Ces deux dernières semaines, la France a été secouée par deux horribles attentats racistes et antisémites. A Montauban, trois militaires d'origines maghrébine et antillaise ont été abattus par un tueur professionnel. Le même homme a froidement ensuite tué trois enfants et un rabbin à Toulouse, à bout portant, dénotant d'une cruauté sans bornes chez l'assassin. Ces crimes interviennent en pleine campagne électorale pour les élections présidentielles françaises. Tout laisse croire qu'il y a une relation de cause à effet. Depuis son démarrage, cette campagne s'est mise à déraper de façon dangereuse. La chasse à l'électeur dans le camp de droite a consisté à réveiller les bas instincts qui surgissent fréquemment dans les périodes de crise. Dans la sphère de droite, le discours n'a guère porté sur le redressement économique de la France, sur la lutte contre le chômage et les fléaux sociaux, sur la santé, sujet auquel les Français sont très attachés. C'est Marine Le Pen du Front national qui a orienté le débat. Digne héritière de son père, très connu en Algérie pour ses exploits de tortionnaire, elle a, dès le départ, attaqué la communauté musulmane en dénonçant, de façon mensongère, la consommation de la viande halal en Ile-de-France, comme si cette viande pouvait provoquer des maladies rares. Nicolas Sarkozy et son staff s'engouffrent dans la brèche et se mettent à faire dans la surenchère. Son Premier ministre, François Fillon, s'élève contre l'abattage des animaux «selon le rite ancestral». Juifs et musulmans sont ciblés par ces attaques. La droite – donnée perdante dans les sondages – veut remonter la pente à n'importe quel prix, surtout en draguant l'électorat «petit blanc». Il n'en faut pas plus pour réveiller la «bête immonde». Le discours raciste et antisémite donne automatiquement des idées aux fascistes qui rêvent de nettoyage ethnique. Terroristes islamistes et nazillons s'y retrouvent, eux qui ont une haine viscérale pour l'humanité. Le serial killer appartient apparemment à la seconde catégorie. Marine Le Pen et Nicolas Sarkozy ont ressuscité les vieux démons et leurs réactions outragées ne peuvent être considérées que comme de la comédie de circonstance. Ils ont une part de responsabilité dans les deux tueries. Par leur discours stigmatisant des communautés, ils ont ravalé la France à un niveau qui rappelle la sombre période pétainiste. Les valeurs de la Révolution de 1789 ont été piétinées comme elles ne l'ont jamais été durant cette campagne électorale avec, au bout, un voyage dans l'horreur.