Le désormais ex-président afghan Ashraf Ghani qui a fui vers le Tadjikistan, a reconnu la victoire des talibans qui ont pris dimanche soir le contrôle de Kaboul au terme d'une offensive éclair, alors que des milliers de personnes dont des diplomates et des ressortissants étrangers, tentaient lundi de quitter le pays. Vingt-ans après leur chute, les talibans ont investi dimanche soir le palais présidentiel à Kaboul, et y ont célébré leur victoire, que le président Ghani a reconnue: "Les talibans ont gagné avec le jugement de leurs glaives et de leurs fusils et sont à présent responsables de l'honneur, de la possession et de l'auto-préservation de leur pays". L'ex-président qui se trouve actuellement au Tadjikistan, a dit avoir quitté l'Afghanistan pour éviter un "bain de sang", car "d'innombrables patriotes auraient été tués" et la capitale "aurait été détruite". Pour sa part, un porte-parole des talibans, Zabihullah Mujahid, a confirmé dimanche soir sur Twitter: "Des unités militaires de l'Emirat islamique d'Afghanistan sont entrés dans la ville de Kaboul pour y assurer la sécurité". Un autre porte-parole des insurgés, Suhail Shaheen, a par ailleurs, déclaré à la chaine britannique BBC qu'ils escomptaient un transfert pacifique du pouvoir "dans les prochains jours". En dix jours, le mouvement des talibans qui avait déclenché une offensive en mai à la faveur du début du retrait des troupes étrangères, notamment américaines, a pris le contrôle de quasiment tout l'Afghanistan, et ce vingt ans après en avoir été chassé par une coalition menée par les Etats-Unis. S'agissant de la situation qui prévaut actuellement dans la capitale afghane, des médias ont rapporté que des milliers de personnes tentaient de fuir le pays à l'aéroport de Kaboul, la seule porte de sortie du pays. Et des vidéos publiées sur les réseaux sociaux montraient des milliers de personnes attendant sur le tarmac même, et des grappes de jeunes hommes, surtout, s'agrippant aux passerelles ou aux escaliers pour tenter de monter dans un avion. Les forces américaines ont même tiré en l'air pour tenter de contrôler cette foule. En raison de la situation chaotique à l'aéroport, l'autorité aéroportuaire de la capitale a annoncé que les vols commerciaux en partance étaient annulés. Les rues de la capitale étaient en revanche plutôt calmes, largement patrouillées par des talibans en armes, notamment dans la "Green zone", auparavant ultra-fortifiée qui abrite les ambassades et les organisations internationales. Par ailleurs, le drapeau américain a été retiré tôt lundi de l'ambassade des Etats-Unis à Kaboul et "mis en sécurité avec le personnel de l'ambassade" regroupé à l'aéroport dans l'attente d'une évacuation, ont annoncé depuis Washington le département d'Etat et le Pentagone. Dans ce contexte, les Etats-Unis et 65 autres pays ont, dans communiqué commun, appelé les talibans à autoriser les citoyens afghans et étrangers à fuir l'Afghanistan, et avertit les rebelles qu'ils devaient faire preuve de "responsabilité" en la matière. -- Le retour au pouvoir des talibans débattu à l'étranger -- Les derniers développements intervenus en Afghanistan seront passés en revue ce lundi lors d'une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies. Dans sa réaction face à la prise de pouvoir par les talibans, le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, "particulièrement préoccupé par l'avenir des femmes et des filles, dont les droits durement acquis doivent être protégés", a appelé toutes les parties au conflit à "la plus grande retenue". Il a ajouté que les Nations unies restaient "déterminées à contribuer à un règlement pacifique du conflit". Pour sa part, l'ambassadeur de Russie à Kaboul Dmitri Jirnov compte rencontrer les talibans mardi, a annoncé l'émissaire du Kremlin pour l'Afghanistan, Zamir Kaboulov, précisant que Moscou allait décider de reconnaître ou non le nouveau pouvoir afghan en fonction de ses "agissements". La vitesse à laquelle les talibans ont pris le pouvoir a été "une surprise" pour la Russie, a reconnu M. Kaboulov. "Nous avons sur-estimé les forces armées de l'Afghanistan", a-t-il ajouté. "Et ils ont tout lâché dès le premier tir". La situation en Afghanistan a été dimanche au centre d'une réunion d'urgence présidée par le Premier ministre britannique Boris Johnson qui a estimé que la décision des Etats-Unis de se retirer d'Afghanistan avait "accéléré les choses". "Personne ne veut voir l'Afghanistan devenir un berceau du terrorisme", a-t-il ajouté. Le ministre britannique de la Défense Ben Wallace a, quant à lui, qualifié lundi le retour au pouvoir des talibans en Afghanistan comme un "échec de la communauté internationale" et averti que ce n'était "pas le moment" de reconnaître les talibans comme gouvernement officiel du pays. Ben Wallace avait déjà qualifié auparavant la décision des Etats-Unis de retirer leurs forces militaires d'Afghanistan d'"erreur". Et il est attendu que le Parlement britannique débatte mercredi de la réponse que Londres doit apporter à l'évolution rapide de la situation en Afghanistan.