- De nombreuses mères célibataires éprouvent des difficultés à être acceptées dans les centres d'accueil de l'Etat. Qu'en est-il au juste ? Il faut reconnaître que ces femmes sont confrontées à une triste réalité. Elles ne connaissent pas leurs droits et sont nombreuses à préférer ne pas aller jusqu'au bout de leur grossesse, mettant en danger leur santé. «Les centres de prise en charge sous notre responsabilité, sont ceux de Mostaganem, Tlemcen, Bou Ismaïlet Diar Errahma. Dès qu'elles dépassent les quatre mois de la grossesse, elle sont immédiatement acceptées et bénéficient de soins nécessaires. Elles ont le droit de garder leur bébé et un délai de trois mois leur est accordé pour y réfléchir.»
- Quel est leur devenir après l'accouchement ?
Après la prise en charge des mères célibataires jusqu'à l'accouchement, une aide financière est fournie à celles qui souhaitent garder leur enfant, pour renforcer l'opération d'insertion et/ou de réinsertion sociale. Cette aide est accompagnée d'une autre, en nature (habillement, lait et médicaments) octroyée par la commission de wilaya (DASS) après une enquête sociale. Cette aide s'apparente à celle octroyée dans le cadre du secours à l'enfance et débouche généralement sur une insertion professionnelle. Mais dans la majorité des cas, ces femmes sont dans le dénuement le plus total. Elles ne peuvent assumer une telle responsabilité. Mais il est vrai que nous ne disposons pas d'informations sur le devenir de ces femmes, en dehors de celles qui regagnent leur environnement familial.
- Beaucoup parmi les mères célibataires avec lesquelles nous nous sommes entretenues affirment être maltraitées et pointées du doigt par le personnel médical, mais aussi avoir fait l'objet de pressions de la part de certaines assistantes sociales pour signer les actes d'abandon, notamment quand il s'agit d'une petite fille. Quel est votre avis ?
Je reconnais qu'il y a encore beaucoup à faire en matière de formation du personnel en contact avec les mères célibataires. Toutes les directives adressées à nos structures, ou à celles de la santé, insistent sur le caractère humanitaire de la prise en charge des mères célibataires. Elles ont droit aux soins tout autant que les autres femmes et elles ont également le droit de choisir librement, sans aucune forme de pression, si elles doivent abandonner ou pas leur bébé. Il y a beaucoup d'efforts à consentir pour éviter aux plus démunies de recourir à des avortements dans des conditions dramatiques, et faire en sorte qu'elles puissent garder leur enfant, en mettant l'accent sur leur prise en charge et leur réinsertion familiale. Nous remarquons que le nombre de mères célibataires qui retournent dans leurs familles ne cesse de progresser. Sur les 209 cas que nous avons reçues, 59 ont été réinsérées dans leurs familles. C'est peu, mais cela prouve que la société n'est pas aussi fermée sur la problématique.
- Pensez-vous que nous sommes devant un phénomène en pleine expansion ?
Je ne pense pas que ce soit le cas. La moyenne annuelle des naissances hors mariage est de 3000. Aujourd'hui, il y a une prise de conscience avérée au sein de la société, notamment dans les familles. Nous avons eu des mamans, des sœurs et même des pères qui ramènent leurs filles et prennent avec eux l'enfant. De plus en plus, les mères célibataires reprennent leur bébé et assument, seules, la responsabilité de les élever.