Le spectre d'une rupture imminente de l'approvisionnement en lait pasteurisé en sachet plane de plus belle sur la wilaya de Mila, où l'unique producteur, en l'occurrence Eurl-Grouz, couvre à lui seul 60% des besoins de la consommation. Le patron de Grouz-Lait, Abdenacer Benhacine, dira à cet effet que les mesures d'urgence, décidées par l'Etat pour juguler la crise du lait, se sont avérées insuffisantes face à l'envolée vertigineuse de la poudre de lait, qui est passée, de novembre 2006 à fin 2007, de 3 700 à 6 000 $/tonne sur le marché international. A ce propos, A. Benhacine expliquera ceci : «Cette spirale inflationniste nous met dans l'incapacité de continuer à produire, puisqu'aucune solution n'a été apportée à l'asphyxie financière que nous endurons. La subvention des pouvoirs publics, relative aux mois d'octobre, novembre et décembre, n'a pas encore été honorée. Bref, tous les ingrédients, nous incitant à l'arrêt définitif de la production, sont réunis». Et d'ajouter: « Il est dès lors légitime que notre démarche s'inscrive en droite ligne avec les résolutions adoptées le 15 décembre dernier par la fédération nationale de l'industrie agroalimentaire de la CIPA quant à un éventuel arrêt d'activité par les producteurs et transformateurs de lait». La rupture des stocks de sécurité de poudre de lait, la non-prise en charge de la proposition de revalorisation du différentiel sur le prix du lait en sachet administré, l'épuisement des sources financières des producteurs et transformateurs, et les défaillances de l'office national interprofessionnel du lait (ONIL) dans la mise à disposition de la matière première sont les autres griefs consignés dans le communiqué résultant de la réunion qui a regroupé, à Alger, les délégués régionaux de la filière lait. A Mila, les prémices d'une crise aiguë du lait en sachet pasteurisé sont réelles et palpables. Les seuils de production de Grouz-Lait qui, en 2006 et au début de l'année 2007, se situaient entre les 80 000 et les 100 000 l/j, ont drastiquement chuté, pour avoisiner à peine les 20 000 l/j, provenant essentiellement de la collecte de lait de vache. Le label «Orelait» et les quelques marques Rhummel, Stilina et Bakarat Ech-Chark, qui se taillent 30 à 40% du réseau d'approvisionnement, atténuent certes, un tant soit peu, les effets d'une crise patente, mais force est de constater que la pression sur le lait en sachet se fait sentir de plus en plus. La résorption de la crise récurrente du lait à Mila passe inévitablement par le règlement du lancinant problème du foncier agricole et l'urgence de la mise en œuvre d'une politique nationale, privilégiant l'investissement de l'élevage de vaches laitières. Or, force est de constater que la subvention de l'Etat, allouée à ce titre, soit 13 DA/l, répartis entre l'éleveur, 7 DA, le collecteur, 4 DA, et 2 DA à l'unité de transformation, est aussi inéquitable que dérisoire. «Le mieux serait, urgence oblige, que les décideurs planchent pour une subvention de 15, 6 et 5 DA, respectivement, au profit de ces trois intervenants afin d'éviter que la crise sur ce produit stratégique ne s'attise davantage», a conclu notre interlocuteur, dont l'unité de production, qui tourne actuellement à 20% de ses capacités optimales, est sous la menace imminente d'un arrêt définitif de ses activités.