Un véhicule piégé a explosé au moment où les fidèles sortaient d'une mosquée dans le quartier d'Al Sleimani, selon une source des services de sécurité. Une deuxième voiture a explosé 30 minutes plus tard dans le même périmètre, faisant plus de victimes parmi les services de sécurité et les civils. La porte-parole de l'hôpital Al Jala de Benghazi, Fadia Al Barghathi, a fait part de 25 morts et 51 blessés admis dans son établissement. Neuf morts et 36 blessés ont été admis dans un autre hôpital, le Centre médical de Benghazi, selon son porte-parole, Khalil Guider. Un précédent bilan faisait état de 22 morts. Le bilan pourrait encore s'alourdir, plusieurs blessés étant dans un état grave et d'autres victimes auraient été admises dans des cliniques privées. La mosquée, près de laquelle le double attentat s'est produit, est connue pour être un fief de groupes salafistes qui ont combattu les djihadistes à Benghazi aux côtés des forces de l'homme fort de l'Est libyen, le maréchal Khalifa Haftar. La ville de Benghazi, qui constitue le principal fief des révoltes qui ont provoqué la chute du régime d'El Gueddafi en 2011, est devenue une seigneurie de groupes djihadistes, avant que les forces proches de Haftar ne la reprennent. Ahmad Al Fitouri, un responsable des services de sécurité dépendant des forces du maréchal Haftar a été tué dans l'attentat, selon un porte-parole militaire à Benghazi, Miloud Al Zwei. Ces attentats ont lieu alors que le maréchal Haftar a annoncé à l'été 2017 avoir débarrassé Benghazi, à un millier de kilomètres à l'est de Tripoli, des groupes djihadistes après plus de trois ans de combats meurtriers. La ville de Benghazi a été particulièrement touchée par des violences visant notamment les représentations diplomatiques et les forces de sécurité. Une attaque contre le consulat américain, le 11 septembre 2012, a coûté la vie à l'ambassadeur Christopher Stevens ainsi qu'à trois autres Américains. Incertitudes Le maréchal Khalifa Haftar, qui ne reconnaît pas le Gouvernement d'union nationale (GNA) basé dans la capitale Tripoli, appuie un gouvernement parallèle qui exerce le pouvoir dans l'est du pays, face au GNA reconnu par la communauté internationale. L'Organisation des Nations unies (ONU) a défini un plan d'action qui prévoit notamment des élections en 2018, afin de tenter de sortir le pays de la crise. Mais leur rapprochement reste depuis laborieux et compromis par les incertitudes sur les intentions du maréchal Haftar, accusé par ses adversaires de vouloir prendre le pouvoir et instaurer une dictature militaire. Le 17 décembre dernier, il a déclaré, dans un discours télévisé, que l'accord politique libyen de Skhirat (Maroc), a expiré et avec lui le mandat du GNA appuyé par la communauté internationale. L'accord signé le 17 décembre 2015 sous l'égide de l'ONU prévoyait la formation du GNA pour un mandat d'un an renouvelable une seule fois. Le mandat du GNA, dirigé par Fayez Al Sarraj, n'a jamais pu obtenir la confiance du Parlement élu, basé dans l'est du pays et qui appuie le maréchal Khalifa Haftar ainsi qu'un gouvernement parallèle. Le maréchal Haftar a estimé dans son discours que la date du 17 décembre marquait «un tournant historique et dangereux» avec «l'expiration de l'accord politique libyen». «Tous les corps issus de cet accord perdent automatiquement leur légitimité contestée» déjà «dès le premier jour de leur prise de fonction», a-t-il dit. Il a indiqué avoir été «menacé de mesures internationales fermes» s'il prend des initiatives en dehors du cadre mis en place par la communauté internationale et la mission de l'ONU en Libye. «Nous annonçons sans équivoque notre obéissance totale au peuple libyen, maître (…) de son destin», a-t-il indiqué. Mais le Conseil de sécurité de l'ONU a prévenu quelques jours auparavant que l'accord de Skhirat «demeure le seul cadre viable pour mettre fin à la crise politique en Libye», en attendant la tenue d'élections prévues en 2018. «Son application reste une clé pour tenir des élections et finaliser une transition politique», souligne le Conseil dans une déclaration adoptée par consensus entre ses 15 membres, le 14 décembre 2017, «en rejetant les fausses échéances qui ne servent qu'à miner le processus politique facilité par l'ONU». Et d'ajouter : «Le Conseil de sécurité reconnaît le rôle important joué par Fayez Al Sarraj (…) comme ceux des autres dirigeants libyens qui promeuvent la réconciliation nationale.» Cela dit, «il n'y a pas de solution militaire à la crise» et «tous les Libyens doivent respecter le cessez-le-feu, comme le rappelle la déclaration conjointe» du 25 juillet dernier à Paris, ajoute-t-il. Sur une initiative de la France, Fayez Al Sarraj, basé à Tripoli, et Khalifa Haftar ont adopté une déclaration commune de sortie de crise, appelant notamment à l'organisation d'élections le plus rapidement possible. «Le Conseil de sécurité exhorte fortement tous les Libyens à redoubler d'efforts pour travailler ensemble dans un esprit de compromis et à s'engager de manière urgente et constructive dans un processus politique inclusif», est-il observé dans la déclaration. Et «tout nouveau retard ne fera que prolonger les souffrances du peuple libyen», a relevé le Conseil en encourageant les Libyens à progresser ensemble vers la rédaction d'une nouvelle Constitution libyenne. Le Conseil de sécurité a affirmé «l'importance d'unifier et de renforcer les forces armées libyennes sous une supervision civile» et «condamne les actes de violence récents en Libye».