Avant de fermer les yeux pour l'éternité, Akram avait eu le temps de lever ses 2 bras en un geste instinctif de survie. La première personne venue à son secours affirme ne jamais oublier les yeux innocents de cet adolescent exprimant l'incompréhension, le pourquoi d'une mort qui l'a fauché. Ce secouriste et d'autres qui avaient accouru à partir du siège de la direction de l'agence foncière avaient entendu le long crissement des pneus et le choc du fer contre le corps mou du petit Akram. Ils avaient vu le fourgon, sous la vitesse excessive transformé en bolide, s'arrêter plusieurs mètres plus loin après avoir percuté Akram. Ce petit garçon aux yeux rieurs très respectueux vis-à-vis de ses camarades et du voisinage. Celui que ses professeurs, ses camarades de classe et ses copains de quartier appelaient le génie des mathématiques. Ces secouristes ne comprenaient pas que sur ce boulevard très fréquenté par les automobilistes et les piétons, un conducteur ne pouvait pas voir ces grandes plaques de signalisation routière. Deux d'entre elles, placées bien en vue, portent une limitation de vitesse à 40 km, deux annonçaient le passage piéton et d'autres des ralentisseurs. Akram est mort sur le coup, tué par un conducteur. Ce n'est que bien plus tard que ce dernier, qui se serait enfui avec la voiture, ira se présenter aux policiers de l'arrondissement du quartier. Un automobiliste avait réussi à prendre note de son immatriculation. Le corps d'Akram était resté là sous la plaque limitant la vitesse à 40 km. Elle paraissait narguer les secouristes. Surtout le zéro qui prédisait déjà la suite de cet accident à l'origine d'un début de folie de sa mère. Plusieurs semaines après ce drame, elle n'arrive toujours pas à se consoler de la perte du seul chérubin qui égayait ses jours et ses nuits. Ce samedi, la justice a statué à Annaba. Le conducteur du bolide, âgé de 24 ans, a été condamné à 3 mois de prison ferme et à 6 mois de suspension de permis de conduire. A l'écoute de cette condamnation, plusieurs camarades d'Akram, qui avaient séché les cours pour assister au procès, ont pleuré à chaudes larmes. Choqués par le décès brutal de leur camarade, certains avaient mis plusieurs semaines pour rejoindre les bancs de l'école. D'autres ont juré de ne plus traverser ce boulevard mortel, car, ont-ils estimé, ni les plaques de signalisation ni aucune structure de la République n'est en mesure d'assurer leur sécurité. Outre la grande photo de leur défunt camarade bien mise en relief dans leur établissement scolaire et pour être fidèle à son dernier cri, ils ont créé le club Akram Berkane de protection des piétons.