Sous l'égide des Nations unies, le gouvernement yéménite et la rébellion entameront, jeudi à Genève, des consultations, ont rapporté hier des médias citant des responsables yéménites. Durant ces séances, la question d'un échange de prisonniers sera probablement évoquée. Le ministre yéménite des Affaires étrangères, Khaled Al Yemani, a déclaré que les réunions ne donneraient «pas lieu à un face-à-face» et que leur évolution dépendrait de «la manière» dont l'envoyé de l'Organisation des Nations unies (ONU) «les mène avec les deux parties». «Les consultations seront indirectes, à moins que des progrès soient réalisées rapidement», a confirmé un membre de la délégation à Genève, Abdallah Al Olaïmi, et chef de cabinet du président Abd Rabbo Mansour Hadi, exilé à Riyad. Le gouvernement a déclaré ne pas attendre grand-chose des réunions de Genève, reprochant aux Houthis de refuser de faire des concessions. «Nos attentes se limitent à la possibilité de progresser sur la question des prisonniers», a indiqué Al Yemani. Et d'ajouter : «Je crois possible d'obtenir la libération de détenus et je crois que l'autre partie y est également disposée.» D'après une source gouvernementale yéménite, la délégation exigerait la libération de 5000 prisonniers et les rebelles de 3000 de leurs combattants. Les discussions devraient également porter sur la ville portuaire de Hodeïda (ouest), tenue par les rebelles et visée par une offensive gouvernementale en juin. L'opération, qui a suscité la crainte d'une nouvelle crise humanitaire, a été stoppée pour donner une chance aux pourparlers de paix. En juillet, le gouvernement yéménite a présenté la libération de prisonniers comme une condition pour reprendre les négociations de paix. Le médiateur de l'ONU, Martin Griffiths, a expliqué que les consultations visent à explorer les moyens de relancer des négociations au point mort depuis 2016. «L'objectif de cette première série de consultations est de mieux cerner à quel point les deux parties sont prêtes à s'engager pour négocier dans le cadre fixé par le Conseil de sécurité de l'ONU», a déclaré de son côté le porte-parole des Nations unies, Stéphane Dujarric. La guerre au Yémen a fait quelque 10 000 morts depuis 2015, quand la coalition arabe menée par l'Arabie Saoudite intervient pour neutraliser les rebelles houthis qui, en conflit contre les autorités centrales, ont occupé de vastes territoires du pays, dont la capitale Sanaa. «Erreurs» et«crimes de guerre» Samedi, ladite coalition a reconnu des «erreurs» dans une frappe menée par ses avions le 9 août dans la province septentrionale de Saada, fief des rebelles, et qui a tué 51 personnes dont 40 enfants, selon le Comité international de la Croix-Rouge. Le raid a visé un bus transportant des enfants sur un marché très fréquenté de Dahyan, selon les rebelles. La coalition a affirmé que le bus transportait des insurgés mais reconnu des «dommages collatéraux» et annoncé l'ouverture d'une enquête. Rendant les conclusions de cette enquête lors d'une conférence de presse à Riyad, le porte-parole de la commission chargée des enquêtes au sein de la coalition, Mansour Al Mansour, a de nouveau affirmé que le bus transportait, selon des informations des services de renseignement, «des leaders houthis» et que certains rebelles ont péri. Mais la frappe a aussi «causé des dommages collatéraux», a-t-il ajouté, allusion à la mort des enfants, et les responsables doivent être «punis». L'une des «erreurs» est qu'«un ordre avait été donné pour ne pas cibler le bus qui se trouvait au milieu de civils, mais cet ordre est arrivé en retard», a soutenu le responsable saoudien. Une autre «erreur» est que «la cible ne constituait pas un danger immédiat et que cibler le bus dans une zone résidentielle n'était pas justifié à ce moment-là». Dans un communiqué publié après la conférence de presse, la coalition a de nouveau admis «des erreurs dans les règles d'engagement». Elle s'est en outre «dite désolée pour ses erreurs et a présenté ses condoléances aux familles des victimes». «Le commandement de la coalition accepte les conclusions de la commission d'enquête et dès la réception officielle de ces résultats, il prendra toutes les mesures nécessaires pour punir ceux dont la responsabilité sera confirmée dans ces erreurs», selon le communiqué. La coalition a reconnu plusieurs bavures au Yémen, mais accuse régulièrement les Houthis de se mêler aux civils ou de les utiliser comme boucliers humains. En août, une mission d'experts de l'ONU a affirmé, dans un rapport, que toutes les parties prenantes au conflit ont potentiellement commis des «crimes de guerre». Elle a souligné que les frappes de la coalition ont «causé le plus de victimes civiles directes», touchant des zones résidentielles, des marchés et des installations médicales. La coalition a rejeté les conclusions du rapport qui, selon elle, «ne mentionne pas le rôle de l'Iran dans la poursuite de la guerre et son soutien continu aux Houthis». Téhéran reconnaît soutenir les Houthis, mais nie leur fournir une aide militaire. Après la frappe du 9 août, des responsables de l'ONU ont ensuite accusé la coalition d'avoir mené deux raids qui ont tué 26 enfants et quatre femmes le 23 août dans la région d'Al Douraïhimi, à l'ouest, tenue par les rebelles. La coalition a réagi en accusant des responsables de l'ONU de faire le jeu des rebelles.