Evoquer le parcours révolutionnaire des officiers, responsables des groupes armés, fedayin, djoundi ou responsables civils de l'ALN chargés de réorganiser l'action révolutionnaire à El Harrach « Zone I de la Wilaya IV », n'est certainement pas une tâche aisée. Elle est même délicate. Sauvegarder les témoignages de ceux qui ont vécu sur le terrain, batailles et embuscades, équivaut à un pénible travail de mémoire. Evoquer les noms et le parcours de ceux qui ont donné de leur vie pour l'indépendance de notre pays est certes une mission délicate. Certains sont tombés au champ d'honneur, certains sont décédés après l'indépendance, et d'autres sont toujours en vie. « C'est un premier contact afin de rassembler et de sauvegarder tous les témoignages de ceux, hommes et femmes, ayant fait partie de la cellule ALN d'El Harrach », confirme Mostefaoui Mahmoud, un des responsables des groupes armés chargés de réorganiser l'action armée dans ce quartier de la capitale. « L'histoire sera écrite par les hommes qui l'ont vécue » tient à ajouter notre interlocuteur, tout en précisant qu'un livre, détaillant l'action armée de la cellule ALN d'El Harrach « est déjà en préparation ». « Nous avons besoin des témoignages de tous nos compagnons de lutte afin de sauvegarder l'histoire et d'éviter les falsifications et les mensonges. C'est pour cette raison que nous avons jugé utile de publier les noms de ceux qui étaient membres de la cellule afin de faire le premier pas et d'entamer l'écriture de ce livre. » Ayant intégré les rangs des fedayin en 1957, Mostefaoui Mahmoud est appelé au service militaire par l'administration coloniale après l'aval de ses responsables Adel Malek Bidi et Harkat Mohamed. Il prend contact, de retour en Algérie en 1958, avec les moudjahidine et constitue un groupe de fedayin à El Harrach. De son côté, Bouteldji M'barek (dit Rabah) était un fedaï. Membre actif de la cellule ALN, il était chargé des refuges, des contacts et de l'approvisionnement. Notre interlocuteur se souvient toujours de Mme veuve Amirat, « une dame en fer ». Grâce à elle, « nous avons pu déjouer à plusieurs reprises l'ennemi français ». L'attentat du 11 novembre 1961 à la rue Noël l'Amoureux, au lotissement Michel, a coûté la vie à deux des officiers de la cellule, en l'occurrence Boujemaâ El Bekari et Boualem Meghraoui. « Les occupants du véhicule, au nombre de quatre, ont été mitraillés à bout portant sans la moindre sommation avec de l'artillerie lourde par les éléments du CRS lors d'un barrage », témoigne-t-on. Bouteldji M'barek, au volant du véhicule, blessé, subira les affres de la torture à la caserne du Génie (Hussein Dey), et ce, pendant une semaine avant d'être transféré à l'hôpital militaire Maillot, puis à la prison de Serkadji jusqu'en 1962. Mme veuve Amirat, nous dit-il, faisait partie de la cellule ALN puisque sa demeure située à Hydra servait de refuge aux membres de l'ALN. La famille du martyr Boualem Meghraoui, nous dit-on, avait elle aussi transformé la demeure, située dans la dechra Remili, à Larbaâ en un lieu de rencontres et de réunions des moudjahidine. Pour nos interlocuteurs, l'installation de la cellule ALN chargée de réorganiser l'action révolutionnaire à El Harrach « Zone I de la Wilaya IV » est venue suite à un conseil de zone de la Wilaya IV dirigée par le capitaine Abdelhamid Tata dit Cheikh. Suite à cela, trois responsables de l'ALN, Messaoudène Boudjemaâ (dit Boudjemaâ El Bekari) placé lieutenant de zone, Bensmaïn Abdenour et Belhodja Abdelkader (dit Abd El Kader Baraki) ont été installés à la tête de cette cellule. La mission de responsables des groupes armés a été confiée à Mostefaoui Mahmoud, Harkat Mahmoud, Bernou Rabah et Chaïbi Lakhdar. Ce dernier a été condamné à mort par contumace à l'âge de 18 ans à Sétif. Il circulait à Alger avec de faux papiers. « Nous allons détailler toutes les actions qui ont eu lieu à El Harrach avec des preuves à l'appui », nous dira-t-il. Les fidayin Badaoui Mohamed et Meddar Hamid sont tombés au champ d'honneur. D'autres fidayin sont toujours en vie, à l'exemple de Sahraoui Allel, Zerrouk Boudjemaâ, Fergani Mohamed et Metref Smaïn. Quant aux responsables civils chargés de la logistique à El Harrach (fonds, refuges, guets...), on peut citer les noms de Boumzibra Abdelkader, Lallouche Abdelkader, Belkhodja Mohamed dit Rouget et Yala Amar. Parmi les djounoud, originaires d'El Harrach, rencontrés au maquis par nos interlocuteurs, on cite les deux martyrs Titioui Mohamed et Benyoucef Bina ainsi que Boukhari Mohamed, Lamari Tayeb, Kamel Brahim dit Douglat et Chergou Abderrahman, décédés après l'indépendance ; Moussaoui Mohamed dit Lazreg, Koual Abdelkader, Sahraoui Lakhdar et Galouz Hamoud dit Hamid.