Les entreprises nationales privées et publiques de médicaments risquent d'y laisser des plumes suite à la perte de la valeur de la monnaie nationale de 10% par rapport à l'euro et au dollar. Les trésoreries des entreprises s'attendent à des pertes sèches très importantes. Et cela aura, sans aucun doute, un effet négatif sur le marché du médicament. Les experts sont unanimes pour dire que cette dévaluation, qualifiée plutôt de «dépréciation», engendrera une situation très complexe dans les prochains mois, notamment dans l'approvisionnement en produits pharmaceutiques, d'autant que le système des prix institué aux médicaments est très rigide. Les médicaments seront donc plus chers et les patients seront ainsi contraints de payer la différence. Une conséquence du système du tarif de référence appliqué depuis 2006, alors que les cours du dinar par rapport à l'euro et au dollar ont connu une évolution depuis cette date. Les écarts que les patients auront à payer, notamment dans le traitement de certaines maladies chroniques, sont effarants : de 1000 à 4000 DA pour des produits soumis au tarif de référence. Des perturbations du marché sont sans doute attendues, selon Mouloud Hedir, expert économiste. Il estime que ce système est profondément perturbateur pour les entreprises productrices ou importatrices chaque fois qu'elles font face à un changement dans les conditions économiques sur le marché, comme c'est le cas actuellement avec la dévaluation rapide et significative du taux de change du dinar. «La fixation des prix par une autorité centrale fait que ces produits ne sont pas soumis au jeu de la libre concurrence et que leur prix ne peut pas s'ajuster au gré des conditions du marché et des coûts réels de fabrication ou d'importation. Ce mode de fixation des prix est justifié par le souci des autorités publiques de les maîtriser au plus près pour des raisons liées à la politique nationale de santé publique, de protéger les intérêts du patient et de maîtriser au mieux les équilibres du système national de sécurité sociale», a expliqué l'expert, avant de signaler que dans ce cas de figure, le système reconnaît implicitement la nécessité d'un ajustement des prix et constitue un avantage pour le fournisseur étranger. «Il faut prévoir des difficultés d'approvisionnement et des perturbations du marché jusqu'à ce que l'ajustement requis soit effectif», a-t-il averti. La situation se complique également pour les produits locaux où le problème est plus complexe. Le prix est calculé sur le coût de revient par le ministère de la Santé plus les marges de production et de distribution. «Le prix fixé par le ministère de la Santé étant figé sur cinq années, c'est au producteur à assumer, en principe, les ajustements rendus nécessaires par la fluctuation des coûts de production», soutient M. Hedir. La rigidité actuelle du système des prix pénalise, encore une fois, le producteur national. «Il faudra s'attendre également à des perturbations du marché national pour ces produits dans les prochains mois», prévoit-il. L'économiste déplore ainsi l'absence de couverture du risque de change pour les producteurs nationaux, alors que les organisations patronales recommandent, depuis plusieurs années, au système bancaire de mettre en place un instrument de marché qui soit opérationnel pour la couverture effective du risque de change, ce qui permettra de «pallier, au moins sur le court terme, les effets dommageables pour le secteur du médicament et des glissements répétés de la valeur du dinar».