de la guerre de Libération, Tayeb Sedira, ce 8 février 1958 avait coïncidé avec l'afflux de réfugiés algériens à Sakiet Sidi Youcef pour recevoir des aides du Croissant rouge tunisien et la Croix rouge internationale. Ces réfugiés, précise-t-il, ont été surpris de voir des bombardiers français planer sur le petit village avant que les bombes n'anéantissent le village paisible et ses habitants. Le moudjahid rappelle que la riposte brutale de l'armée française à Sakiet Sidi Youcef avait été précédée, le 11 janvier 1956, par la bataille de Djebel Ouasta au cours de laquelle l'armée française avait subi de grandes pertes.