par El Yazid Dib Un jeudi quelconque. Que faire ? Aller encore voter ou écouter une histoire. Quel talentueux maître que la mère patrie ! Ecoutons. Que pouvons-nous tirer comme dividendes de l'élan produit par la campagne électorale 2009. Ne devrions-nous pas en décrypter des symboles tracés en nouveaux hiéroglyphes sur le front d'une Algérie qui, une fois encore, rugit qu'elle n'est l'exclusivité de personne ? Encore moins d'un, de deux ou de trois partis. « L'Algérie n'appartient pas à une ou à un groupe de personnes ! », avait dit le président-candidat *. Pour dire enfin qu'elle est un tout d'homme et un tout de femme de bonne famille. Qu'elle ne se gère pas uniquement par des nominations intuite-personnae ou par la théorie des grands équilibres financiers. Elle se fait, espérance, aspirante, cahin-caha, dans la douleur joyeuse et optimiste. En combien de temps, se sont faites les grandes civilisations que connaît le monde ou qu'avait connues l'humanité ? 132 ans d'emprisonnement, 07 ans de sang, des décennies et des décennies, des rouges et des noires puis des rouges se sont agglutinés telles des ecchymoses, sans parvenir, fatalement, à égratigner ni l'âme ni les fibres de ce corpus aux maladies pourtant endémiques et cycliques. Notre pays, dans sa définition constitutionnelle, ne peut s'identifier seulement à ce territoire, ayant un peuple et des pouvoirs publics. Le passé commun de ses habitants, l'unicité de la langue et de l'uniformité de la religion ne sont pas les éléments essentiellement constitutifs de sa sève et de son entrain. Ce qui prouve la survivance de ce peuple ne peut se contenir dans des chartes ou dans des constitutions faites et défaites au gré des commodités des uns et des incommodités de ces mêmes « uns ». Les autres étant une quantité insignifiante. Les calamités, analysées par une différente phénoménologie, se définiraient en « miskh » ou « khisf ». Ainsi, elles s'interprètent certes en des arrêts dont nul conseil constitutionnel ne pourrait en déclarer l'illégalité ou l'anti-constitutionnalité. Dans tous les cas, la part participative de l'élément humain, héritier potentiel dans l'espace terrestre, demeure, dans la réunion des conditions de sa survenance, entière, responsable et capricieuse. Cette lecture des choses renferme bien des aspects à débroussailler, comme elle appelle par ailleurs, toute une lecture dirigée, savante et intuitive. A travers sa campagne, sa réalité, ses ruelles, ses monts et piedmonts, l'Algérie semble nous avoir magistralement fait, sous le titre « des dix commandements » le cours suivant : 1/Bien, bravoure et bonheur : mes enfants ! Ce sont ces mots et leur amplitude que vous devrez supputer, remâcher et rabâcher ! Le bien c'est lorsque, penser à extraire le mal des parois de vos coeurs, vous prend à chaque sursaut qui vous secoue à l'appel perçant et lointain émanant du fond de mes entrailles ! Mes souffrances ne sont jamais venues perturber le sommeil de vos « justes », ou déranger le repos de vos « guerriers », je les accomplissais dans un silence que seul, le désir de vous rendre heureux et d'étendre sur vos jours le bien et l'amour, venait me les faire évoquer. Je tisse, pour vous depuis l'ère des temps de mes mains ankylosées, par le givre inter-séculaire, des burnous, des haïk et des tapis. Je crains la nuit qui tombe chaque nuit sur vos mondes différents. Je vous couvre par ma grâce intarissable puisée des aïeux de vos ancêtres. Je n'aspire qu'à vous distiller le bonheur et la joie, les bruines et les neiges. Vous, mes braves enfants ! Saisissez mon appel et ne cessez de répandre dans vos fissures le baume de l'union et de la fraternité. Votre bien-être est dans la force du caractère, il n'en résultera ni vertige ni épuisement. Votre force est dans la sécurité dont nul trouble ne viendra altérer la joie et la félicité. 2/Obéissance, Ouma et oeil du maître : n'ayez d'oeil que pour celui qui n'a d'yeux que pour vous ! Faites du maître, ce guide impartial, juste et craintif des châtiments que je m'empresserais d'en faire abattre sur lui et sur sa dynastie. L'obéissance est une vertu quand l'ordre en est une autre ! C'est là où la gloire soit exaltée, et la prédication exaucée. La ruse malveillante n'encercle que ses initiateurs et tout pourfendeur périra dans la profondeur de l'abîme qu'il a malicieusement fait. N'ayez crainte mes enfants, les âmes que vous croyez mortes sont là, éveillées et sans aucune tristesse, elles scrutent vos jours et s'élèvent somptueuses aux lueurs de vos nuits. Vous formez déjà une Ouma dont les liens ne se renforceraient que si vous pouviez atteindre ce degré sublime d'éviter la satisfaction jugée illicite au moment où le vouloir d'attachement à l'obscénité vous est impérieux. 3/ Utilité, unité et universalité. La lutte continue contre les multiples concupiscences qui risquent de vous emporter et dans la déraison pour vous, provoquer la scission, l'horreur et l'instabilité mémoriale. Soyez utiles envers vous ! Faites à ce que le plus faible d'entre vous soit le plus justement rétribué, et le plus tyran soit le plus justement châtié. La famille n'est pas un simple nom patronymique ni une identification sanguine similaire et groupée. Vous êtes une entité familiale, un Etat familial, et non un Etat de familles ou une famille d'Etat ! L'unité c'est votre abreuvoir et votre mangeoire. Votre cellule ne peut toutefois se recroqueviller ni s'abstenir d'évoluer au rythme où évolue le cosmos qui vous entoure. Ouvrez-vous ! L'espace est indéterminé et les lumières, qui inondent les mondes, illuminent même les recoins les plus enfouis. Sachez faire dans l'universalité ce que vous faites de bien dans vos pensées et intimités. 4/ Takfil, tradition et témérité. Vous êtes des enfants pleins de hardiesse et de courage. Employez vos dons et talents dans l'émotion salutaire ; cette sensation qui chasse la tristesse des coeurs et les apure des états de confiance illusoire. Vous n'êtes pas néanmoins le nombril du monde. Ne vous encombrez pas davantage de la pleine suffisance ou de l'excès d'assurance. Demain c'est demain ; il arrivera avec ou sans vous. Le takfil, cette haute notion de responsabilité deviendra pour vous un credo quotidien de remise en question journalière de vos actes et vos dispositions. Vous êtes responsables autant que vous dites que ce sont les autres qui le sont. La vigilance de tous est instantanée à l'égard du mal, de l'interdit et de l'insolant. Les jours et les jours qui ont vu se concevoir et naître ceux qui ont vu se concevoir et naître ceux qui vous ont vus vous concevoir et naître, sont tel un livre qui, dans aucun cas, la folie de s'en détacher de sa lecture, ne vienne vous égarer. Toute votre vie est là. Tradition après tradition, la vie se forme, se déforme et se reforme. L'alternative est la loi. L'oubli est votre loi. 5/ Eloquence, énergie et élite. Le fruit du bien se cultive au seuil de vos portes. Vos souffrances séculaires et vos horreurs décennales ne peuvent venir à bout de vos énergies. Assainissez vos rangs ! Semez la clémence d'abord dans vos cœurs ; à l'intérieur de vos demeures. L'étranger observateur est un examinateur à charge dans vos peines et soucis. L'éloquence pour vous est une parole facile tantôt amère tantôt douce, comme elle fut pour vos racines ; tantôt une lutte tantôt une mort. Le verbe est donc le vôtre, le livre votre verbe. Soyez l'élite, la meilleure progéniture pour le meilleur géniteur ! La vérité n'est pas tout le temps dans la beauté du mot, l'emphase peut être une dérive et un bruit dans l'esprit de qui la pratique. Ecoutez et prenez le bien de vos parleurs, pardonnez et rejetez la voix tendancieuse, sentencieuse et malicieuse. Le démon se pare se dore et s'efforce de paraître, devant vous ou en vous ; beau, tendre et fort éloquent. 6/ Fadhala, fatiha et forkane. Ce qui doit vous distinguer l'un par rapport à l'autre, ce n'est ni la corpulence ni l'opulence et encore moins l'éloquence. C'est tout simplement un coeur d'innocence, immense, et en transe. Il n'est pas de partenaire plus prompt à honorer les privilèges et plus empressé d'offrir ses grâces et ce, sans nuls frais, que l'éloge et la louange à qui de foi et de droit. La sainteté devrait envahir vos demeures et se perpétuer, éternelle en vos veines, annihilant tour à tour vos chagrins et vos peines. 7/Loyauté, légalité et légende. Le mépris de ce monde écrase la vénération et l'adoration d'autres Dieux. Votre dévouement à mon égard et le nôtre ensemble à l'égard de l'unique Dieu, nous emmène confiants, et heureux vers les hautes voies au sommet de la réussite éprouvée. La loyauté ne saurait se contenir dans l'expression verbale de foi, mais contiendrait rectitude, servitude et certitude dans l'acte de foi. Votre histoire transperce en triomphe, les annales de l'ignorance et de l'incroyance. Les guerres ainsi menées étaient pour vous les plus beaux fruits et les boissons les plus exquises. 8/Islam. Ce sont les préceptes avérés de la Miséricorde qui devraient tisser vos liens. La clémence n'est pour vous qu'une autre disposition constitutionnelle non écrite mais retransmise de père en fils et non au nom du père ni du fils ni d'un autre esprit saint soit-il. Le prêche dans vos mosquées visera droitement la sainteté dans vos transactions, loin de l'éloge d'un crime, d'un attentat ou d'une perversion sociale. Faites vos ablutions sans trop user de la manne hydraulique, faites vos prières sans trop vouloir forcer les destinées. Ne violez pas les portes fermées, fussent-elles du paradis. N'ouvrez pas sur vos faciès les vantaux de la géhenne en croyant ne pas attiser l'ardeur des flambeaux ! Soyez mes enfants, enfants fidèles. 9/Khassiyat, khalifat. Vous ne disposez pas chez vous de Khédive, de Khan ni d'autres dignités auto-dogmatiques. Votre seule caractéristique se trouve dans votre soumission au maître, à qui toute volonté n'est qu'acquise et toute résistance n'est que compromise. Celui qui élève les cieux sans pieux et non celui qui oserait semer les épieux dans le chemin des pieux. Le khalifat s'est perverti voilà des lustres. L'usure l'aurait érodé comme la rouille érode le fer. Votre khalifat sort des urnes lorsque vos urnes ne tromperont plus vos mains. Il sera pour vous le juste sincère, un roi sans airs et un guide tel un père. Il consolidera les méritants dans la droiture et invoquera, sans cesse, l'invoqué. Faites en sorte qu'il ne pourra léguer ni bien ni moyens, mais un seul patrimoine commun, inaliénable et impérissable : l'impression en vous de la vénération de la sagesse, de la science et du bon sens. Dites-vous que même avec ou sans khalifat, posséder la science c'est posséder la force et le nombre, c'est être sobre et noble. 10/ Algérien, amour et azm. La décence et l'humilité sont le nid de l ‘amour. Le détenteur de cette faculté d'aimer et de chérir son proche ne pourrait se rendre coupable de mal ou de perversité. La haine expose son auteur à la corruption de l'âme et à la déperdition du bienfait. Il sera pris par le désir malsain de nuire et de détruire ce que la nature lui offrit de prestigieux, de merveilleux et de glorieux. La vie, la beauté et le bien. Algériens ! Mes enfants, pensez à vos blés durs, pansez vos blessures, pesez vos mesures, omettez à jamais vos rancoeurs et remettez à zéro vos compteurs ! Le azm, cette volonté vous est habituelle, quand pardonner devient un salam national et général. Le cours en acrostiche là, prend fin. La classe quitte la classe dans un brouhaha de circonstance. La cour, à la récréation, fusionne de jeux et d'enjeux. Dieu fasse que cette terre soit vraiment forte, citoyennement digne et incontestablement sereine ! ——————————————————————————– * Bouteflika, lors de son dernier meeting populaire dans le cadre de la campagne électorale, tenu à la coupole. Alger le 06 avril 2009. Jeudi 9 avril 2009