La situation en Afghanistan n'a jamais été aussi dangereuse depuis que le retrait des troupes internationales de ce pays n'est plus qu'une question de calendrier, la décision ayant été entérinée au dernier sommet de l'OTAN tenu au mois de novembre 2010 au Portugal. Ou encore qu'il est de plus en plus question d'une solution négociée impliquant les talibans chassés du pouvoir au mois de novembre 2001. Relancer une telle approche largement récusée il y a bien des années, pourtant aussi bien par les Etats-Unis que les autres pays membres de la coalition, devrait expliquer l'échec de l'approche strictement militaire. La porte-parole du département d'Etat, Victoria Nuland, a rappelé lundi que les Etats-Unis étaient favorables à un processus de réconciliation «mené par les Afghans», et à condition que les «réconciliés» renoncent à la violence, et acceptent la constitution afghane ainsi que les droits de l'homme. Dans un autre registre, les talibans multiplient quant à eux les opérations armées, jusque dans la capitale afghane, cherchant, selon des spécialistes, une victoire militaire. En ce sens, la guerre n'a jamais été aussi intense. Hier encore, les talibans ont attaqué le quartier général de la force internationale de l'Otan (Isaf) en plein centre de Kaboul. Selon des sources concordantes, un déluge de feu s'est abattu sur ce périmètre supposé inattaquable et infranchissable. Ce qui renvoie alors à la sécurité d'une manière générale sur l'ensemble de l'Afghanistan, et il n'est pas difficile de conclure qu'elle est absente, du moins défaillante. Et dans ce même cadre, la relève de la force internationale qui manque au moins de présence, sinon d'efficacité. Ce qui pose le plus sérieux des problèmes, celui relatif à l'avenir de l'Afghanistan après le retrait en 2014 des forces de la coalition internationale. Il n'est alors pas exclu que ce pays sombre à nouveau dans une guerre opposant les Afghans entre eux. Une hypothèse basse selon certains analystes, persuadés que rien d'ici cette date n'empêchera le retour des talibans. A quoi donc aura donc servi une guerre de dix années, si sa fin signifie le retour à la case départ ? Plus grave encore semble être la multiplication de forces d'opposition après que l'armée américaine eut accusé lundi le réseau Haqqani d'être responsable de l'attentat perpétré samedi à l'aide d'un camion piégé contre une base de l'Otan en Afghanistan qui a fait plus de 100 blessés, dont 77 soldats de la coalition. Les talibans ont revendiqué l'attentat. Le réseau Haqqani est affilié aux talibans et est soupçonné d'avoir organisé plusieurs attaques spectaculaires ces dernières années, notamment dans la capitale Kaboul. Cette recrudescence des attentats intervient alors que par ailleurs, Washington soutient un projet consistant à ouvrir un bureau de représentation pour les talibans au Qatar d'ici la fin de l'année, afin d'autoriser des pourparlers de paix officiels. Cette étape doit permettre des progrès dans les discussions préliminaires avec les talibans, menées par Washington avec notamment l'implication de la Grande-Bretagne, afin de faciliter le processus de réconciliation avec le gouvernement afghan, ce qui veut dire que la voie de la négociation n'a jamais été abandonnée en dépit des attaques des talibans, sauf à croire que ces derniers entendent prouver qu'ils ont le contrôle du terrain, contrairement aux forces du président afghan Hamid Karzai, et qu'ils sont donc en position de force. La suite pourrait alors être plus tragique.