Bandes de rats.» La blogosphère algérienne n'aura pas attendu le coup de sifflet final du match Algérie-Libye pour sortir l'artillerie lourde et, le moins qu'on puisse dire, très inélégante. La cible ? Les Libyens, dont l'équipe nationale de football a provoqué une bagarre générale à la fin de la rencontre. Dans un remake de la période de novembre 2009 et des «croisades» anti-égyptiennes, Photoshop aidant, les Algériens n'y sont pas allés avec le dos de la cuillère, quitte à aller très loin, trop loin même, dans l'insulte. «Les Fennecs écrasent les rats», commentaient de nombreux «facebookistes», faisant ainsi référence à l'insulte «djerdhane» dont affublait Mouammar El Gueddafi le peuple libyen contestataire. De même circulaient de nombreuses photos de rats arborant des drapeaux libyens, des caricatures montrant El Gueddafi en maillot algérien écrasant un rongeur ou des statuts insultants envers tout un peuple, qui paye pour le comportement d'un seul ressortissant. «Les forces de l'OTAN ne pourront pas sauver les rats face aux Algériens !», lance-t-on à l'envi. Ce manque de discernement et de retenue n'a pas été que le fait de citoyens lambda emportés par un excès de colère. Certains titres de la presse nationale ont même repris à leur compte, et en une, ces dérives qui ne sauraient être expliquées par la seule colère suscitée par une agression. Et les internautes algériens sont en passe de devenir «à la Toile» ce qu'ils sont «à la vie». Car en l'espace de quelques jours, ils ont fait montre, par commentaires sur les réseaux sociaux interposés, d'une rare violence verbale envers des «étrangers». L'une des autres personnes ciblées par cette xénophobie courante dans la société algérienne est Allain Jules, l'homme par qui la rumeur arrive. Ce dernier avait annoncé – au conditionnel – le décès de Abdelaziz Bouteflika. Illustration de propos racistes devenus presque «ordinaires» Les internautes se déchaînent et les commentaires suscités par ce post sur le blog personnel sont nombreux. Mais si les premières critiques, plus ou moins agressives, sont centrées sur l'aspect «professionnel» et n'ont trait qu'au fait en lui-même, à savoir la pertinence ou non de publier une telle information, elles auront vite fait de se transformer en insultes. L'élément déclencheur ? La publication de la photo d'Allain Jules. Et le professeur et journaliste est d'origine camerounaise. Ce qui déclenche une avalanche de réactions plus violentes les unes que les autres. Insultes racistes que le blogueur ne manque pas de répertorier : «Avec ta sale couleur» ; «Sale nègre» ; «Tu es sale comme ta couleur»… «Un petit florilège qui m'a bien fait rire de bon cœur comme à mon habitude. J'ai surtout ri de ceux qui me traitaient de sale nègre et les mêmes qui se réjouissaient des exploits du gardien nègre des Fennecs, Adi Raïs M'Bolhi-Ouhab. Comme le dit Claire Martin, ‘le racisme est bien l'infirmité la plus répugnante parmi les diverses laideurs de l'humanité'», commente-t-il dans un écrit publié sur son blog. Ce qui peut paraître un cas isolé, voire anecdotique, est symptomatique d'un état d'esprit et de réflexes amplement propagés dans la société, toutes franges confondues. Et ces «polémiques» illustrent parfaitement une réalité tangible pour des milliers d'étrangers ou de personnes «différentes» vivant en terre d'Algérie. Il y a péril en la demeure, l'intolérance et le racisme gagnent du terrain.