Les rimes du défunt, Mustapha Djemaï, poète, ami des artistes, décédé il y a une année, résonnaient sur les murs et les cimaises de la galerie. Dans le cadre des «portes ouvertes sur les arts», soutenues par Réseau 50, le portail de l'action artistique (reseau 50.com), la galerie d'art de Maghnia, a abrité, du 25 mai au 8 juin, une exposition de peinture et de sculpture du collectif de la ville : Ahmed Hamidi, Abdelkader Mahboub, Abdelkader Arzazi et Mustapha Souadji, avec la participation de Mimoun Ayer, Mohamed Mahcer, Mohamed Bekhti et Lahbib Amri. Sur fond d'une improvisation de luth de Boualem, dit Serhane, l'éternel rebelle, la manifestation culturelle, quoique inexplicablement ignorée par les autorités locales, a pu extraire la ville de son environnement stressant et l'extirper de ses a priori et stéréotypes pas toujours justifiés. Un éternel «défi» que les artistes lancent dans une société peu encline aux sensibilités de la création. Abstraction, semi-figuratif, aquarelle…, et des sculptures exprimant modernité et originalité. Nuance, ton, subtilité… tout y est. Une quête perpétuelle des techniques plastiques. Peignant avec joie et sans tabous, les artistes, sans trop de fioritures, ne s'encombrent guère de frontières. Leurs seules œillères sont leurs repères. «Don Quichotte» de Mahboub, trônant au milieu de la salle, reluque feu Djemaï, ressuscité par ses poèmes illustrés. «Imprévisible, comme toujours, Mustapha ‘‘cassa sa plume'' le 15 avril 2012 à Oran, quand on s'y attendait le moins. C'était un poète qui a su puiser, dans deux pays, le meilleur de leur culture, pour nous donner le meilleur de lui-même», rappelle Mimoun Ayer, l'écrivain, un autre anneau du collectif. Surgissant de nulle part, les comédiens Guennad et Serhane «squattent» l'espace pour crier, à leur tour, leur trop-plein de désespoir, leur optimisme. Ils se meuvent dans des toiles apparemment statiques. Au milieu d'un public surpris par la désinvolture des deux hommes, en apparence détachés, mais qui constituent un ensemble de créativité artistique loin du boucan d'une cité mercantiliste. Maghnia vit, aussi, de ses artistes, quoi qu'on en dise !